La critique de Claude :
Bien qu’illustré de superbes photos, notamment aériennes, ce petit livre, présent qu musée de Vesunna mais aussi dans notre bibliothèque n’est pas toujours très "parlant". L’auteur reste près de ses sources (sites archéologiques) sans toujours donner une image vivante du réseau, expliquer les objectifs de ses créateurs, ou raconter leurs aventures. Mais c’est la loi du genre dans ces collections scientifiques, et le sujet est si passionnant que l’on s’en accommode.
Ce qui frappe, c’est d’abord l’étendue du réseau, illustrée par la Table de Peutinger, du nom du collectionneur allemand de la Renaissance qui l’a détenue : c’est un atlas général des routes romaines entre les IIIème et Vème siècles. Ses erreurs géographiques ne le rendent que plus émouvant.
Ce livre est en revanche excellent sur la technologie de la sole routière et de ses fondations, ainsi que des ouvrages d’art : ponts, tunnels et passages arrachés à la montagne.
Il insiste sur le pragmatisme des constructeurs, qui, loin d’appliquer une doctrine ne varietur, s’adaptent au terrain et aux ressources locales. Rien n’est plus trompeur, par exemple que ces quelques tronçons de route dallée, que l’on voit dans le Midi, et qui vous font penser que toutes les voies romaines étaient dallées, comme toutes nos autoroutes modernes sont « macadamisées ».
Le livre évoque aussi les services liés à la route, notamment celui de la sécurité, avec les Beneficiarii, gendarmes de la voie.
Notre chauvinisme peut se flatter du fait que les Gaulois, qui étaient d’ailleurs des maîtres en construction de charrues, avaient déjà développé un beau réseau routier, ce qui a d’ailleurs permis aux Légions de César de pénétrer leur territoire.
Cet excellent livre appelle une réflexion plus large : il est surprenant de ne pas trouver en France de grand ouvrage récent sur l’histoire de la route : il serait intéressant, dans le contexte de l’histoire politique, économique et sociale, d’étudier le déclin des routes après l’Empire romain, leur développement avec les volontés royales (XVème au XVIIème siècle), les idées physiocrates au XVIIIème siècle (création des Ponts et Chaussées par Louis XV), ou dans le cadre de la Révolution industrielle.
Il existe cependant sur l’internet un document de grande qualité sur l’Histoire des routes, établi dans le cadre du Laboratoire central des Ponts et Chaussées par M. Jean Billard. Vous le trouverez à l’adresse http://www.lcpc.fr/francais/sources-d-information/article/lcpc-sources-d-informations-288
Les voies romaines en Gaule par Gérard Coulon, Conservateur du Patrimoine - Editions Errance, 235 p, 22 €