L’actualité de cet été 2012 a notamment été marquée par l’évacuation, par les forces de l’ordre, de plusieurs campements installés par des « Roms ». Le débat qui s’en est suivi a davantage porté sur la légitimité politique de ces opérations de police plutôt que sur leur légalité. Que dit le droit ? Il est utile de faire le point sur le dispositif en forme de questions/réponses sur l’accueil, non pas des « Roms » mais des « gens du voyage ».
Il est important de rappeler quelles sont les droits et obligations des communes en matière d’accueil des gens du voyage. D’une part pour éclairer un débat assez passionnel sur les conditions de vie des populations concernées par ce dispositif juridique. D’autre part, pour aider les élus à se saisir du dispositif juridique en vigueur. Il est en effet assez probable que le débat soit relancé sur l’effort de création des aires d’accueil pour tenter de sortir de l’éternel dilemme qui oppose « la solution de l’absence d’évacuation » aux « évacuations sans solutions ». Enfin, pour souligner que le dispositif juridique créé en 2000, appelle sans doute sa réforme, 12 ans après son entrée en vigueur.
Un dispositif juridique complexe
Intervenant régulièrement auprès de collectivités territoriales, j’ai pu constater que la problématique de l’accueil des gens du voyage dépasse largement le traditionnel clivage droite gauche et que les élus sont souvent l’objet de demandes et pressions diverses et contradictoires. Les développements qui suivent font état des grands principes du dispositif juridique qui est censé permettre aux élu(e)s de répondre à la question de l’accueil des gens du voyage. Malheureusement, ce dispositif, qui procède pour l’essentiel des dispositions de la loi du 5 juillet 2000, se caractérise par sa grande complexité.
Aux dispositions spécifiques à l’accueil des gens du voyage s’ajoutent d’autres règles relatives au respect de la propriété privée, à la conservation du domaine public, à l’installation de résidences mobiles sur des « terrains familiaux », à l’exploitation des terrains de campings ou à l’hébergement des travailleurs saisonniers. Par ailleurs, des normes précises encadrent l’équipement – eau, électricité, assainissement – desdites aires. Les élus et fonctionnaires territoriaux doivent donc, une fois de plus, naviguer dans une mosaïque de textes et de polices qui s’articulent parfois mal entre elles, pour définir avec précision les obligations des communes.
Enfin, comme le soulignent les rapports consacrés à l’application du 5 juillet 2000, dont celui du député Didier Quentin, la question des « gens du voyage » ne peut être traitée sous le seul angle du logement et des aires d’accueil. Le droit démontre ses limites lorsque la question posée est d’abord politique et culturelle
Quelle loi définit les conditions d’accueil des gens du voyage ?
Le dispositif juridique actuel relatif à l’accueil des « gens du voyage » procède pour l’essentiel des dispositions de la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage, votée alors que Lionel Jospin était Premier ministre, Jean-Claude Gayssot, ministre du logement et Louis Besson, secrétaire d’Etat au logement. Cette loi est parfois identifiée comme la "loi Besson".
La loi n°2000-614 du 5 juillet 2000 n’est pas la première à traiter de l’accueil des gens du voyage. Ainsi, la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 visant à la mise en œuvre du droit au logement crée, aux termes de son article 28, les schémas départementaux et impose à chaque commune de plus de 5 000 habitants la réservation de terrains affectés au passage et au séjour des gens du voyage. Toutefois, cette loi est restée assez largement inappliquée. Ce qui a justifié une nouvelle intervention du législateur.
A noter : plusieurs lois ont modifié la rédaction de certaines dispositions de la loi n°2000-614 du 5 juillet 2000. A titre d'exemple, l’article 1er de cette loi du 5 juillet 2000 a été modifié par l’article 54 loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure. Les articles 2, 3 et 4 de cette loi ont été modifiés par la loi n°2007-1822 du 24 décembre 2007 de finances pour 2008.
A la suite de cette loi du 5 juillet 2000, de nombreux textes réglementaires sont venus en préciser le sens et la portée.
- Décret n° 2007-1018 du 14 juin 2007 modifiant la partie réglementaire du code de justice administrative (JORF n°138 du 16 juin 2007 page 10422).
- Décret n° 2007-690 du 3 mai 2007 relatif à l'agrément prévu à l'article 9 de la loi du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage
- Décret n° 2004-835 du 19 août 2004 relatif aux servitudes d'utilité publique prévues par l'article 12 bis de la loi du 15 juin 1906 sur les distributions d'énergie
- Décret n° 2003-1120 du 24 novembre 2003 relatif à la Commission nationale consultative des gens du voyage
- Décret no 2001-569 du 29 juin 2001 relatif aux normes techniques applicables aux aires d'accueil des gens du voyage
- Décret no 2001-568 du 29 juin 2001 relatif à l'aide aux collectivités et organismes gérant des aires d'accueil des gens du voyage et modifiant le code de la sécurité sociale (deuxième partie : Décrets en Conseil d'Etat) et le code général des collectivités territoriales (partie Réglementaire)
- Arrêté du 29 juin 2001 relatif au montant forfaitaire applicable pour l'aide aux collectivités et organismes gérant des aires d'accueil des gens du voyage
- Décret no 2001-541 du 25 juin 2001 relatif au financement des aires d'accueil destinées aux gens du voyage
- Décret no 2001-540 du 25 juin 2001 relatif à la composition et au fonctionnement de la commission départementale consultative des gens du voyage
Plusieurs circulaires ont également été rédigées :
- Circulaire du 28 août 2010 relative à la révision des schémas départementaux d'accueil des gens du voyage.
