Quand on investit dans des devises étrangères on court le risque d’essuyer des pertes non pas seulement à cause de l’actif lui-même, mais aussi parce la devise dans laquelle on a placé son argent peut perdre de sa valeur. Le dollar est un exemple classique de ce phénomène puisque sa valeur est passée de 4.3 CHF pour 1 USD en 1970 à la presque parité aujourd’hui. On serait encore plus bas sans la fixation du taux plancher avec l’euro par la Banque Nationale Suisse en 2011. Même en investissant dans sa propre monnaie on n’est pas à l’abri de perdre de l’argent rien que par la perte de valeur induite par l’inflation. Aussi, de nombreux investisseurs placent une partie de leurs avoirs dans l’or, ce qui leur permet de s’affranchir du risque de change en même temps que de celui de l’inflation. D’autres investisseurs transitent par le Forex pour couvrir leurs positions.
Je n’apprécie ni le Forex, ni l’or. Les deux ont une très forte connotation spéculative, surtout le métal jaune. En effet, si une devise repose sur les fondamentaux du/des pays qui l’abrite, l’or ne s’appuie sur rien d’autre que sur l’offre et la demande. L’or est inerte, il ne crée aucune richesse, il ne fait que s’échanger à des prix qui différent dans le temps. Il ne repose que sur la perception de la valeur que s’en font les vendeurs et les acheteurs. Si, pour une raison ou une autre les sentiments des investisseurs changent vis-à-vis du métal jaune, son prix peut brusquement changer et ce mouvement peut-être presque sans fin puisqu’il n’existe pas de base réelle qui puisse justifier sa valeur.
Les actions par contre possèdent bel et bien une valeur intrinsèque quantifiable, indépendante de tout ressenti des investisseurs. De plus, elles créent de la valeur à travers le temps, grâce au travail fourni par le management et surtout les employés des entreprises. Une partie de cette valeur crée va aux collaborateurs, une autre reste aux mains de l’entreprise, une autre va à l’Etat et une autre enfin nous revient à nous, actionnaires.
Il existe par chance des sociétés qui réalisent une part très importante de leur chiffre d’affaire à l’étranger. Les actions de ces entreprises possèdent la caractéristique très intéressante de se couvrir d’elles-mêmes contre le risque de change. En effet, si leur monnaie baisse, les coûts fixes de l’entreprise générés par le siège deviennent relativement moins importants par rapport au prix de vente du produit/service dans les autres pays. En même temps, les rentrées d’argent effectuées dans des devises étrangères deviennent relativement plus importantes. Ou alors c’est le prix du bien/produit qui baisse, dopant du même coup les exportations.
J’ai sélectionné ci-dessous quatre entreprises américaines payant des dividendes croissants et qui excellent tout particulièrement dans l’art de se couvrir d’elles-mêmes contre le risque de monnaie.
Clorox (NYSE:CLX), fabriquant de produits de nettoyage, ne réalise que 20% de son chiffre d’affaires à l’international. Malgré ses tentatives pour devenir une entreprise plus globale, Clorox est aujourd’hui encore fortement dépendante de la lente croissance du marché nord-américain. Bien que la chute du dollar puisse un peu booster ses exportations, le coût des matières premières achetées en devises étrangères augmentent avec la baisse du dollar. Néanmoins, pour remédier à ce problème CLX utilise des instruments financiers pour se couvrir contre les risques de volatilité des devises étrangères, ce qui a un impact significatif sur le cours de l’action. Clorox affiche ainsi un à $risk de -0.9, qui signifie que le titre offre une protection quasi parfaite contre le risque inhérent à sa propre monnaie.
McDonald’s (NYSE:MCD) réalise les 2/3 de son chiffre d’affaires à l’étranger. Grâce à cela, lorsque le billet vert baisse, la valeur d’un Big Mac vendu hors Etats-Unis grimpe lorsqu’on la consolide en dollars. Le $risk de MCD, avec -0.79, confirme que la plus célèbre chaîne de fast-food au monde se régale lorsque le dollar s’affaiblit.
IBM (NYSE:IBM) fait presque aussi bien que MCD avec 60% de son chiffre d’affaire réalisé hors Etats-Unis. Le $risk de -0.75 confirme que IBM apprécie un dollar faible, offrant du même coup une bonne protection contre le billet vert.
Sigma-Aldrich (NASDAQ:SIAL), fabriquant de matériel pour la recherche scientifique biologique et chimique, possède la particularité de réaliser les 3/4 de son chiffre d’affaires à l’international, ce qui est assez prodigieux. Le $risk de -0.73 atteste que l’entreprise répond très favorablement à une baisse du dollar.
Ces quatre titres permettent d’investir dans des payeurs de dividendes croissants éprouvés, qu’on ne trouve qu’aux Etats-Unis, sans devoir se soucier contre le risque de monnaie et sans devoir utiliser des artifices financiers pour s’en couvrir. Elle est pas belle la vie ?