L’été est le temps des rediffusions ! Poezibao revient donc sur ses pas et reprend les tout premiers temps de l’anthologie permanente. Elle s’appelait alors l’almanach poétique et a commencé à paraître le 1er janvier 2002 sur le site Zazieweb aujourd’hui disparu (ce qui fait que les poèmes choisis à l’époque ne sont plus accessibles).
Les extraits étant très courts à l’époque, Poezibao en publiera deux chaque jour de cet été.
(vendredi 15 mars 2002)/Silvia Baron Supervielle
je ne corrige plus le temps
et le soir a perdu ta présence
l'oubli qui t'encercle cède
une autre bouche garde le secret
un autre feu cerne la forêt
trouve le vent ouvre la nuit
et par la même plage submergée
sur la trace de sel étincelante
où nous allions sans ombres
je reviens et la mer déferle
vers le large qui enchaîne
déchaîne à l'heure solitaire
de l'écueil l'éclair du rêve
qui te revoit.
Silvia Baron Supervielle, La distance de sable, Granit 1983, p. 102.
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(dimanche 17 mars 2002)/Francis Ponge
La bougie
La nuit parfois ravive une plante singulière dont la lueur décompose les chambres meublées en massif d'ombre.
Sa feuille d'or tient impassible au creux d'une colonnette d'albâtre par un pédoncule très noir.
Les papillons miteux l'assaillent de préférence à la lune trop haute, qui vaporise les bois. Mais brûlés aussitôt ou vannés dans la bagarre, tous frémissent aux bords d'une frénésie voisine de la stupeur.
Cependant la bougie, par le vacillement des clartés sur le livre au brusque dégagement des fumée originales encourage le lecteur, - puis s'incline sur son assiette et se noie dans son aliment".
Francis Ponge, le Parti pris des choses, La Pléiade, Gallimard 1999, p. 19 (disponible également dans le volume Le parti pris des choses, précédé de Douze petits écrits et suivi de Proêmes, Poésie/Gallimard.