- Circulaire du 3 août 2006 relative à la mise en œuvre des prescriptions du schéma départemental d'accueil des gens du voyage
- Circulaire du 17 décembre 2003 relative aux terrains familiaux permettant l’installation des caravanes constituant l’habitat permanent de leurs utilisateurs
« Roms » ou « gens du voyage » ?
La loi du 5 juillet 2000 ne fait pas référence aux Roms en particulier mais aux « gens du voyage » de manière plus générale. La lecture des travaux parlementaires démontre qu’il a été assez difficile de comprendre dans une même expression, dans une même catégorie du droit, la situation de populations de provenances et de besoins fort divers. L’expression « Roms » ne permettant bien sûr pas de faire référence à toutes ces personnes, c’est donc l’expression « gens du voyage » qui a été retenue dès lors que le point commun entre ces différentes personnes apparaît être celui du « voyage » par opposition à une habitude de vie uniquement sédentaire. Il y aurait sans doute bien à redire sur ce critère de définition mais c’est celui qui est pour l’heure inscrit dans la loi. C’est ainsi que l’article 1er de la loi du 5 juillet 2000 dispose :
« I. - Les communes participent à l'accueil des personnes dites gens du voyage et dont l'habitat traditionnel est constitué de résidences mobiles."
« voyage », « résidences mobiles » : les gens du voyage sont donc définis en fonction de leur logement. Au demeurant, le rapprochement entre les notions de « Roms » et de « gens du voyage » comporte une limite dès lors que tous les « Roms » ne sont pas nécessairement nomades et, au surplus que l’absence de sédentarité peut être plus ou moins volontaire.
Quelles sont les communes qui doivent réaliser une aire d’accueil des gens du voyage ?
Les communes mentionnées par le « schéma départemental des gens du gens du voyage » doivent obligatoirement procéder à la localisation et à la réalisation d’une aire d’accueil des gens du voyage. Dès lors : quelles sont les communes qui doivent figurer au schéma départemental des gens du voyage ?
L’article 1er de la loi du 5 juillet 2000 précise ici :
« II. - Dans chaque département, au vu d'une évaluation préalable des besoins et de l'offre existante, notamment de la fréquence et de la durée des séjours des gens du voyage, des possibilités de scolarisation des enfants, d'accès aux soins et d'exercice des activités économiques, un schéma départemental prévoit les secteurs géographiques d'implantation des aires permanentes d'accueil et les communes où celles-ci doivent être réalisées.
Les communes de plus de 5 000 habitants figurent obligatoirement au schéma départemental. Il précise la destination des aires permanentes d'accueil et leur capacité. Il définit la nature des actions à caractère social destinées aux gens du voyage qui les fréquentent ».
Ainsi, deux catégories de communes doivent nécessairement réaliser une aire d’accueil des gens du voyage.
Il s’agit, en premier lieu, des communes désignées au vu d’une « évaluation préalable » « des besoins et de l'offre existante, notamment de la fréquence et de la durée des séjours des gens du voyage, des possibilités de scolarisation des enfants, d'accès aux soins et d'exercice des activités économiques ». Inutile de préciser que les conditions de réalisation de cette « évaluation préalable » sont sensibles, peu de communes étant désireuses de se voir retenues au terme de cette opération.
Par ailleurs, certaines communes qui contribuent déjà à l’hébergement, temporaire ou non, de populations non sédentaires, souhaitent généralement qu’il soit tenu compte de l’existence sur leur territoire d’aires de campings ou de parcs résidentiels mobiles pour la détermination au schéma départemental des aires d’accueil des gens du voyage, telles que visées par la loi du 5 juillet 2000.
En second lieu, les communes de plus de 5 000 habitants « figurent obligatoirement au schéma départemental ». Toutefois, celles-ci pourront, dans certains cas, faire état de contraintes émanant d’autres législations, et notamment du code de l’environnement, pour limiter leur obligation de création d’une aire d’accueil des gens du voyage. Car, même sur le territoire d’une commune désignée par le schéma, une telle aire d’accueil ne peut bien entendu être réalisée n’importe où, et ce, dans l’intérêt tout d’abord des personnes qui y seront accueillies.
A noter, la Cour d’appel de Paris a jugé que la loi du 5 juillet 2000 « ne s'applique qu'aux communes de plus de 5000 habitants » (cf. Cour d'appel de Paris, 30 septembre 2003, n°2003/03017)
Quelles sont les différentes catégories d’aires d’accueil des gens du voyage ?
