Titre original : First Blood
Note:
Origine : États-Unis
Réalisateur : Ted Kotcheff
Distribution : Sylvester Stallone, Richard Crenna, Brian Dennehy, Bill McKinney, David Caruso, Michael Talbott, Chris Mulkey…
Genre : Drame/Action/Survival/Saga
Date de sortie : 2 mars 1983
Le Pitch :
John Rambo, un soldat de retour du Viet-Nam, arrive à proximité d’une petite bourgade, pour retrouver un vieil ami de régiment. Apprenant la mort de ce dernier, Rambo décide de se rendre dans le centre-ville pour s’y restaurer. Il tombe alors sur le Shérif Teasle, qui l’arrête pour vagabondage. Commence un bras de fer brutal entre l’ancien soldat et les forces de l’ordre…
La Critique :
Rambo, premier du nom, est souvent assimilé à un pur film d’action bourrin. C’est une erreur qui perdure encore aujourd’hui, un peu plus de trente ans après sa sortie en France. La faute à des suites qui ont principalement exploité le côté guerrier du protagoniste principal, en mettant toute la problématique dramatique au second plan. Et là, on parle essentiellement du troisième opus, qui reste le plus faible du lot.
Rambo n’est donc pas un film d’action. Ou du moins, il n’est pas seulement un film d’action. Car ce n’est pas non plus un hasard, si le long-métrage de Ted Kotcheff, inspiré du roman First Blood de David Morrell, a immédiatement trouvé grâce auprès des amateurs éclairés de bourre-pifs et de fusillades sanglantes. Rambo réserve de grands moments. De l’évasion du commissariat au début, à l’assaut final, en passant par la traque dans la forêt, le film laisse peu de place à de quelconques temps morts. Survival sauvage et âpre, Rambo repose sur une tension qui ne redescend jamais. On fait la connaissance d’un véritable héros de cinéma. Un pariât seul contre tous, qui se bât pour survivre et non pour une quelconque cause. Du moins dans un premier temps…
Sylvester Stallone ,qui a co-écrit le scénario du film, est à l’époque en pleine bourre. Fort du succès des trois premier Rocky, il se lance dans ce qui est tout d’abord envisagé comme une œuvre unique. Il n’est pas question d’entamer une saga. Une première version du film, très fidèle à son modèle littéraire, prévoyait même de tuer Rambo à la fin. Jugée trop sombre lors des projections tests, la dite version ne fut pas retenue par les producteurs.
Si Stallone souhaite offrir un vrai spectacle (pour lequel il ne s’économise pas : il se cassera trois côtes sur le tournage en exécutant lui-même la cascade de « l’arbre et de la falaise »), l’objectif principal de sa démarche est d’aborder de manière frontale et sèche un véritable problème : le retour au pays des soldats ayant officié dans les rangs de l’armée américaine pendant la guerre du Viet-Nam.
La tonalité de Rambo est ainsi très mélancolique. Rambo s’aperçoit vite que le monde souhaite oublier le conflit pour lequel il a presque donné sa vie et pour lequel ses amis ont péri, sur place, ou chez eux, peu après leur retour, rattrapés par les dommages collatéraux. Le personnage du Shérif, brillamment incarné par Brian Dennehy, représente cette farouche opposition face des hommes que l’on souhaite le plus éloignés possible des rues paisibles et de leurs façades mensongères.
Confronté à un manque de reconnaissance accompagné d’une agressivité outrancière, Rambo se voit donc contraint de riposter. Sans chercher à tuer. Juste pour se défendre, bien malgré lui.
C’est là qu’intervient l’autre personnage phare de l’univers Rambo, à savoir le Colonel Trautman. Appelé par la police en sa qualité d’ancien supérieur hiérarchique du soldat Rambo, quand ce dernier commence à se rebiffer contre ses agresseurs, Trautman est celui qui dessine le plus clairement le personnage de Rambo. «Vous ne voulez pas accepter le fait que vous êtes en face d’un expert dans la guerre d’embuscade. D’un homme qui est le meilleur au fusil, au couteau ou à mains nues. Un homme qui a appris à ignorer toutes les souffrances. À ignorer le temps ! À vivre sur le terrain, à manger des choses qui feraient vomir un bouc ! Au Vietnam sa mission était de faire ce qu’il voulait de l’ennemi, de tuer ! Quoiqu’il arrive ! De gagner par l’usure ! Pour ça Rambo était le meilleur. » ou encore « Je ne suis pas venu sauver Rambo de la police. Je suis venu vous sauver de Rambo », soit deux répliques qui trouveront dans les épisodes suivants, des échos plus ou moins comiques, qui sonnent ici comme des avertissements sans équivoque (avec le fameux « ce que vous appelez « l’enfer », il appelle ça « chez lui » dans Rambo II : La Mission). Des lignes de dialogues qui posent remarquablement le concept. Le mec qui se ballade dans les bois avec à ses trousses une petit armée est capable de tout, si on le titille trop longtemps…
Forcement, le concept, en plein dans le cahier des charges du survival (Rambo est un modèle du genre) a de quoi coller la chair de poule. Efficace, relativement court, le métrage de Kotcheff ne perd pas son temps en digressions. Des films comme Voyage au bout de l’enfer, qui traite de la même problématique, l’ont déjà fait brillamment par le passé. Rambo explore une autre facette d’un sujet polémique. Et si Rambo, n’a aujourd’hui, rien perdu de sa force évocatrice, c’est aussi tout simplement car il parle de quelque chose de commun à toutes les guerres. En témoigne des œuvres comme Brothers de Susanne Bier (revisité par Jim Sheridan en 2010), par exemple.
Et c’est dans son dernier quart que Rambo explose vraiment. À l’écran, où tout vole en éclat et émotionnellement parlant, par le biais d’un monologue légendaire du personnage central. Largement considéré comme étant l’un des plus vibrants et déchirants monologues de l’histoire du cinéma, la déclaration de Rambo à la fin du long-métrage, porte en son sein toute l’essence du problème. Un grand moment de cinéma qui conclut dans les larmes, la sueur et le sang un véritable chef-d’œuvre. Un film d’action, de guérilla, un drame intimiste, un survival, une réflexion pertinente… C’est comme vous voulez, Rambo est tout cela à la fois et bien plus encore. Admirablement porté par la performance incarnée d’un Sylvester Stallone concerné et physiquement au top de sa forme, Rambo est l’autre grand personnage du comédien. Un personnage qui sera un peu malmené, mais qui aura marqué de son empreinte indélébile l’histoire du septième-art. Un héros déchiré pas si éloigné que cela de Rocky, l’autre alter égo de Sly, qui a d’ailleurs plus ou moins suivi la même évolution au fil des années 80, avant de renaitre sous la plume d’un Sly toujours désireux d’offrir à ses deux frères jumeaux un chant du cygne à la hauteur de leurs débuts.
Ceci-dit, il se murmure dans les milieux autorisés qu’un cinquième Rambo serait en préparation. Et vu la baffe que fut le quatre, on en jubile d’avance.
@ Gilles Rolland
Crédits photos : Carolco Pictures