L'objectif de ce billet est double. Il s'agit d'une part de fixer une discipline rédactionnelle concernant la forme que devront prendre les prochains articles de ce blog puis de réfléchir sur deux approches des TICE, l'une que l'on pourrait qualifier d'analytique, qui serait celle dans laquelle les TICE étant donnés ont effectue leur dissection pour y trouver du sens et l'autre synthétique, dans laquelle il s'agirait de construire un sens à partir de morceaux épars et d'un raisonnement logique.
1. Etat des lieux
2245 notes dans ce blog. C'est trop. C'est beaucoup trop. Je sais. Mais à l'origine ce blog relevait plus du bloc-notes que du blog et puis je ne connaissais pas Delicious, Diigo, Evernote, alors j'épinglais, j'attachais, je partageais... manuellement avec bien sûr au milieu quelques réflexions personnelles, quelques réponses, des traductions d'articles scientifiques, des tentatives sur la forme et le fond, du partage de pratiques. Je recherchais des contenus originaux, qui peut-être n'intéressaient que moi mais c'était déjà ça. Je découvrais des articles et des pages web passionnantes sur Gödel, l'histoire des maths, les fractales, la philosophie. Ensuite je me suis tourné vers les actualités, les réflexions pédagogiques et même philosophiques (si on peut les qualifier de philosophiques). Ensuite est venu la découverte de l'écriture des maths sur un support numérique, l'insertion d'applets mathématiques. Puis est venu le temps d'une utilisation presque industrielle des TICE, une espèce de volonté de faire du "tout numérique". Le partage de pratiques a aussi été au centre de ce blog durant ces deux dernières années, délaissant certainement les maths, même si elles n'ont jamais été d'un niveau très élevé sur ce blog, mais telle a toujours été ma volonté.
Et un joursont apparus les réseaux sociaux qui gonflèrent et qui gonflèrent la quantité d'informations, le temps de lecture souvent fractionné entre les twits courts et ceux disposant d'un hyperlien pouvant cacher à lui seul un univers inconnu, un billet qui ne se lit pas seulement en passant, entre deux et qui demande réflexion, d'être relu et d'être muri. Facebook n'est pas le plus long à lire mais il faut quant même cliquer, faire défiler et répondre à quelques statuts. Spectateur c'est bien mais c'est incomplet alors il faut aussi être acteur et partager, diffuser, faire passer de l'information... Et produire du flux. Ou stock, oui mais quand? Avec quelle énergie? Et puis pour répéter ce que d'autres ont déjà dit? Mieux que moi? Et qui va lire? Des lecteurs déjà épuisé de tant en lire, de ne pas avoir le temps, d'avoir les yeux fatigués? Et qui recherchent plus de détente que de sérieux? Alors effectivement cela amène à réfléchir sur la lassitude rencontrée, sur la pertinence des publications, sur la réputation écornée à publier du rapide, de l'incomplet, du "en chemin", du "à réfléchir"... Alors je continue, patiemment mon chemin sur la forme et le fond numérique, à visage découvert, quite à égratigner ma e-réputation, qui j'en suis conscient n'est pas d'un diamètre tel que quelconque s'en souciera vraiment. Je prends donc des risques très mesurés... Au sens propre. Je vais poursuivre en adoptant une nouvelle forme pour construire mes billets.
2. A fond la forme
C'est bien d'imposer à mes élèves une charte pour publier un article numérique mais "Charité ordonnée commence par soi même" - je ne trouve plus le dicton mais ce n'est pas celui-ci. Je vais donc reprendre les contraintes que j'ai fixées aux autres et en ajouter d'autres pour moi. Le tout ne devra cependant pas être trop strict, car sinon, je me connais, je vais me lasser. Alors listons ensemble:
- - Pas de copier/coller sauvage, et nécessité de citer mes sources (ça c'est ce que j'ai toujours fait!).
- - Un bandeau de présentation du billet en gras (tiens j'y avais pensé pour les autres mais pas pour moi).
- - La présence, au moins un fois d'un rapport aux mathématiques par un nombre, un concept, leur histoire (le nom du blog oblige son rédacteur...).
- - La présence d'au moins deux des éléments suivants:
une image ou vidéo ou podcast ou/et une citation ou/et un hyperlien externe vers un blog ou/et d'un contenu artistique ou/et d'un twit ( simple? Je ne suis pas certain que cela le soit tant que ça pour chaque billet).
Je devrai donc normalement me plier à cet usage sur ce blog.
