En 2008, Albert VRIJ, le professeur de psychologie à l’université de Porsmouth (UK), a mené une expérience avec son équipe, visant à étudier la corrélation entre les clignements de paupières (réflexe palpébral) et le mensonge. Pour cela, il a réuni 26 sujets répartis en 2 groupes de 13 personnes, un groupe « vérité » et un groupe « mensonge » :
- Les personnes du groupe « vérité » devaient passer dix minutes dans un bureau, sans rien faire de spécial. Avec la condition que ce qu’il faisait dans le bureau ne devait pas être caché par la suite. Ces personnes ont ensuite été interrogées sur leurs occupations pendant ces dix minutes. Elles ont été considérés comme des véridiques, n'ayant aucune raison de mentir face à un membre du personnel administratif.
- Les participants du groupe « mensonge » devaient s'introduire dans un bureau voisin du directeur de l'Université, pour y voler des sujets d'examen. Les personnes étaient ensuite interrogées par un membre du personnel administratif. Lors de la phase d’interrogation les personnes ne devaient pas révéler ce qu'ils avaient fait, c'est-à-dire ne pas avouer le vol des sujets d’examen.
Chaque sujet était donc interrogé par une personne du personnel administratif. Une caméra permettait ensuite de comptabiliser le nombre de clignements de paupières avant, pendant et après l'interrogatoire des sujets de chaque groupe.
Les résultats de cette expérience ont montré que les sujets des groupes « vérité » et « mensonge » clignaient des paupières en moyenne 12 fois par minutes avant l'interrogatoire. Pendant l'interrogatoire cette moyenne augmentait légèrement dans le groupe « vérité » (13 battements par minute) mais en revanche elle diminuait dans le groupe « mensonge » (11 battements par minute). Le plus intéressant est qu'après l’interrogation, les personnes du groupe « mensonge » clignaient en moyenne 22 fois par minutes alors que le groupe « vérité » restait dans sa moyenne. Les personnes du groupe mensonge « mensonge » clignaient alors deux fois plus des paupières, pas lorsqu’elles étaient en train de mentir, mais après avoir menti.
Ce phénomène s'explique par l'activité cognitive au cours du mensonge. En effet, mentir nécessite un effort mental et intellectuel important : pour inventer une histoire, contrôler nos incohérences de discours... Cet effort cognitif stoppe ou ralentit la fréquence des clignements de paupières lors du mensonge. En effet, dans cette expérience nous constatons une légère baisse des clignements. Cette contrainte n'étant plus nécessaire à l'issue du mensonge, le cerveau procède alors à une décharge cognitive qui se traduit par une forte augmentation de la fréquence des clignements des paupières.
La fréquence des battements de paupières est intimement liée à l'activité cognitive et émotionnelle du sujet. Les psychologues Ponder et Kennedy (1928) ont constaté que l'observation des clignements peut permettre d'identifier les conduites émotionnelles masquées. Selon ces mêmes auteurs une personne qui contrôle ses états émotionnels sur le plan vocal, facial ou gestuel laissera filtrer son état réel par la fréquence de clignement. Bien que n'étant pas une preuve formelle de mensonge, l'observation de la variation de fréquence de clignement des paupières avant, pendant et surtout après un échange s'avère être un indice corporel important à prendre en compte dans la recherche de la vérité.
Pour d’autres articles sur les indices de la détection du mensonge ou sur le regard : La détection du mensonge Le regard
Références :
- Leal S., & Vrij A. (2008). « Blinking during and after lying », Journal of Nonverbal Behavior.
- Ponder, & kennedy. (1928).