Après une première saison de seulement six épisodes démarrant de façon extraordinaire pour peu à peu se déliter et s’achever sur un ultime épisode d’une nullité abyssale, difficile de rester enthousiaste à la perspective d’une seconde saison de The Walking Dead. D’autant plus que les libertés prises avec la trame du matériau d’origine et le départ soudain du showrunner Frank Darabont pour des raisons plus que vagues ne laissait rien augurer de bon…
La seconde saison de The Walking Dead reprend donc exactement là où la première s’était achevée. Après avoir réchappé à l’explosion du CDC, les survivants décident de fuir Atlanta. Ils finissent par tomber sur une ferme isolée, dont le propriétaire, Hershel Greene (Scott Wilson) sauve Carl, le fils de Rick, après que celui-ci se soit pris une balle perdue. La jeune Sophia ayant disparu suite à une attaque de zombies, Hershel accepte de mauvaise grâce que Rick et les siens restent sur ses terres le temps de la retrouver et que Carl se remette. Le petit groupe ne va pas tarder à découvrir que le rigide Hershel cache un terrible secret dans sa grange…
Avec un nombre d’épisodes passé de six à treize, on pouvait espérer que cette seconde saison comble la principale lacune de la précédente, à savoir des personnages totalement inintéressants. Malheureusement, cette saison continue sur la lancée de la précédente. Les personnages sont au pire totalement effacés (combien d’épisodes avant de comprendre qui est présent dans la ferme d’Hershel ?), juste inutiles (le personnage de T-Dog, qui donne l’impression d’avoir été créé juste pour avoir un acteur noir au casting), voire carrément antipathiques. Shane est juste un gros bourrin qui veut tuer tout ce qui bouge et veut récupérer la femme de son pote (ce qu’on savait déjà dans la première saison, c’était bien utile de le garder en vie une saison de plus !), Dale est censé être l’homme sage du groupe mais n’est ici qu’un vieil emmerdeur qui fourre son nez partout et donne son avis de façon péremptoire sans qu’on lui ait demandé, et Lorie passe son temps à prendre un air coincé et à raconter n’importe quoi à n’importe qui au moment le plus inopportun.
Quant à Rick, n’en parlons pas… Dans le comic book de Robert Kirkman, Rick est le référent du lecteur, le mec droit dans se bottes qui fait tout pour garder le groupe soudé et protéger sa famille, ce qui ne l’empêche pas de prendre des décisions difficiles, voire de se sacrifier, que ce soit physiquement ou psychologiquement, pour le bien de tous. Dans cette saison, c’est d’abord une chiffe molle sans aucun charisme qui se laisse juste porter par les événements, à tel point qu’on se demande pourquoi les autres le suivent (même si tous affirment qu’il est un leader). Sans réelle logique, il finit par se transformer en justicier prenant de froides décisions et fait ensuite la girouette pendant le reste de la saison. Il arrive même à changer d’avis trois fois par épisodes, à tel point qu’on a l’impression de voir un schizophrène aux multiples personnalités ! Pour le leader-né, on repassera…
Seuls les personnages de Glen, Maggie et Hershel semble réchapper à ce marasme. La romance entre Glen et Maggie est assez réussie et développée en finesse, et Scott Wilson campe un excellent Hershel, un patriarche campé sur ses positions, mais dont les illusions finiront par être durement brisées. Mais il résulte de cette caractérisation foirée des personnages une impression de morcellement permanent, et le fait qu’on ne croit absolument jamais à la cohésion de ce groupe disparate. D’autant que les scénaristes peinent de toute évidence à naviguer d’un personnage à l’autre, oubliant certains d’entre eux pendant 2-3 épisodes avant de les ramener brusquement sur le devant de la scène, ce qui est assez gênant pour une saison se passant quasiment dans un lieu unique.
Outre le fait qu’ils semblent constamment changer d’avis (voir le personnage de Daryl qui semble ne jamais savoir s’il veut faire partie du groupe ou pas) et qu’ils ne sont jamais unis, les personnages agissent souvent en dépit du bon sens. On ne compte plus le nombre d’épisodes dans lesquels l’un d’eux s’aventure seul dans les bois et se retrouve dans une merde noire (voire se fait bouffer), où ils prennent des décisions totalement irrationnelles (la mort de Jimmy ou la fuite d’Andrea dans le final sont des grands moments de n’importe quoi).
