Manuel Valls, l'euro et l'Europe qui vient

Publié le 30 août 2012 par Edgar @edgarpoe

Manuel Valls a triomphé avec des propos sécuritaires à la Rochelle, et certains des brillants cerveaux de la fonction publique ont passé une partie de l'été à plancher sur le "problème des roms", pendant que l'union européenne craque de tous côtés.

Peut-on relier ces événements divers ?

Quelques points.

Un bref papier de Paul Krugman en juillet dernier, the radicalizing effect of euro disaster. Il explique en quelques lignes que les partis centristes, au sens "de gouvernement", de l'Union européenne, étant tous consacrés à appliquer des politiques absurdes (pacte de stabilité et autres TSCG), quand tout ça se cassera la figure, il ne restera que les partis les plus extrêmes à n'avoir pas trempé dans ce désastre.

Sa conclusion vaut d'être traduite : "d'ici quelques années l'Europe sera peut-être très différente de la gentille alliance de nations démocratiques que nous connaissons et chérissons".

En français : les Hollande d'aujourd'hui font la fortune des le Pen de demain.

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On a l'impression que les plus malins de nos politiques, bien loin de s'aveugler sur ce phénomène, tâchent d'en profiter à l'avance.

Personne ne veut être celui qui aura cassé l'Europe - pas même Mélenchon, qui découvre aujourd'hui que la logique de l'euro c'est l'austérité. L'Union euroépenn ne mérite pourtant que cela, un démontage rapide - c'est même le point de vue de nouriel Roubini, qui appelle à décider d'une fin anticipée de l'euro. Comme quoi un universitaire tout ce qu'il ya de plus intégré peut être plus lucide qu'un Mélenchon (un Jacques Généreux devrais-je peut-être écrire).

Fautde courage sur le fond, sur les vrais problèmes de l'heure, les plus ambitieux vont donc aux extrêmes. A défaut de concevoir une politique à la hauteur, ils veulent au moins donner au peuple des jeux. Avec les roms au milieu de la piste.

Voilà donc Valls parti à la chasse aux migrants, ce "problème" si urgent qu'il semble éclipser tous les autres.

Par une cruelle ironie du sort, c'est aussi un "problème" que l'Union européenne a fait naître !

Que lit-on dans un article du Monde de décembre 2004 : "en Slovaquie, les réformes libérales jettent les Roms dans la misère".

Que s'est-il passé en 2004 en Slovaquie ? Le gouvernement a appliqué des réformes libérales dans le cadre de son adhésion à l'Union européenne.

Extrait de l'article : "Selon un rapport de l'Organisation internationale des migrations, une « catastrophe humanitaire » menace les couches les plus défavorisées de cette population. L'enquête relève des cas de malnutrition et l'aggravation de l'état de santé des enfants."

Il ne s'agit pas de nier les problèmes d'insécurité (comme semble le croire Lauent Pinsolle dans un tribune moins inspirée que d'habitude).

Il faut juste rappeler que le problème de l'heure n'est pas de chasser quelques roms.

Le problème de l'heure est de retrouver les moyens de mener des politiques économiques et sociales qui en soient dignes, reposant sur l'ensemble des moyens dont dispose un pays civilisé et démocratique (une banque centrale, un budget, des douanes, un taux de change...)

Ceux qui préfèrent attendre que ce soit l'Union européenne qui devienne un pays civilisé et démocratique, Mélenchon et le PS ensemble, sont responsables dès aujourd'hui de l'extrémisation qui arrivera demain, lorsque les tensions sociales dans l'Union deviendront ingérables.

Post scriptum :

 Pour les Tartuffe qui estimeront que non, Valls n'est pas dans l'agitation démagogique, quelques lignes bien senties : "C'est bien la politique du gouvernement de Nicolas Sarkozy qui est responsable de la précarité intolérable dans laquelle se trouvent ces familles et qui fabrique un groupe de population, bouc-émissaire idéal pour justifier des politiques toujours plus répressives. [...] J'ai toujours dénoncé, et je continuerai à le faire, la stigmatisation dangereuse lancée par le candidat sortant en août 2010 à l'égard des populations de Roms: expulsions brutales à répétition, stigmatisation toujours plus forte d'une population, interdiction de travailler et de se former, reconduites aux frontières sans résultat". Oui, bien sûr, c'était du François Hollande, en avril 2012.

Depuis, Hollande est, comme Sarkozy, voué à l'impuissance européenne. Il s'apprête scandaleusement à faire adopter le TSCG sans référendum, il laisse donc les mains libres à un Sarkozy de gauche qui reprend, quatre mois après l'élection, les mêmes politiques de gesticulation pour que, surtout, les français se consacrent à toutes sortes de problèmes mais pas aux questions européennes. La suite est écrite : quand Ayrault sera usé, c'est Valls qui prendra le peuple français par les cornes pour lui faire avaler, jusqu'à l'abrutissement le plus complet, sa potion européenne.