Il existe des aires « permanentes » et des aires « temporaires » pour l’accueil des gens du voyage.
Les aires d’accueil permanentes sont visées au II précité de l’article 1er de la loi du 5 juillet 2000. Les aires d’accueil temporaires sont également visées au II de l’article 1er de cette loi :
« Le schéma départemental détermine les emplacements susceptibles d'être occupés temporairement à l'occasion de rassemblements traditionnels ou occasionnels et définit les conditions dans lesquelles l'Etat intervient pour assurer le bon déroulement de ces rassemblements ».
Ainsi, des aires permettant des rassemblements traditionnels ou occasionnels doivent être mises en place pour permettre l’accueil temporaire des populations concernées. Elles sont parfois qualifiées d’aires de « grand passage ».
A quoi sert le schéma départemental d’accueil des gens du voyage ?
Comme cela vient d’être précisé, la localisation dans chaque commune des aires d’accueil des gens du voyage est décidée, non pas commune par commune mais à l’échelle du département. C’est ainsi que, dans chaque département, un schéma dont l’élaboration est pilotée par le Préfet de département doit désigner les communes qui doivent procéder à la réalisation de ces aires.
Plusieurs éléments sont à retenir des dispositions de l’article 1er de la loi du 5 juillet 2000.
En premier lieu, ce schéma a pour objet précis d’indiquer les lieux permettant la réalisation d’aire d’accueil « permanentes » mais aussi celles permettant des rassemblements « traditionnels ou occasionnels ».
En second lieu, le schéma a aussi pour objet de faire l’inventaire des espaces qui ont d’ores et déjà pour fonction d’accueillir des personnes de manière temporaire. Il en va ainsi des campings (article L.443-3 du code de l’urbanisme) et des terrains d’accueil des travailleurs saisonniers.
En troisième lieu, le schéma ne peut désigner une aire d’accueil des gens du voyage sans tenir compte de l’existence de « sites inscrits ou classés ».
Où peuvent être créées les aires d’accueil des gens du voyage sur le territoire des communes visées par le schéma départemental ?
La localisation de terrains permettant la création d’une aire d’accueil est chose difficile. Outre l’opposition des riverains du terrain pressenti, les auteurs du schéma départemental devront tenir compte de toutes les contraintes fixées par de nombreuses législations et réglementations.
Comme cela vient d’être précisé, la loi du 5 juillet 2000 interdit par exemple la création d’aires d’accueil dans des sites inscrits ou classés.
Autre exemple, celui donné par le Décret n° 2004-835 du 19 août 2004 relatif aux servitudes d'utilité publique prévues par l'article 12 bis de la loi du 15 juin 1906 sur les distributions d'énergie. Ledit décret interdit en effet la création, de part et d’autre « de part et d'autre de toute ligne électrique aérienne de tension supérieure ou égale à 130 kilovolts, existante ou à créer ».
« - de bâtiments à usage d'habitation ou d'aires d'accueil des gens du voyage"
Enfin, l’aire d’accueil ne peut être créée que dans un endroit qui permette la réalisation de toutes les prescriptions du Décret n°2001-569 du 29 juin 2001 relatif aux normes techniques applicables aux aires d'accueil des gens du voyage. A titre d’exemple, l’article 3 de ce décret dispose :
« L'aire d'accueil comporte au minimum un bloc sanitaire, intégrant au moins une douche et deux WC pour cinq places de caravane, au sens des dispositions de l'article précédent. Chaque place de caravane est dotée d'un accès aisé aux équipements sanitaires ainsi qu'à l'alimentation en eau potable et à l'électricité. »
La réalisation de ces équipements suppose donc que l’aire d’accueil puisse être raccordée aux réseaux de distribution (eau, électricité) et d’assainissement.
Une autorisation d’urbanisme est-elle requise pour la création d’une aire d’accueil des gens du voyage ?
Aux termes de l’article R.421-23 du code de l’environnement une déclaration préalable est requise, soit pour l’installation d’une résidence mobile pour plus de trois mois, soit pour la création d’une aire d’accueil des gens du voyage :
« Doivent être précédés d'une déclaration préalable les travaux, installations et aménagements suivants :
(…)
j) L'installation d'une résidence mobile visée par l'article 1er de la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage, constituant l'habitat permanent des gens du voyage, lorsque cette installation dure plus de trois mois consécutifs ;
k) Les aires d'accueil des gens du voyage. »
Toutefois, la création de l’aire d’accueil va sans doute appeler la création de locaux (sanitaires, abri gardien..) qui vont requérir la délivrance d’une permis de construire pour la réalisation de l’ensemble.
Par ailleurs, du point de vue du code de l’urbanisme, il convient de distinguer les aires permanentes des aires temporaires lesquelles supposent la délivrance d’un agrément préfectoral tel que défini à l’article 9 de la loi n°2000-614 du 5 juillet 2000. Le législateur a en effet introduit la possibilité en 2003 de créer des aires pour une durée de 6 mois, sous réserve de leur agrément par le Préfet. Les dispositions réglementaires relatives à ce dispositif d’agrément ont été fixées par le décret n°2007-690 du 3 mai 2007 relatif à l'agrément prévu à l'article 9 de la loi du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage (JORF n°105 du 5 mai 2007 page 7957)
Lorsqu’un permis de construire est exigé, ce dernier doit être conforme aux prescriptions d’un plan de prévention des risques d’inondation (cf. Conseil d'État, 4 mai 2011, Commun de F., n°321357).
