Tiens, il est toujours
vivant !
C’est la remarque qu’ont du se faire beaucoup de gens lorsqu’ils ont appris
que Nicolas Sarkozy avait fait une brève mais remarquée apparition sur la scène
politique à travers le dossier Syrien. Pourtant il n’a quitté ses fonctions que
depuis 3 mois, mais il faut dire qu’après 5 années d’omniprésence forcenée, 3
mois sans l’ombre d’un Sarkozy à l’horizon nous ont paru une éternité.
Etonnamment, on a l'impression que dans l’esprit de beaucoup, la page Sarkozy a
été tournée en 3 secondes et demie à 20heures le soir du 6 mai, juste le temps
de prendre connaissance du résultat de l’élection présidentielle.
L’attitude plus normale paisible de son successeur et les congés
d’été ont finis de nous faire oublier celui dont l’action et le comportement
ont pourtant suscités tant de commentaires passionnés.
Eh voilà que, d’un coup, un petit peu en catimini, il réapparait sur le
radar des français.
Qu’il revienne sur le dossier Syrien n’est évidemment pas un hasard. Fort de
ce qu’il considère à tort ou à raison comme un de ses plus beaux succès,
l’occasion était trop belle de comparer son action en Lybie avec l’inaction
réelle ou supposée de son successeur en Syrie.
Pour autant, peut-on considérer cette réapparition dans le paysage politique
comme l’amorce d’un véritable retour et si oui serait-ce une bonne nouvelle
?
Chacun sait qu’en politique tout va vite, la perception qu’ont les électeurs
d’un homme/femme politique peut évoluer à grande vitesse. Les exemples sont
légions, prenons le cas des prédécesseurs de Sarkozy.
Mitterrand fut extrêmement impopulaire à plusieurs époques. Selon le
baromètre IFOP en novembre 1984, seules 26 % des personnes interrogées
approuvaient son action.
En janvier 1992, il n'étaient que 22 % à approuver sa politique (Il faut dire
que Cresson était alors 1er ministre). En mars 1993 les sondés n’étaient que 24
% à se dire satisfaits.
Plus généralement sa cote de confiance a été extrêmement fluctuante tout au
long de ses 2 mandats. Rapellons qu'au terme du second, il n'était crédité que
d'un piteux 30% !
Or, selon un sondage BVA Opinion pour 20Minutes en 2011, 60% des personnes
interrogées jugent positivement le bilan de François Mitterrand à la Présidence
de la République. Etonnamment, c’est 10% de plus que lors de la dernière année
de son mandat en 1995 !
Prenons le cas Chirac, qui aurait pensé qu’il deviendrait si
populaire.
En Juillet 2006, sa
cote de confiance était au plus bas avec 16%, en Février 2012 sa cote de
popularité (certes c’est un peu différent) culmine à 72 % !
Pourtant entre ces 2 dates que s’est-il passé ?...rien !...si, Chirac après
avoir glandouillé 12 ans à l’Elysées en est parti dans l’indifférence générale
et sous le regard moqueur de son successeur.
Oubliée la ribambelle de casseroles qu’il traine derrière lui sans jamais
avoir été inquiété par la Justice, oublié cette extraordinaire capacité à se
faire entretenir, oubliée son incapacité à prendre des décisions politiques
courageuses, oubliées toutes ces années perdues pour réformer la France, oublié
tout cela, on ne voit plus que le grand Jacques, l’homme simple qui lutine
encore ostensiblement les femmes, ne manque pas un Salon de l’agriculture et
boit de la bière Corona en short sur son canapé !
En ce qui concerne Sarkozy, qui aurait dit fin 2011 alors qu’il se traînait
misérablement avec des
cotes de confiance de 20%, qu’il ne serait battu qu’avec un si faible
écart.
Tout ça pour dire, que la popularité ça va et ça vient, ou disons que
pendant qu’on est au pouvoir ça s’en va surtout et que ça revient lorsqu’on en
est viré parti. L’explication de ce phénomène ne se trouve pas dans
un excès de compassion soudaine que le peuple se découvrirait tardivement
vis-à-vis de celui qu’il a voué aux gémonies quelques années plus tôt, mais
parce qu’une autre victime est arrivée au pouvoir. Un impopulaire en chasse un
autre.
Alors certes, Sarkozy n’est ni Chirac ni Mitterrand, mais les 3 hommes ont
en commun d’avoir connus des hauts et des bas et d’avoir suscité des réactions
violentes, il n’y a donc pas de raison que Sarkozy ne puise pas bénéficier de
la même popularité post-mandat que ses prédécesseurs !
Ce processus quasi systématique débute plus ou moins tôt après la passation
de pouvoir, d’ailleurs 100 jours après son avènement, il semble que la courbe
de François Hollande commence déjà à
baisser. Maintenant, attendons de voir ce que celle de Sarkozy va nous
faire. Mais de toute façon, il faudra attendre quelques années avant que les
courbes ne se croisent.
Parce que pour que ce phénomène fonctionne il y a quand même au moins 2
conditions à remplir. Tout d’abord, il faut du temps, l’électeur/citoyen a beau
avoir la mémoire courte il ne faut quand même pas exagérer, il lui faut un peu
de temps pour qu’il se lasse de ses récents amours et qu’il oublie ses
anciennes rancœurs.
L’autre condition pour que ça marche, c’est évidemment que le sortant sache
se faire oublier suffisamment mais pas trop. Suffisamment pour que l’effet
poisson rouge puisse faire son office mais pas trop pour qu’il reste dans
l’inconscient collectif comme un recours possible. Dans le cas de Sarkozy cet
équilibre est d’autant plus important à respecter que son omniprésence pendant
une grosse partie de son quinquennat a provoqué une lassitude prématurée du
personnage.
Ce sera peut-être la difficulté la plus importante pour Sarkozy, savoir
doser ses interventions, se faire très discret et n’intervenir que sur les
sujets sur lesquels la comparaison sera d’évidence à son avantage. Pas facile
pour un hyperactif impatient comme lui qui n’a sans doute rien abandonné de ses
ambitions politiques. D’autant que ses interventions seront également destinées
à son propre camp, histoire de montrer qu’il reste le patron.
Tout ça pour dire que la petite intervention de Sarkozy sans pouvoir être
considérée comme un réel retour sur la scène politique, ce qui serait
certainement prématuré, me semble juste une première petite balise sur le long
chemin qui l’espère t-il doit le ramener sur le devant de la scène.
Quand à savoir si c’est une bonne nouvelle, chacun jugera en fonction de
l’appréciation qu’il a du personnage, mais quoi qu’il en soit, compte tenu de
son expérience politique, un retour en politique ne serait pas illégitime. De
toute façon, ce sera aux sympathisants UMP de décider s’il est le mieux placé
pour les représenter.
Malgré tout, en amenant son camp de défaite électorale en défaite électorale,
Nicolas Sarkozy n’a pas fourni la preuve qu’il pouvait aider la Droite à
retrouver son lustre d’antan.
Pour ma part, j’ai tendance à penser que la Droite, et en corollaire la France toute entière qui a besoin d'une opposition forte et constructive, aurait tout à gagner à tourner définitivement la page Sarkozy dans le cadre d’une remise à plat de ses fondamentaux idéologiques, de ses pratiques et d’un renouvellement de ses cadres.