Les créateurs d’entreprises sont sur le départ. Plus que leur richesse, c’est leur énergie, leur volonté, leur exemple que risque de perdre notre pays.
Par Thibault Doidy de Kerguelen.
Les signes d’alerte se font de plus en plus pressants. Au-delà des « riches » qui quittent le territoire national pour échapper aux impôts confiscatoires, au-delà des sportifs ou des artistes qui vont s’installer aux USA ou au UK, ce sont maintenant les créateurs d’entreprises qui tirent la sonnette d’alarme.
- Pierre Chappaz, fondateur de Kelkoo, Wikio et eBuzzing s’en est allé s’installer en Suisse où il était même récemment candidat suppléant aux élections législatives.
- Loïc Le Meur, chroniqueur d’un mensuel d’économie grand public, fondateur de SixtAppart, animateur de symposiums et de shows informatiques, s’est exilé en Californie après un rapide passage en Belgique.
- Marc Simoncini, le fondateur du site de rencontres Meetic, et aujourd’hui, comme les autres millionnaires d’Internet, à la tête d’un fonds, Jaïna Capital, qui aide les start-up, s’énerve. Après avoir déclaré que si François Hollande appliquait son programme économique et fiscal, il ferait « le même métier, mais de Belgique », le voici qui, agacé, envoie ce genre de tweet :
- Patrik Robin, Président et fondateur de 24h00, connu pour être un sympathisant de gauche, électeur déclaré de François Hollande, Patrick Robin qui avait affirmé ne pas vouloir quitter, à aucun prix la France, Patrick Robin n’en peut plus et éructe. Le plus drôle, c’est que c’est une publication « bien pensante » de la bonne bourgeoisie socialiste qui recueille et publie ses épanchements, le Huffington Post. Allez, pour une fois, faisons leur de la publicité. Ce texte est à lire absolument, tellement il dit avec simplicité et sincérité ce que des milliers (« que » des milliers, mais qui pèsent pour combien dans l’économie de notre pays..) d’entrepreneurs français ressentent…
- Et puis, le dernier, par ordre chronologique, à s’être exprimé. C’était hier matin sur BFM. Il s’agit de Jean-Émile Rosenblum, fondateur de Pixmania. Une interview intéressante dans laquelle il raconte la réussite de Pixmania et puis, les dernières minutes, terribles, pathétiques. « Aujourd’hui, ça ne me donne pas envie de rester », « L’ISF, si ça reste comme ça, personne ne restera, personne ne restera… » , « Avant, tout le monde parlait du départ, aujourd’hui, tout le monde acte… » , « on a besoin de rêver dans ce pays, il faut arrêter de niveler par le bas et au contraire niveler par le haut… » , « On est tous d’accord pour dire que la France est un pays merveilleux et on a tous envie d’y vivre, maintenant, faut être clair, les dix prochaines années, la croissance ne sera pas en Europe, si, en plus, on nous met des barrières en disant "si vous restez, vous allez payer plus que n’importe où dans le monde", l’équation devient impossible »… Prenez le temps de regarder cette interview.
Les entrepreneurs tirent la sonnette d’alarme. Est-ce que le ministre du redressement productif et ses 22 commissaires entendront ce cri unanime ? Pas sûr, hélas. Pourtant, nous n’avons à faire là qu’à des entrepreneurs qui ont investi en France, qui ont mis leurs... (koleos ?) sur la table pour réussir. Ce ne sont ni des sur-diplômés cooptés dans des conseils d’administration par leurs copains de promo, ni des salariés nommés à la tête d’entreprises dans lesquelles ils ne possèdent que leurs stock options et leurs parachutes dorés. La vraie force, la vraie sève de notre économie, ce sont eux, les créateurs, pas la présidente bobo bien pensante du Medef qui négocie les accords sociaux avec sa copine Touraine autour d’un repas du Siècle. Si demain eux, les fonceurs, les transgresseurs, les investisseurs, partent, c’est vingt, trente ans, qu’il faudra pour retrouver une génération de fonceurs et de créateurs qui puisse remettre le pays dans le rythme du progrès et du développement.
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