Qui assure la gestion des aires d’accueil des gens du voyage ?
L’article 2 de la loi n°2000-614 du 5 juillet 2000 dispose :
« II. - Les communes et les établissements publics de coopération intercommunale intéressés assurent la gestion de ces aires ou la confient par convention à une personne publique ou privée.»
Une personne publique ou privée peut assurer, par convention, la gestion des aires d’accueil des gens du voyage, pour le compte des communes ou EPCI concernés.
A noter : aux termes de l’article 3 de la loi n°2000-614 du 5 juillet 2000, l’Etat peut être amené à assurer la création et la gestion d’une aire d’accueil en cas de défaillance de la commune ou de l’EPCI en charge de cette obligation.
Que se passe-t-il si une commune ou un EPCI refuse de créer et de gérer une aire d’accueil des gens du voyage ?
Conformément à un principe traditionnel, en cas de carence de l’autorité décentralisée, c’est l’Etat qui assure à sa place l’obligation dont elle avait la charge. L’article 3 de la loi n°2000-614 du 5 juillet 2000 dispose :
« I. - Si, à l'expiration des délais prévus à l'article 2 et après mise en demeure par le préfet restée sans effet dans les trois mois suivants, une commune ou un établissement public de coopération intercommunale n'a pas rempli les obligations mises à sa charge par le schéma départemental, l'Etat peut acquérir les terrains nécessaires, réaliser les travaux d'aménagement et gérer les aires d'accueil au nom et pour le compte de la commune ou de l'établissement public défaillant.
Les dépenses d'acquisition, d'aménagement et de fonctionnement de ces aires constituent des dépenses obligatoires pour les communes ou les établissements publics qui, selon le schéma départemental, doivent en assumer les charges. Les communes ou les établissements publics deviennent de plein droit propriétaires des aires ainsi aménagées, à dater de l'achèvement de ces aménagements. »
Qui finance la création des aires d’accueil des gens du voyage ?
Il n’est pas de propos de lister ici tous les dispositifs de financement de la création et de la gestion des aires d’accueil des gens du voyage. Notons cependant que l’Etat s’est engagé à contribuer fortement à ce financement, dans un délai de deux à quatre ans suivant la publication du schéma départemental d’accueil des gens du voyage. L’article 4 de la loi du 5 juillet 2000 précise :
« L'Etat prend en charge, dans la limite d'un plafond fixé par décret, les investissements nécessaires à l'aménagement et à la réhabilitation des aires prévues au premier alinéa du II de l'article 1er, dans la proportion de 70 % des dépenses engagées dans les délais fixés aux I et III de l'article 2. Cette proportion est de 50 % pour les dépenses engagées dans le délai prévu au IV du même article 2.
Pour les aires de grand passage destinées à répondre aux besoins de déplacement des gens du voyage en grands groupes à l'occasion des rassemblements traditionnels ou occasionnels, avant et après ces rassemblements, prévues au troisième alinéa du II de l'article 1er, le représentant de l'Etat dans le département peut, après avis de la commission consultative départementale, faire application d'un taux maximal de subvention de 100 % du montant des dépenses engagées dans le délai fixé à l'article 2, dans la limite d'un plafond fixé par décret. L'Etat peut assurer la maîtrise d'ouvrage de ces aires. Dans ce cas, le montant des dépenses qu'il engage est soumis au plafond précité.
La région, le département et les caisses d'allocations familiales peuvent accorder des subventions complémentaires pour la réalisation des aires d'accueil visées au présent article. »
Quel est le pouvoir de police du Maire ?
De 2000 à 2007, la saisine du juge civil était un préalable indispensable à l’évacuation forcée des gens du voyage. Toutefois, les articles 27 et 28 de la loi du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance ont modifié les articles 9 et 9-1 de la loi du 5 juillet 2000 de manière à permettre cette évacuation forcée sans recours au Juge judiciaire. En contrepartie, les destinataires d’une mise en demeure de quitter les lieux disposent d’une voie de recours spécifique devant le juge administratif.
Aux termes du dispositif actuel, à la condition que sa commune remplisse les obligations qui lui incombent en matière de création d’aires d’accueils des gens du voyage, telles que fixées par la loi n°2000-614 du 5 juillet 2000, le maire peut prendre un arrêté portant interdiction de tout stationnement de résidences mobiles sur le territoire communal, en dehors des aires prévues à cet effet.
