Avec sa coupe à la garçonne, son look androgyne et son joli minois mangé par deux yeux immenses, Twiggy bouleversa, à 16 ans, les canons de la beauté alors en vigueur dans le mannequinat. C’était en 1965. Et le « Time » ayant, un an plus tard, qualifié la capitale britannique de « Swinging City », Twiggy devint le symbole du Swinging London. Rien ne la destinait à la carrière étonnante qu’elle va mener. La mode et les milieux artistiques ne sont pas la « tasse de thé » de ses parents, tous deux d’origine modeste. C’est dans une banlieue au nord de Londres, pas « swinging » du tout, que Lesley Homby voit le jour le 19 septembre 1949. Enfant sage, adolescente aux débordements occasionnels, provoqués par son addiction pour les Beatles : elle hurle lors des concerts et placarde les murs de sa chambre de posters hauts en couleurs… Au lycée durant la semaine, Lesley « shampouine » les samedis et durant les vacances pour se faire de l’argent de poche.
Elle a 16 ans, 1m69 et 41 kg, lorsqu’elle est remarquée par le très séduisant Nigel Daves qui va devenir son pygmalion et son amant. Coupe de cheveux à la garçonne par Léonard, le coiffeur le plus couru de Londres, balayage, application de faux cils immenses, photo… Le « look Twiggy » (c’est-à-dire brindille, surnom donné par ses parents) est affiché en vitrine. Heureux hasard ( !) la rédac’ mode du Daily Express passe par là… et c’est parti ! Nigel Daves, rebaptisé Justin de Villeneuve pour faire plus chic, devient le manager du mannequin qui, en peu de temps, sera un des modèles parmi les plus demandés au monde, devenant parallèlement l’égérie de Mary Quant et de la mini jupe.
Le Swinging London, c’est aussi une nouvelle façon de photographier la mode, de la faire « bouger » en studio, dans les rues… Carneby street, Kings road à Chelsea… Trois artistes –Brian Duffy, David Bailey et Terence Donovan s’y emploient et rien de tel que les musiques dans l’air du temps –les Beatles, les Rolling Stones, les Who- pour que les modèles s’éclatent, pour que les clichés soient, aujourd’hui encore, mis à l’honneur dans des expositions.
Twiggy a fait la cover des plus grands magazines du monde, elle a défilé à Paris, aux States, à Tokyo, elle est richissime et très heureuse de s’être liée d’amitié avec Paul Mc Cartney, son Beatles préféré. Elle s’est essayée à la chanson, sans trop de succès (elle n’atteindra le top 20 qu’en 1976 avec « Here I go again »…) En 1969, elle est déjà « lasse de servir de cintre ! », bref, pressée de passer à autre chose. Paul lui conseille de contacter Ken Russel qui se prépare à tourner « The Boy Friend », une comédie musicale. Twiggy s’arme de courage pour se mettre aux claquettes, passe une audition, décroche le joli rôle de Polly Brown en 1971 et, bingo ! est récompensée par deux Golden Globe Awards (meilleur espoir, meilleure actrice de comédie musicale). Deux ans plus tard, elle prouve avec « W » de Richard Quine qu’elle peut assumer un rôle dramatique, tomber amoureuse de son partenaire (l’ancien joueur de baseball Michael Whitney) et l’épouser. Une petite fille, Carly, naît de cette union en 1978.
D’autres films suivront ainsi que des disques, des pièces de théâtre, notamment « Pygmalion » de Georges Bernard Shaw, en 1981, où elle tient le rôle d’Eliza Doolittle (oui, celle de My Fair Lady…). Mais c’est à Broadway, deux ans plus tard, que Twiggy va littéralement éblouir professionnels et spectateurs avec le musical « My one and only » sur une musique de Gershwin et une chorégraphie de Tommy Tune, son partenaire. « s’wonderful », leur numéro de claquettes dans l’eau reste un grand moment de music hall. A voir absolument !
Twiggy a vécu et travaillé tantôt aux Etats-Unis, tantôt à Londres, continuant à fasciner les caméras de cinéma et de télévision par son extraordinaire photogénie. En 1988, sur le tournage de « Madame Souzatska » où elle donne la réplique à Shirley Mac Laine, elle rencontre l’acteur shakespearien Leigh Lawson qui deviendra son deuxième époux. L’actrice a touché à bien des genres, mais jamais aux films d’horreur… un John Carpenter, cela ne se refuse pas ! Elle tourne « Body Bags en 1993. Par la suite, elle ne fera plus que des apparitions dans des séries télévisées (son propre rôle dans « Absolutely Fabulous », le Muppet Show…) et elle animera deux talk shows.
Quant à la mode, un rêve refait lentement surface à la fin des années 2000 : étant ado, c’est designer que voulait devenir la filiforme Lesley Homby. Elle se met à dessiner des vêtements qui lui ressemblent : fun, stylish and cool et à un prix abordable. Les grands magasins Mark & Spencer sont séduits. La collection de prêt-à-porter « Twiggy for Women » est lancée. Le succès est au rendez-vous. Parallèlement, en 2009-2010, la National Portrait Gallery consacre une grande expo à la célébrissime cover-girl qu’elle fut : « Twiggy. A life of photographs ». C’est peut-être cela qui lui a donné envie de refaire du mannequinat. Cette année, en effet, elle a assumé la promo « photos » de sa collection. (A voir sur markandspencer.com/twiggy). A bientôt 63 ans, elle est absolument superbe. Depuis sa deuxième autobiographie parue en 1998 (la première, en 1975, elle avait 24 ans…), il s’est passé bien des choses… Alors, une troisième, bientôt ?