3. Analyse ou synthèse TICE?
Le blog de Bruno Devauchelle s'appelle Veille et Analyse TICE. Je l'ai parcouru en entier avec la requête "analyse" mais je n'y ai trouvé aucune présence de la démarche analytique. J'imagine ce qu'elle doit être. Une fois l'objet TICE identifié, globalement défini et circonscrit comme par exemple avec la définition tirée de Wikipédia,
"Les TICE regroupent un ensemble d’outils conçus et utilisés pour produire, traiter, entreposer, échanger, classer, retrouver et lire des documents numériques à des fins d'enseignement et d'apprentissage."
il est possible d'effectuer une "analyse".
Dans son Nouveau dictionnaire de pédagogie et d'instruction primaire, Ferdinand Buisson présente en 1911, la méthode analyique, certes liée à l'enseignement et donc à l'élève, ce qui n'est pas totalement notre propos ici , mais qui permet d'approcher l'idée:
L'une (je note: la méthode analytique) remonte pas à pas, comme l'esprit humain l'a dû faire, de ce qui se voit à ce qui ne se voit pas, du tout confus aux parties distinctes, des conséquences aux principes, des faits aux idées, des vérités particulières, les premières connues, aux vérités générales.
L'analyse serait donc cette méthode qui permet de rencontrer l'invisible à partir du visible, de concevoir le micro à partir du macro, de rentrer en profondeur dans l'obscurité alors révélée au grand jour.
Jean Lechat, dans Analyse et Synthèse - PUF -1962 - page 13 , écrit :
Tantôt l'analyse est l'opération soit de délier un ensemble ou une collection, soit d'explorer et d'étaler le contenu d'un concept, mais toujours en somme d'expliquer, c'est à dire de défaire les plis; tantôt, elle est l'effort d'expliquer, mais au sens de rendre raison. Dans un cas, elle n'invente rien, puisqu'elle se contente d'explorer un donné; dans l'autre, elle apparaît tout au contraire comme une méthode d'invention, puisque, s'appliquant à la solution d'un problème, elle doit la chercher en dehors des données, où elle ne se trouve évidemment pas, du moins immédiatement. D'où les déclarations contradictoires concernant l'analyse, tantôt regardée comme stérile, tantôt considérée comme féconde, selon que l'on fait allusion comme Kant, au caractère tautologique du jugement analytique, ou comme Descartes, à l'analyse des géomètres, ou à la découverte, par la méditation métaphysique, des fondements de la connaissance et de l'action.
J'aime beaucoup l'idée de "défaire les plis". Et pour nous divertir, nous pouvons, en intermède, nous tourner vers ce premier cours de logique Shadock qui présenterait plutôt une version kantienne de l'analyse!
Mais alors que serait la méthode dite "synthétique" faisant nécessairement le pendant à la méthode analytique? Revenons vers Ferdinand Buisson, qui pour le coup est beaucoup moins versé vers la synthèse, en éducation rappelons-le, qui n'est pas le sujet ici:
L'autre méthode, plus brève et plus impérieuse, énonce d'emblée et enseigne d'autorité une suite de propositions, classées non dans l'ordre où elles ont pu être découvertes, mais dans celui que prescrit l'enchaînement logique des idées.
Jean Lechat est plus explicite et distingue:
On rencontre la même opposition entre les deux sens du mot synthèse; mais la situation est renversée par rapport à celle des deux sens du mot analyse. Cette fois, c'est la synthèse entendue comme composition ou élargissement du savoir qui est inventive; et la synthèse comme, comme exposition d'une solution, ou déduction des conséquences à partir d'un principe, consiste au contraire, dans le simple étalement d'un savoir qu'on possède déjà, et qu'on accroît point. Il est remarquable à cet égard, qu'on s'exprime souvent dans les même termes, pour décrire la synthèse, méthode d'exposition, que pour parler de l'analyse, exploration d'une idée. Par exemple selon Descartes, la voie synthétique, qui va des principes au conséquences, emporte la conviction en faisant voir comment le conséquents sont contenus dans les antécédents. [...]. Kant devait plus tard mettre au point l'idée d'une nécessité synthétique, formée précisément sur le modèle des propositions mathématiques, qui sont à la fois synthétiques, c'est à dire constructives, et a priori, c'est à dires nécessaires ou apodictiques.
Personnellement je trouve qu'il est bien difficile et technique, de savoir si, pour ma part, je relève plutôt de l'analyse ou de la synthèse en utilisant des outils, en les mélant ensemble, en cherchant et découvrant leurs usages ou en en construisant de nouveaux, en cherchant, en disséquant, en innovant, en abandonnant. Alors peut-être que l'idée qui conviendrait le mieux dans l'ensemble des situations que je rencontre ou provoque, serait celle du bourgeonnement dont cette image est une bonne représentation.
Peut-être que les esprits analytiques ou synthétiques ne s'y retrouveront pas mais c'est sans doute le prix à payer pour que je puisse me déplacer dans l'univers complexe des TICE et puisse en tirer quelques enseignements et résultats concrets.