L’article 9 de la loi du 5 juillet 2000 dispose en effet :
« I.- Dès lors qu'une commune remplit les obligations qui lui incombent en application de l'article 2, son maire ou, à Paris, le préfet de police peut, par arrêté, interdire en dehors des aires d'accueil aménagées le stationnement sur le territoire de la commune des résidences mobiles mentionnées à l'article 1er. Ces dispositions sont également applicables aux communes non inscrites au schéma départemental mais dotées d'une aire d'accueil, ainsi qu'à celles qui décident, sans y être tenues, de contribuer au financement d'une telle aire ou qui appartiennent à un groupement de communes qui s'est doté de compétences pour la mise en œuvre du schéma départemental ».
Il convient de souligner que ce pouvoir de police du maire est la contrepartie du respect par la commune de ses obligations d’accueil des gens du voyage telles que fixées par la loi du 5 juillet 2000.
Le législateur a également introduit un article 9-1 au sein de la loi du 5 juillet 2000 pour étendre la police de l’évacuation des gens du voyage aux communes non inscrites au schéma départemental :
« Dans les communes non inscrites au schéma départemental et non mentionnées à l'article 9, le préfet peut mettre en œuvre la procédure de mise en demeure et d'évacuation prévue au II du même article, à la demande du maire, du propriétaire ou du titulaire du droit d'usage du terrain, en vue de mettre fin au stationnement non autorisé de résidences mobiles de nature à porter atteinte à la salubrité, la sécurité ou la tranquillité publiques. »
Que se passe-t-il en cas de violation de l’arrêté d’interdiction de stationnement des gens du voyage ?
En cas de violation de l’arrêté de police prescrivant l’interdiction de stationnement des gens du voyage en dehors des aires prévues à cet effet, le Maire, le propriétaire du terrain d’accueil ou le titulaire du droit d’usage de l’aire peut mettre en demeure les occupants de quitter les lieux. L’article 9 précité précise en effet :
« II.- En cas de stationnement effectué en violation de l'arrêté prévu au I, le maire, le propriétaire ou le titulaire du droit d'usage du terrain occupé peut demander au préfet de mettre en demeure les occupants de quitter les lieux.
La mise en demeure ne peut intervenir que si le stationnement est de nature à porter atteinte à la salubrité, la sécurité ou la tranquillité publiques ».
Cette mise en demeure ne peut être assortie d’un délai d’exécution de moins de 24 heures et peut être suivie de l’intervention du Préfet pour procéder à l’évacuation forcée des occupants irréguliers. L’article 9 susvisé prévoit également le cas où le propriétaire du terrain ou le titulaire du droit d’usage s’oppose à cette évacuation forcée :
« La mise en demeure est assortie d'un délai d'exécution qui ne peut être inférieur à vingt-quatre heures. Elle est notifiée aux occupants et publiée sous forme d'affichage en mairie et sur les lieux. Le cas échéant, elle est notifiée au propriétaire ou titulaire du droit d'usage du terrain.
Lorsque la mise en demeure de quitter les lieux n'a pas été suivie d'effets dans le délai fixé et n'a pas fait l'objet d'un recours dans les conditions fixées au II bis, le préfet peut procéder à l'évacuation forcée des résidences mobiles, sauf opposition du propriétaire ou du titulaire du droit d'usage du terrain dans le délai fixé pour l'exécution de la mise en demeure.
Lorsque le propriétaire ou le titulaire du droit d'usage du terrain fait obstacle à l'exécution de la mise en demeure, le préfet peut lui demander de prendre toutes les mesures nécessaires pour faire cesser l'atteinte à la salubrité, à la sécurité ou la tranquillité publiques dans un délai qu'il fixe.
Le fait de ne pas se conformer à l'arrêté pris en application de l'alinéa précédent est puni de 3 750 Euros d'amende. »
La Cour d’appel de Paris a rappelé, par arrêté du 30 septembre 2003 que « l'inobservation par une commune des dispositions de la loi du 5 juillet 2000, relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage alléguée par le prévenu, ne justifie aucunement la construction de bâtiments réalisée sans autorisation sur une zone déclarée non constructible par le plan d'occupation des sols, étant observé au surplus que la loi invoquée ne s'applique qu'aux communes de plus de 5000 habitants, ce qui n'est pas le cas de la commune incriminée en l'espèce qui ne comporte que 1544 habitants » (cf. Cour d'appel de Paris, 30 septembre 2003, n°2003/03017)
De quel droit de recours disposent les destinataires d’une décision administrative de quitter les lieux ?
L’article 9 de la loi du 5 juillet 2000 introduit également une nouvelle catégorie de recours devant le tribunal administratif. Le destinataire de la mise en demeure peut former un recours suspensif de son exécution, dans le délai, parfois fort court, à l’intérieur duquel il est censé quitter les lieux. Le juge administratif saisi doit alors se prononcer sur la demande qui lui est adressée dans un délai de 72 heures :
« II bis.- Les personnes destinataires de la décision de mise en demeure prévue au II, ainsi que le propriétaire ou le titulaire du droit d'usage du terrain peuvent, dans le délai fixé par celle-ci, demander son annulation au tribunal administratif. Le recours suspend l'exécution de la décision du préfet à leur égard. Le président du tribunal ou son délégué statue dans un délai de soixante-douze heures à compter de sa saisine. »
A noter : les dispositions réglementaires relatives à cette nouvelle procédure juridictionnelle ont été introduites au sein du code de justice administrative par le Décret n° 2007-1018 du 14 juin 2007 modifiant la partie réglementaire du code de justice administrative (JORF n°138 du 16 juin 2007 page 10422).
