A l'heure des bilans, je dois avouer que cet été aura été quelque peu maussade, apportant, du côté des nouveautés, plus de déceptions que de satisfactions. Non que j'avais des espoirs fous pour toutes (vous connaissez mon optimisme chroniquement mesuré), mais il y avait quand même des séries qui aiguisaient ma curiosité plus que la moyenne : c'était le cas de Political Animals. Sur le papier, Greg Berlanti et Laurence Mark détenaient une fiction à potentiel - de la politique, du familial - porté par un casting cinq étoiles capable de porter un script. Au vu de ces promesses, la désillusion n'en a été que plus grande.
Présentée comme une mini-série, avec une option pour être renouvelée si elle marchait (les audiences n'ont cependant pas été au rendez-vous), Political Animals s'est révélée plutôt être une longe introduction à une suite qui ne viendra probablement pas. Elle compte 6 épisodes d'une quarantaine de minutes environ. Et si USA Network entendait dépasser grâce à elle le registre des buddy shows divertissants dans lequel elle s'est épanouie ces dernières années, ce n'est certainement pas avec Political Animals qu'elle marquera son arrivée dans un autre domaine.
Elaine Barrish est une ancienne Première Dame des Etats-Unis. Après que son mari, Bud Hammond, ait quitté le bureau oval, dans les années 90, elle s'est lancée dans une carrière politique personnelle pour finalement échouer aux primaires démocrates face à Paul Garcetti. Suite à cette défaite, elle a divorcé et revu ses priorités. La série s'ouvre deux ans après cet échec, alors qu'elle est devenue secrétaire d'Etat pour Garcetti qui a été élu. Cependant ses ambitions n'ont pas disparu : elle a identifié les faiblesses qui lui ont été fatales la dernière fois et caresse le projet de se relancer dans la bataille électorale, quitte à lutter contre le président sortant pour obtenir la nomination démocrate.
Cependant, à côté de sa vie politique, Elaine doit aussi prendre en compte sa famille, et notamment ses fils. Habitués à vivre sous le feu des projecteurs depuis leur enfance, ils n'ont pas composer de la même manière avec la pression : si Doug apparaît a priori comme le gendre idéal, servant de chef de cabinet à sa mère, les choses sont plus difficiles pour TJ. Premier enfant de président des Etats-Unis à avoir fait son coming out durant son adolescence, il a traversé des périodes difficiles qui s'en ressentent toujours sur le fragile équilibre qu'est sa vie d'adulte. De plus, Bud Hammond n'a pas renoncé à retrouver les bonnes grâces de son ex-femme ; et Elaine, tout en ayant conscience qu'il constitue un point faible, personnel et professionnel, n'a pas non plus complètement tourné la page.
Political Animals comporte deux volets distincts qu'elle tente d'entremêler avec plus ou moins de succès - généralement moins ; elle s'essaie en fait au soap politique. Son principal problème vient justement de ce versant politique. La série l'investit avec l'adresse d'un éléphant lâché dans un magasin de porcelaine : son écriture ferait presque passer Commander in Chief pour une fiction subtile. Dignes d'un vieux téléfilm baclé, les storylines délivrent une vision manichéenne à l'extrême, pas un instant crédible dans leurs développements, se plaçant dans un champ moralisateur qui, en 2012, n'a pas sa place pour aborder de tels enjeux internationaux. Les déclarations de principe dépassent allègrement le simple cadre de l'idéalisme, pour basculer dans un irréalisme maladroit, développant une vision géopolitique binaire extrêmement indigeste. Face à un tel désatre, il eut mieux fallu, pour la crédibilité de la série, qu'elle évite cette incursion politique dispensable - elle aurait pu l'évoquer seulement de loin, sans essayer de nous faire vivre des crises - et se concentre sur son autre aspect, la saga familiale.
Political Animals retrouve en effet quelques couleurs lorsqu'elle se recadre sur la famille Hammond et oublie ses ambitions de sauvetage du monde. Elle devient alors un soap aux grosses ficelles pleinements assumées, aux dynamiques familières vues et revues, mais qui demeure suffisamment efficacement emballé pour retenir l'attention du téléspectateur. Ce dernier se prend au jeu de cette famille, solidaire, mais menaçant aussi à tout moment d'imploser. Sans aller toujours au bout des idées esquissées, la série développe la problématique de la confrontation entre les ambitions professionnelles d'Elaine et une famille que les projecteurs n'ont déjà que trop meurtrie. Certes, les personnages ne sont jamais loin de la caricature. Mais dans ces registres plus émotionnels, la solidité du casting joue et contribue à imposer les différents protagonistes, à asseoir leurs caractères et leurs failles. Si l'intrigue politique reste inachevée au terme de ces six épisodes, le versant soap est lui plus abouti, amenant Elaine à la prise de conscience d'un autre équilibre à trouver, tout en laissant entrevoir suffisamment de blessures qui ne sauraient guérir.
Déséquilibré et maladroit sur le fond, Political Animals pose également problème sur la forme. J'ai passé une bonne partie de la mini-série à m'interroger sur les intentions qui pouvaient se cacher derrière son montage hasardeux, parfois à la limite de la cohérence. La manie de recourir à des flashbacks constants dans certains épisodes rend la trame narrative, déjà pas toujours très convaincante a priori, assez confuse. A cela s'ajoute des limites formelles indéniables, avec un clinquant trop forcé qui sonne faux. Cependant notons que la série dispose d'un vrai générique, accompagné d'une chanson : c'est suffisamment rare pour être souligné, même s'il a la même absence de subtilité que le contenu de la fiction.
Par-delà tous ces défauts, le seul réel point fort de Political Animals sera resté son casting. Non qu'il ait été capable de miracles et d'empêcher de faire se lever quelques yeux au plafond devant certaines lignes de dialogue, mais il est certainement la raison pour laquelle je suis allée au bout de ces six épisodes. Il laisse cependant des regrets, devant un talent ainsi gâché. Pour son passage au petit écran dans un rôle de femme de pouvoir, Sigourney Weaver met de la conviction pour apporter la présence qu'il convient à l'écran. Son ex-mari est interprété par Ciaran Hinds (Rome) qui confère la démesure nécessaire à son personnage. Sebastian Stan m'a rappelé que j'étais toujours triste de l'annulation de Kings. J'ai été ravie de retrouver le toujours charmant James Wolk, qui m'a rappelé, lui, la trop éphémère Lone Star. Ellen Burstyn (Big Love) incarne quant à elle la mère d'Elaine. Enfin, à l'extérieur de ce clan, Carla Gugino (Treshold, Californication) est une journaliste en quête de scoop qui tente surtout de comprendre le fonctionnement de cette famille. A noter la présence d'Adrian Pasdar (Profit, Heroes), sous-employé, dans le rôle du président Garcetti.
Bilan : Essai maladroit et inabouti de soap politique, Political Animals laisse le téléspectateur sur une impression de frustration intense au vu du potentiel présent sur le papier et gâché à l'écran. Indigeste, moralisatrice et manichéenne lorsqu'elle évolue dans un champ politique dans lequel elle n'aurait jamais dû se risquer, elle est plus légitime dans son volet soap, sans jamais réussir à échapper à une écriture aux ficelles trop grosses. Il reste au final un casting qui soutient tant bien que mal l'édifice, mais qui ne sauve pas une série tout simplement mauvaise...
NOTE : 4,75/10
Une bande-annonce de la série :
Le générique de la série :