Deux lecteurs et commentateurs réguliers de mon blog viennent de rédiger deux commentaires intéressants qui méritent ce petit billet.
Pierre Borie, répond à l'article Taxer le carbone pour payer nos charges sociales, une idée catastrophique dans sa version publiée sur les Echos. Voici ma réponse à son commentaire.
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Monsieur Pierre Borie,
vous dites: "Votre proposition de "fiscalité environnementale incitative" aboutit, si je comprends bien, à donner aux pollueurs les moyens de ne plus polluer, ce qui est une manière de les faire profiter des effets d'aubaine si coûteux pour les finances publiques. Ce n'est pas en en redistribuant le produit entre leurs mains que l'on agira efficacement, mais en les faisant payer (selon le principe énoncé par l'OCDE en 1972) à l'aune de la pollution qu'ils continueront à émettre."
Cela mérite précision car votre présentation déforme ma réflexion:
-les "pollueurs" sont nous tous, y compris vous et moi. Cette présentation manichéenne des "vilains" pollueurs nous fait oublier que l'ensemble de nos concitoyens polluent parce qu'ils n'ont pas le choix, de prendre leur voiture pour aller travailler, de se chauffer au gaz, ...
-faire payer une taxe carbone revient donc à punir tout le monde, y compris les personnes convaincus d'écologie et qui, pour cela, ont choisi de vivre à la campagne quand ils doivent aller travailler à la ville.
-le système des contributions incitatives n'est pas "coûteux pour les finances publiques" puisqu'il s'agit justement de réserver l'ensemble des produits des contributions pour financer la sortie de ceux qui le voudront. L'Etat ne financera plus rien et n'accordera plus ses réductions d'impôts, niches fiscales coûteuses aux effets pervers.
-le système de contributions ne financent donc pas d'affreux pollueurs mais les personnes et les collectifs qui voudront sortir de leur dépendance au carbone.
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Daniel Jagline répond, pour sa part, à mon dernier article Essence : faut-il alléger la facture pour le consommateur? par le commentaire suivant:
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Bien que je fais parti de celles et ceux qui seront directement touché, je crois pourtant que vous avez raisons.
Ce qui est tout de même difficilement acceptable, c'est qu'après avoir subit des taxes très élevé en France on en arrive à cette situation, ce sont des citoyens comme moi qui ont le plus besoin de se véhiculer pour aller travailler, qui trinquerons, tout en continuant à servir de vache à lait, et cela à cause de l'incompétence de nos dirigeants qui ont été incapable d'anticiper une situation pourtant hautement prévisible. -
Daniel répond indirectement à Pierre: oui, il est pollueur et captif d'un système que nous n'avons pas choisi.
Je précise que je suis personellement dans la même situation : habitant et travaillant dans Marseille, je pourrais prendre les transports en commun, mais j'aurais 3h de transport par jour et non une heure dans ma voiture ! Cela me consterne mais je ne peux rien y faire. Et ce n'est pas en me punissant comme un "vilain" pollueur que cela va changer !
L'important aujourd'hui est de trouver des démarches qui permettent à tous ceux qui le désirent de sortir de ce système, en se donnant les moyens de revoir les systèmes et d'investir dans la transition et le découplage avec l'ancienne économie. Ma réflexion -centrale- autour des contributions incitatives vise à cela.
Pour compléter ma réponse à Pierre Borie et à tous ceux qui croient à la taxation carbone punitive, il est intéressant de réfléchir à l'utilité de la sanction. Travaillant cette question dans un autre cadre,(je forme des jeunes enseignants à construire leur autorité face aux élèves), on peut faire le parallèle avec l'usage de la sanction. Un professeur qui croit que seule la sanction va assurer son autorité ne va pas y arriver, c'est en responsabilisant ses élèves qu'il va se faire respecter car il va définir clairement les règles et les conséquences négatives ou positives du comportement des élèves. La sanction est un outil à utiliser avec beaucoup de doigté.
Ce que propose les défenseurs de la taxe carbone ressemble au comportement d'un jeune professeur inexpérimenté qui irait punir un élève qui refuse de lire à haute voix en classe alors que cet élève ne sait pas lire : inutile et contre-productif.