Dans quel cas, l’évacuation forcée suppose-t-elle la saisine du Juge civil ?
La saisine du Juge civil est requise ou possible dans plusieurs cas et notamment :
- lorsque le propriétaire du terrain occupé souhaite demander directement au Juge civil que (cf. pour un ex récent : Cour d'appel de Paris, 4 janvier 2011, n°10/10375)
- lorsqu’une commune demande l’évacuation d’occupants sans titre de son domaine public (cf. Cour d'appel de Toulouse, 26 juillet 2001, n°2001/01246).
- lorsqu’un département demande l’évacuation des occupants du domaine public départemental (cf. Cour d'appel de Toulouse, 10 décembre 2001, n°2001/04471)
- lorsqu’une commune souhaite protéger son domaine public routier sur le fondement des dispositions de l'article L 116-1 du code de la voirie routière (cf. Cour d'appel de Versailles, 21 décembre 2010, n°10/08688)
- lorsque le propriétaire ou le titulaire d'un droit réel d'usage sur un terrain privé affecté à une activité à caractère économique entend demander cette expulsion sur le fondement de l’arrêté de police pris en application de l’article 9 de la loi du 5 juillet 2000.
Dans cette dernière hypothèse, depuis l’entrée en vigueur de la loi du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance, le recours au Juge judiciaire n’est plus un préalable requis pour l’évacuation forcée de gens du voyage par l’autorité en charge du pouvoir de police. Toutefois, le recours au Juge judiciaire est resté requis pour l’évacuation des terrains privés affectés à une activité à caractère économique
L’article 9 de la loi n°2000-614 du 5 juillet 2000 précise en effet :
« IV.- En cas d'occupation, en violation de l'arrêté prévu au I, d'un terrain privé affecté à une activité à caractère économique, et dès lors que cette occupation est de nature à entraver ladite activité, le propriétaire ou le titulaire d'un droit réel d'usage sur le terrain peut saisir le président du tribunal de grande instance aux fins de faire ordonner l'évacuation forcée des résidences mobiles. Dans ce cas, le juge statue en la forme des référés. Sa décision est exécutoire à titre provisoire. En cas de nécessité, il peut ordonner que l'exécution aura lieu au seul vu de la minute. Si le cas requiert célérité, il fait application des dispositions du second alinéa de l'article 485 du code de procédure civile »
Sur ce point, la lecture du rapport parlementaire du député Didier Quentin est éclairante : Ainsi, lorsque l’occupation d’un terrain affecté à une activité économique est de nature à porter atteinte à la salubrité, à la sécurité ou à la tranquillité publiques, la procédure d’évacuation administrative créée par la loi du 5 mars 2007 s’applique de nouveau. Le rapport précise :
« Le IV de l’article 9 de la loi du 5 juillet 2000 n’a pas été modifié par la loi du 5 mars 2007. Il concerne le cas particulier des terrains privés affectés à une activité à caractère économique, lorsqu’une occupation illicite entrave cette activité sans porter atteinte à la salubrité, à la sécurité ou à la tranquillité publiques.
Dans cette situation, le propriétaire ou le titulaire du droit d’usage du terrain peut saisir en référé le président du tribunal de grande instance, afin d’obtenir l’évacuation forcée des résidences mobiles. Le maintien de la compétence judiciaire est justifié, dans la mesure où l’entrave à l’activité économique résultant de l’occupation illicite constitue un contentieux purement civil, sans incidence directe sur l’ordre public.
Toutefois, la mission d’information estime que si l’occupation d’un terrain affecté à une activité économique est de nature à troubler la salubrité, la sécurité ou la tranquillité publiques, les dispositions sur l’évacuation forcée par la voie administrative sont bien évidemment applicables. Le fait que cette occupation soit également de nature à entraver l’activité économique serait d’ailleurs sans conséquence sur la possibilité de recourir à une mise en demeure préfectorale. Pourtant, dans son rapport au Premier ministre, le sénateur Pierre Hérisson estime que « la circulaire de la ministre en date du 10 juillet 2007 semble suggérer que le caractère économique de l’activité du terrain exclut le dispositif de droit commun » et souhaite une modification législative sur ce point. La mission d’information n’a donc pas la même lecture de la circulaire et du IV de l’article 9 de la loi du 5 juillet 2000 »
La mesure d’expulsion est-elle conditionnée à une mesure de relogement ?
La Cour d’appel de Toulouse a rendu, le 10 mai 2001 un arrêt particulièrement intéressant aux termes duquel, le Juge, ne peut conditionner l’expulsion des occupants du domaine public départemental à une mesure de relogement prise par le département. Toutefois, de manière à articuler le droit au logement avec le dispositif juridique relatif à l’accueil des gens du voyage, la Cour d’appel de Toulouse fixe le délai d’expulsion de manière à permettre aux personnes évacuées de saisir les autorités compétentes pour trouver une solution. (cf. Cour d'appel de Toulouse, 10 décembre 2001, n°2001/04471).
