Pendant tout le mois d’août, Poezibao
est revenu sur ses pas en reprenant les tout premiers temps de l’anthologie permanente. Elle s’appelait
alors l’almanach poétique et a
commencé à paraître le 1er janvier 2002 sur le site Zazieweb aujourd’hui disparu (ce qui fait que les poèmes choisis à
l’époque ne sont plus accessibles).
Lundi prochain, retour à une anthologie permanente davantage liée aux parutions
et pour clore cette série estivale, trois poètes choisis en avril 2002.
(dimanche 14 avril 2002)/Fernando Pessoa
La vie nous a vécus, et non pas nous la vie. Nous, abeilles butinant,
Nous avons vu, parlé, tenu. Les arbres poussent, nous avons duré.
Les dieux, nous les avons aimés, mais comme on regarde un navire.
Jamais conscients d'être conscients, tels nous sommes passés. "
Fernando Pessoa, Le violon enchanté (Écrits
anglais), Christian Bourgois, 1992, page 45.
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(mardi 16 avril 2002)/Michel Leiris
Printemps
De gauche à droite
ou de cour à jardin
égrener le chapelet du vocabulaire
et malaxer chacun de ses grains
pour qu'il devienne fruit mûr
sinon germe d'étoile.
Michel Leiris, Ondes, le Temps qu'il fait, 1987, sans pagination.
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(mercredi 17 avril 2002)/Marie-Claire
Bancquart
Absent
L'homme voit la lyre et ses cordes
séparées.
Son passage est palpitation, coup
de son cœur sur le chant.
Soupir
sourire
solitude dans la seconde.
Mon cœur, deviendras-tu jamais le plectre
d'une musique immense, indivisible ?
Frapperas-tu célébration du germe au fruit ?
Mon cœur ridé crispé
ressasse
qu'entre le micocoulier et les abricots
dans un étroit verger du Midi
vibre le monde.
Toi, tu disparaîtras, cœur, ma cerise.
Le vent te donnera le droit de parcourir la tessiture
entière
sans toi, sans moi. "
Marie-Claire Bancquart, Dans le feuilletage de la terre, Belfond 1994,
page 112.