L’autre gros défaut de cette saison, c’est son manque évident de rythme. Les intrigues peu passionnantes s’enchainent et trainent en longueur (six épisodes quasi uniquement centrés sur la recherche d’une gamine perdue !), et les personnages ultra-bavards se sentent obligés de sur-analyser et sur-expliquer le moindre de leurs actes, donnant l’impression au spectateur d’être un arriéré mental tant il est pris par la main. Le niveau remonte heureusement légèrement passée la première moitié de la saison, notamment lors de l’épisode Secrets, qui offre enfin un peu de tension, et se termine en apothéose par l’ouverture de la grange et la découverte d’un secret extrêmement perturbant (même pour les fans du comic book, puisque ce rebondissement n’était pas présent dans celle-ci). Les dernières images de cet épisode résument à elles seules toute l’horreur de la situation des personnages et laissent difficilement de marbre. Dommage que la remontée soit de courte durée, puisque si le rythme s’accélère par la suite, c’est pour mieux sombrer dans le n’importe quoi, sans pour autant corriger les défauts majeurs de la série.
Comme on a pu le constater dans la première saison, la série a décidé de s’éloigner du comic book d’origine, même si elle conserve la plupart des grands événements de celui-ci. Pas forcément un problème en soi (même si on regrettera l’éviction pure et simple de l’excellent personnage de Tyrese, en gros remplacé par celui de Daryl), sauf que la majeure partie des changements effectués est totalement à côté de la plaque. Passe encore que Dale soit tué dans cette saison ou que Shane ait survécu à la première saison, mais il est plus difficile de pardonner des changements plus profonds. On a en effet souvent la désagréable impression que ces modifications ont été faites dans le but unique de rendre la série plus politiquement correcte et visible par le plus grand nombre. On gomme donc la romance entre Dale et Andrea (forcément, un mec de 70 ans qui sort avec une étudiante, c’est mal !), on zappe totalement les personnages des jumeaux, sachant que plus tard l’un de ces deux gamins va assassiner son frère, et hop, on va dire que là c’est Rick qui tue Shane, et pas Carl, ça passera mieux avec la censure ! Les épisodes louvoient constamment pour éviter toute idée dérangeante, usant de deus ex machina incroyablement tordus pour éviter d’avoir à poser trop de questions difficiles (la mort de Dale qui permet à Rick de faire volte-face lorsqu’il doit éliminer un gamin d’un groupe adverse potentiellement dangereux). L’autre problème de ces « petites » trahisons, c’est que du coup les scénaristes sont obligés d’user de rustines énormes pour recoller les morceaux (la horde de zombies qui comme par hasard se trouve à proximité lorsque Carl tire un coup de feu dans le dernier épisode), voire de carrément inventer des événements (Carl qui affirme avoir rejoint son père parce qu’il a entendu un coup de feu alors qu’aucun n’a été tiré).
Alors au final, que reste-t-il pour avoir envie de continuer à regarder cette série ? Tout d’abord, il faut bien avouer que par chance la série n’hésite pas à aller dans le gore quand il le faut, se montrant beaucoup moins timorée que certains films récents. D’autant que les toujours extraordinaires maquillages des zombies créés par KNB permettent de maintenir l’intérêt du spectateur. On n’oubliera en effet pas de sitôt le zombie pendu aux jambes dévorées ou encore le zombie coincé dans le puits de la ferme de Hershel. C’est donc toujours un plaisir pour l’amateur de films de genre de découvrir les nouvelles prouesses du studio. The Walking Dead parvient aussi parfois à procurer quelques beaux moments d’émotion et de tension. On a cité la scène de l’ouverture de la grange, on pourra aussi ajouter l’enterrement de Dale couplé à une chasse aux zombies sauvage, ou encore l’arrivée furieusement iconique du personnage de Michone dans le dernier épisode de la saison. C’est toujours ça de pris, mais c’est loin d’être suffisant pour maintenir l’illusion encore longtemps…
Bref, alors qu’une série comme Game of Thrones parvient avec une facilité insolente à mêler intrigue complexe, personnages charismatiques et respect sans faille à l’œuvre d’origine, on ne peut que pleurer de rage devant le gâchis de The Walking Dead. Dommage car le comic book avait le potentiel pour donner une grande série, si une chaîne avec un peu plus de rigueur en avait acheté les droits…
Note : 4.5/10