Les motifs de cet arrêt méritent d’être reproduits ci-après :
« Le droit au logement est un droit fondamental reconnu par la Constitution et organisé par la loi. Ce droit s'exerce, pour ce qui concerne les gens du voyage, dans des conditions particulières que définit la loi du 5 juillet 2000. Celle-ci prévoit les obligations des communes qui s'inscrivent dans le cadre d'un schéma départemental.
Il appartient, le cas échéant, aux personnes concernées d'agir afin de faire appliquer ces dispositions législatives. Cependant l'occupation d'un espace public non prévu pour recevoir des habitations mobiles ne peut se poursuivre dès lors qu'il s'exerce dans des conditions d'insécurité et d'insalubrité telles que cette occupation constitue un trouble à l'ordre public.
Or en l'espèce il n'est pas discuté que l'emplacement en cause n'est en rien aménagé pour recevoir des habitations, qu'il ne dispose d'aucun équipement si ce n'est un unique point d'eau. Dès lors cette occupation se poursuit dans des conditions d'hygiène que le département comme les personnes concernées s'accordent à tenir pour déplorables.
Par ailleurs cette occupation constitue une atteinte au droit de propriété du département, les défendeurs ne pouvant se prévaloir d'aucun titre d'occupation et le droit au logement invoqué ne pouvant s'exercer que dans le cadre légal qui le réglemente.
L'occupation par les consorts X... d'un terrain dépendant du domaine public départemental constitue donc un trouble manifestement illicite qu'il convient de faire cesser.
Il y a lieu en conséquence de confirmer l'ordonnance déférée en ce qu'elle ordonne l'expulsion.
Les obligations définies par la loi du 5 juillet 2000 s'imposent aux communes et subsidiairement l'Etat. Ce texte ne prévoit pas d'obligations à la charge du département. Dès lors il est impossible d'imposer au département A une obligation que la loi ne prévoit pas, par le biais d'une condition mise à l'expulsion.
Il convient donc de réformer la décision déférée en ce qu'elle conditionne la mesure d'expulsion à la proposition d'une solution de relogement.
Toutefois il y a lieu d'assortir cette mesure d'un délai permettant aux consorts X... d'agir auprès des autorités compétentes pour trouver une solution. »
Toutefois, la Cour de cassation, dans un arrêt récent en date du 2 février 2012 a jugé que la procédure de référé définie à l’article 809 du code de procédure civile ne peut être empruntée par le propriétaire d’un terrain pour demander l’expulsion de personnes qui sont dans l’attente d’une solution de relogement :
« ALORS QUE le droit au logement étant un droit fondamental à valeur constitutionnelle, le fait pour un occupant sans droit ni titre de se maintenir temporairement dans son logement dans l'attente d'une solution de relogement ne constitue pas un trouble manifestement illicite ; qu'en décidant du contraire pour ordonner l'expulsion des consorts X..., Z... et Y...des parcelles appartenant à la société d'économie mixte ESSONNE AMÉNAGEMENT qu'elle avait acquis en 2008 en parfaite connaissance de cette occupation, la Cour d'appel a violé l'article 809 du Code de procédure civile, ensemble l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde et 544 du Code civil ». (cf. Cour de cassation, 2 février 2012, n°11-14729).
Peut-on résider à titre permanent sur une aire d’accueil des gens du voyage ?
Non. Ainsi que l’a rappelé le Conseil d’Etat (cf Conseil d'État, 10 octobre 2007, Communauté urbaine de L., n° 305129) :
« (…) que le fonctionnement normal d'une telle aire, qui a pour finalité un accueil provisoire et non permanent des gens du voyage, requiert que les personnes n'y résident plus après l'expiration du délai fixé par le contrat signé à leur arrivée ; que l'expulsion demandée vise à assurer cet objectif d'égal accès à l'aire d'accueil (…) »
Une commune peut-elle mettre en place un dispositif pour empêcher l’accès à un terrain ?
A la mise en œuvre de procédures juridiques parfois complexes, certaines communes peuvent parfois préférer des solutions « physiques » plus expéditives mais espérées plus efficaces. C’est ainsi qu’une commune du Val de Marne a tenté d’interdire tout accès à un terrain appartenant au conseil général du val de Marne en plaçant des obstacles à son entrée et en débranchant les réseaux de distribution.
Saisie, la Cour de cassation a rendu un arrêt remarqué (cf. Cour de cassation, 28 novembre 2006, n°04-19134) aux termes duquel que le « dispositif filtrant » mis en place était constitutif d’une voie de fait.
