On s’excuse, on a complétement oublié de vous parler d’une énorme pépite de chez Minus.
Tout être humain sur terre ou ailleurs, doté de sens et d’oreille, et se disant apprécier la techno se doit de connaître l’existence, le personnage et l’œuvre de Richie Hawtin. Loin de là pour nous l’idée de vous faire un portrait sur Plastikman (son premier nom qui restera de loin le plus fameux), concentrons nous davantage sur l’empreinte que ce génie a laissé sur notre temps et la musique électronique.
Certes, les débuts de celle-ci voient leur origine dans les travaux de Pierre Henry, Kraftwerk et autres robots, mais l’évolution de la musique électronique, de bruit inaudible à mélodie percutante et dansante, ne peut pas se concevoir sans le travail de Richie Hawtin. L’anglo-canadien, profitant d’une époque recherchant de nouvelles bases (politiquement et musicalement), a su faire partie de la création d’un nouveau genre de musique, rien que ça. C’est con à dire, mais la techno est un courant (pas que musical) qui n’a même pas 30 ans, et qui est connue de tous. Partant de l’Acid de Detroit tout en s’inspirant de la house de Chicago, il a conquis le monde. Vas-y, essaie de nous dire le contraire.
Le mec n’a pas arrêté de faire de la musique depuis 1991, sortant des EP, des longs-formats, enchainant les lives dans les plus grands lieux ou les plus petits. Il est extrêmement rare qu’un musicien aujourd’hui, avec les internets et les bouses qui sortent de jour en jour, en soit encore là aujourd’hui, depuis 1990. Encore plus un dj.
Depuis quelques mois, il semble se passer quelque chose. Son apparition au Rêverie Festival nous avait déjà mis la puce à l’oreille, puisque son collègue de bureau Loco Dice (co-gérant de Minus) était un ton au-dessus de lui, un ton au-dessus du roi. D’autre part, il joue dans ses lives un grand nombre de morceaux de jeunes artistes de son double label Plus 8 – Minus tels que Matador (en majeure partie), laissant de coté ses tracks noires et envoutantes de ses EP sortis dans les années 1990 (la très puissante I don’t know de 1996).
Dans la continuité de notre pensée, on tombe au hasard et à en retard sur une compilation orchestrée par Richie Hawtin datant du printemps, fraiche sortie de Minus en collaboration avec MixMag regroupant des tracks de jeunes djs prometteurs jouées par Richie en Live. Le nom est équivoque : Richie Hawtin presents New Horizons. Une façon de nous dire « Eh les gars, voilà la relève, le nouvel horizon, préparez-vous à ce que je me retire doucement ». À cela deux constats : d’une part l’album est une véritable arme de destruction massive, d’autre part nous sommes remplis d’un sentiment de grande frustration quant à l’idée d’un possible retrait de « dieu-sur-terre ».
Place à l’album. Les morceaux sont tout de même assez mélodieux quand on pense à l’hurluberlu qui les a sélectionnés. De plus, c’est pour la totalité des exclusivités piochées dans les différents opus mises à la portée de tous par Richie Hawtin et MixMag, et on ne va pas rechigner.
Cela faisait un mois qu’on cherchait du gros son bien sombre, une sorte de mélange entre la minimale et la deep house (pour parler étiquettes), et on n’a pas été déçus. Les tracks de Matador (Dikspring et Lamana) nous ont tout de suite enchanté (pas une surprise quand on se rappelle ses deux premiers EPs). Lamana porte encore la marque du dualisme noirceur profonde/finesse mélodique, et cela nous va à ravir. Il est fort cet irlandais bordel.
Matador – Lamana – M-Nus by Waga1
Lavitsh se démarque quelque peu avec des sonorités plus propres rappelant un son plus anglais mais encore un peu minimaliste. Quant à Suck My Soul de Justin James, on retrouve un son plus saccadé qui ferait des ravages à Montpellier et sa minimale poussant au vice (un peu comme la vieille bombe Where R U de Bastien Grine en 2006). Enfin la pépite I Give You de Brian Gros rappelle les heures sombres de la techno, envoutante et à la limite d’une descente aux enfers.
Brian Gros – I Give You (Minus12) by BrianGros
D’un point de vue général, on se trouve en face de 13 tracks d’une profondeur inouïe, mais avec une très forte cohérence. Oh, ce n’est pas une compil Tsugi hein ! Avant il fallait rechercher dans les vieux morceaux pour entendre ça (on pense notamment aux tracks de SRA, Joran Van Pol et Joop Junior). À la première écoute l’envoutement est total, et on se croirait emportés par la foule dans un hangar du Time Warp ou du Warehouse. (À noter que les deux festivals viennent de délivrer leur line-up, et ça fait mal). Enfin la patte de Richie Hawtin sur ces bombes est indéniable, tant par son travail en amont que par l’influence qu’il à encore sur la nouvelle école aujourd’hui.
Richie Hawtin et Minus nous délivrent donc là une pépite gratuite et violente, qui étrennera vos nuits encore un bon moment.
Allez, un peu de culture sur le saint patron des djs :