Dans Une forme de vie, Amélie Nothomb s’interroge sur les relations humaines nouées au travers de la forme manuscrite, l’art perdu de la correspondance, thème cher à l’auteur, donnant un texte à mi-chemin entre roman épistolaire et réflexions personnelles sur la lecture et l’acte d’écriture.
Sous sa plume incisive, naît une narratrice presque sa jumelle, un double de papier qui lui permet avec humour et autodérision de s’attaquer aux petits travers et aux grandes faiblesses des écrivains. L’auteur devenu personnage de sa propre fiction y raconte son goût pour les échanges écrits et notamment ceux qu’elle entretient assidument avec ses lecteurs.
Un jour, Amélie, reçoit une curieuse missive de la part d’un GI américain basé en Irak qui lui demande de devenir sa marraine de guerre. Tout d’abord méfiante, l’affabulation étant toujours probable, elle se laisse convaincre par le récit poignant de cet homme, intriguée par ce soldat fervent admirateur de son œuvre.
A travers ses lettres, Melvin Mapple se raconte, raconte la violence de ce monde devenu fou qui est son quotidien. Une grande partie de son escadron et lui-même ont trouvé un moyen de surmonter l’angoisse vitale, le remord qui les rongent en sombrant dans la boulimie. Le gras est une enveloppe protectrice psychologique qui les éloignent de la bestialité de leur condition et leur obésité un moyen de révolte. Le soldat y voit un parallèle avec l’œuvre de la romancière qui la tient à distance de la réalité. Cette correspondance devient le premier pas dans sa recherche de dignité
Ce roman rédigé dans une veine satirique est une invitation à lire, à écrire, à se réaliser. Amélie Nothomb partage ses réflexions sur le statut de la littérature, son goût des autres tels qu’ils se réinventent par le biais de l’écriture. Le lecteur y retrouve le caractère décalé plein de mordant, élément essentiel de l’univers nothombien. Le style épuré jusqu’à l’ascèse nous emporte dans cette histoire improbable à dévorer d’une seule traite. Une forme de vie est truffé de rebondissements redoutables qui nous amènent à méditer sur l’imposture et le sens de l’existence. Un roman dans lequel l’émotion se mêle à la drôlerie, les fulgurances philosophiques à la schizophrénie.
Une forme de vie – Amélie Nothomb – Editions de poche : Le livre de poche