En premier lieu, ce « dispositif filtrant » ne peut pas porter atteinte au droit de propriété du propriétaire du terrain concerné, en l’espèce le conseil général du Val de Marne :
« Mais attendu que le libre accès à sa propriété constitue un accessoire du droit de propriété, droit fondamental à valeur constitutionnelle ; qu'ayant relevé, par motifs propres et adoptés, l'impossibilité pour le conseil général, ou pour toute personne par lui autorisée, de pénétrer avec un véhicule à quatre roues sur son terrain , en raison du dispositif filtrant installé par la commune pour en interdire l'accès, la cour d'appel, qui a caractérisé la restriction apportée au droit de propriété du département, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ; »
En second lieu, la Cour de cassation a jugé que la juridiction civile était compétente pour connaître de cette « voie de fait » insusceptible de se rattacher à l’exercice d’un pouvoir de police administrative :
« Mais attendu que la cour d'appel qui a, par motifs propres et adoptés, relevé que loin de se borner à empêcher la seule installation de nouveaux occupants, les obstacles disposés par la commune devant l'entrée du terrain du Conseil général ont interdit au propriétaire et aux personnes qu'il avait autorisées, de pénétrer en véhicule dans sa propriété et d'y installer des sanitaires mobiles et des conteneurs d'ordures ménagères, a jugé à bon droit que les agissements de la commune étaient insusceptibles de se rattacher aux pouvoirs de police générale ou spéciale dévolus à la commune, de sorte qu'ils étaient constitutifs d'une voie de fait qu'il appartenait au juge judiciaire de faire cesser ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches »
Quel est le bilan de l’application de la loi n°2000-614 du 5 juillet 2000 ?
De nombreux rapports ont été consacrés à la mise en œuvre de la loi du 5 juillet 2000 et au bilan de la réalisation des aires d’accueil.
Pour la période récente, on citera notamment le rapport n° 0007449-01, de M. Patrick Laporte pour le Conseil général de l’environnement et du développement durable, publié en octobre 2010 et le rapport parlementaire de la mission d’information sur le bilan et l’adaptation de la législation relative à l’accueil et l’habitat des gens du voyage, présenté le 9 mars 2011 par le député Didier Quentin,
S’agissant du bilan « quantitatif » de la mise en œuvre de la loi du 5 juillet 2000, le rapport du député Didier Quentin précise :
« ● S’agissant des places dans les aires de stationnement, la réalisation des obligations des communes fixées par les schémas départementaux devrait se traduire par la réalisation de 41 589 places sur l’ensemble du territoire métropolitain.
Bien qu’il soit difficile d’évaluer les besoins actuels, alors que la révision des schémas départementaux ne fait que commencer, le constat général qui ressort des auditions est que cet objectif en nombre de places serait suffisant pour répondre aux besoins d’itinérance des gens du voyage.
Cependant, les associations représentant les gens du voyage ont nuancé sérieusement ce constat en rappelant que cet objectif était, en l’état, loin d’être atteint et que, dans les faits, les gens du voyage continuaient de rencontrer des difficultés à pratiquer un mode de vie itinérant.
En effet, à la fin de l’année 2009, seules 19 936 places aménagées avaient été mises en service, soit 48 % des prescriptions des schémas départementaux. Cependant, à la même date, ce sont 27 847 places en aire d’accueil qui avaient fait l’objet d’une décision de subvention de l’État, soit 67 % du total des places inscrites aux schémas départementaux.
Les représentants de l’administration sont conscients de cette réalisation partielle des objectifs. M. Christophe Mirmand, directeur de la modernisation et de l’administration territoriale au ministère de l’Intérieur, a ainsi reconnu qu’il y avait un « écart conséquent » entre objectifs et réalisations attendues ; d’autant qu’il considère que ce taux de 67 % de réalisation ne pourra que peu progresser si l’État ne participe pas au financement des places prescrites dans les schémas, mais non encore réalisées. Depuis le 1er janvier 2009, l’État ne subventionne plus la réalisation des aires de stationnement par les communes n’ayant pas manifesté à cette date leur volonté de se conformer à leurs obligations.
Au 1er janvier 2009, 358 communes et 175 EPCI étaient considérés comme défaillants au regard de leurs obligations en matière d’accueil et de stationnement des gens du voyage (…) ».
Conclusion
Le dispositif juridique actuel, lequel encadre l’accueil des gens du voyage sur des aires permanentes ou temporaires, procède pour l’essentiel d’une loi du 5 juillet 2000. 12 années après, force est de constater que la question de la vie en commun de populations sédentaires ou non, par choix ou par contrainte, se pose encore, notamment dans le champ politique.
Pour autant, il serait faux de soutenir que la loi du 5 juillet 2000 n’a pas produit d’effets. Sa portée a été bien supérieure à celle de 1990 et de nombreuses aires ont été construites. Certes, la loi a aussi généré un inévitable contentieux mais somme toute assez raisonnable en considération de la sensibilité de l’enjeu.
Du seul point de vue du droit, deux premières réformes seraient utiles. En premier lieu, il serait précieux de repenser l’articulation entre les différents corps de règles qui encadrent l’hébergement temporaire. En second lieu, il serait également utile de repenser l’articulation entre le droit au logement et le droit afférent à l’accueil des gens du voyage.