Depuis 2009 l’encaisse des entreprises (Cash on the Sideline) ne cesse de gonfler. Pendant que les gouvernements croulent sous les dettes, les sociétés en ont plein les tiroirs.
On estime à plus de 1800 milliards de dollars les actifs liquides des entreprises américaines et à 562 milliards $ les réserves corporatives du côté canadiens. Pour la première fois de ma vie, j’ai entendu hier un gouverneur d’une banque centrale implorer les dirigeants sur le sujet. Mark Carney de la Banque du Canada exhorte les entreprises à cesser d’empiler du fric. «C’est de l’argent mort…Si les entreprises ne savent pas quoi faire avec leurs profits, les actionnaires pourraient le savoir, eux!»
Alors que dans la rue, on ne parle que de chômage, de compressions budgétaires, d’endettements… les patrons des grandes entreprises nord-américaine ne savent plus quoi faire des surplus. Comment est-ce possible? D’où vient ce pognon?
Voici les principales sources;
- -Rationalisation de personnel et ventes de divisions depuis 3 ans
- -Gestion plus étroite des stocks et des dépenses
- -Limitation des bonis et rémunération des hauts dirigeants
- -Augmentation des bénéfices
- -Délocalisation dans les pays émergents… et j’en passe.
Les inquiétudes face à la à la fragilité de la reprise économique poussent les dirigeants à laisser grossir l’encaisse de trimestre en trimestre. Mais voilà, il est maintenant monstrueux et les sociétés sont encore frileuses. Pourquoi?
Elles sont en attente de stimuli. Elles les espèrent sous deux formes très précises.
En cette année électorale, on espère des subventions ou incitatifs gouvernementaux pour la création d’emplois ou investissements dans des infrastructures liés à la productivité et à l’exportation. Mais surtout, on souhaite un changement dans la fiscalité afin de rapatrier la liquidité qui dort dans les coffres HORS des États-Unis. Prenez seulement APPLE, si elle rapatrie aux États-Unis la majorité de son encaisse de 117 milliards, elle devrait payer un impôt immédiat d’au moins 10 milliards. Elle le laisse donc dormir où il est, dans les banques d’Irlande et du Luxembourg.
Monsieur et Madame Plein-d’fric
Ajoutez à ses trésors de guerre les sommes sur les voies d’accotement détenus par le public investisseur américain, et la cagnotte dépasse tout entendement. La somme totale des actifs MZM-Money of Zero Maturity (Bons du Trésor et argent en banque) est à un niveau «panique». Comme si la fin du monde arrive le 21 décembre!
Il y a près de 10 000 milliards en liquide aux États-Unis. Une somme quasi équivalente à la valeur boursière de TOUTES les entreprises du S&P500. Pour vous donner une idée de l’impact que pourrait avoir un déploiement partiel des liquidités en actions… sachez qu’une injection de 100 milliards de dollars dans le marché boursier provoque un signal d’achat suffisamment puissant pour élever les valeurs boursières de 1000 milliards!
Après la crise de 2008, les dirigeants des grandes entreprises ont eu une frousse du diable et ont posé différents gestes visant à se constituer des réserves au cas où la crise s’éterniserait. Bien voilà, ce réflexe d’empiler est devenu une habitude. C’est en gardant indéfiniment cette masse monétaire que la crise n’en finit plus. Pire, retreindre encore longtemps ainsi les mouvements de capitaux pourrait replonger l’Amérique du Nord en récession.