En ce mercredi asiatique, remettons le cap au pays du Matin Calme pour ce qui semble devoir être rien moins que mon coup de coeur sud-coréen de l'été. Qui eut cru qu'un semi-high school drama, d'un abord nostalgique car nous plongeant dans les années 90 (certes, j'ai moi aussi été adolescente durant cette période), pourrait sonner si authentique et faire jaillir en moi tant d'émotions - du rire aux larmes - ? Le câble sud-coréen est bel et bien en train de grandir et de mûrir, en voici cette fois un bien bel exemple avec Reply 1997 !
Ce drama a débuté le 24 juillet dernier en Corée du Sud sur la chaîne tvN. Il est diffusé tous les mardis soir, à raison de deux épisodes à la suite, ce qui fait qu'il comptera en tout 16 épisodes d'une demi-heure environ (mais le rythme est donc d'1 heure par semaine). Après avoir visionné les 4 premiers, me voilà sous le charme d'un récit qui fait preuve d'une justesse émotionnelle à chérir. En tout cas, vous ne pouvez pas imaginer à quel point cela fait plaisir de tomber sur cette petite bulle d'air frais en ce mois d'août.
[La review qui suit prend en compte les 4 premiers épisodes du drama.]
Reply 1997 s'ouvre en 2012. Un couple un peu âgé chante des classiques dans un karaoke, leur fille, Sung Shin Won, la trentaine dynamique, les interrompt pour lancer sa propre chanson. Son père lui réclamant d'en choisir une sans paroles en anglais, elle lance ce qu'elle qualifie de "classique", une musique du groupe H.O.T, boysband de sa jeunesse. Une autre nuit, Shin Won se rend à un repas d'anciens élèves : elle retrouve connaissances et amis de sa promo de 1997, l'année de leur 18 ans. A trente-trois ans, ce n'est pas encore de la nostalgie que ces désormais adultes éprouvent pour leur adolescence, mais ce dîner ramène Shin Won, en pensées, à la fin des années 90 et à leur vie d'alors.
Si Reply 1997 revient ensuite périodiquement dans le présent, avec des commentaires en voix off des différents personnages commentant avec recul le passé, il se déroule donc en majeure partie en 1997, à Busan. Le drama nous donne l'occasion de suivre une bande de six amis, proches depuis presque toujours pour la plupart (seul Do Hak Chan arrive en cette fin de lycée en provenance de Seoul). Shin Won et sa meilleure amie, Yoon Jung, sont alors des fans inconditionnelles du groupe H.O.T., se jetant sur la moindre émission parlant de leurs idoles. Les garçons observent ce comportement avec plus de distance. Au sein de ce groupe d'amis, c'est logiquement une période où chacun change, se découvre et éprouve ses premiers amours. Comment leur amitié a-t-elle grandi avec eux sur ce chemin que l'on appelle la vie ?
Il y a, dans Reply 1997, un parfum de nostalgie, beaucoup d'humain et une réelle authenticité qui ne peuvent laisser insensible le téléspectateur. L'écriture adopte une justesse de ton rare, globalement maîtrisée, pour relater une époque - la reconstitution de 1997 est très soignée - et les tranches de vie qui l'accompagnent. La série représente vraiment ce que l'on peut et doit attendre d'un human drama, laissant la part belle aux émotions - sans jamais en faire trop et tomber dans un mélodrama - mais aussi à ces petites anecdotes de vie qui prêtent à un rire spontané venant de bon coeur. Elle met en scène des personnages attachants, qu'elle prend le temps de dépeindre avec leurs qualités et leurs défauts, leurs certitudes et leurs doutes. Grâce à tout cela, on se sent instantanément proche d'eux. Certes, l'ambiance est parfois très orageuse, entre adultes et/ou entre adolescents, mais les liens qui les unissent demeurent solides et indéfectibles, qu'il s'agisse de liens du sang ou d'amitié. Aux turbulences succèdent des passages plein de chaleur, où transparaissent des joies communicatives, comme la communion trans-générationnelle que permet le visionnage d'un match de coupe du monde.
Cette proximité, Reply 1997 la cultive aussi grâce au cadre bien délimité qu'elle pose, qui a l'avantage de devenir vite familier. Avec pour centre Shin Won, il se limite à deux lieux principaux : le lycée, où, si les classes de garçons et de filles ne sont pas mélangées, chacun se retrouve pour déjeuner à la cafétéria, et la maison des parents de Shin Won, dont le père est l'entraîneur de l'équipe locale de baseball. La réussite de Reply 1997 est de nous immerger dans ce quotidien de 1997 sans lourde introduction, ni s'apesantir inutilement sur les informations qu'elle distille. L'époque est bien recréée (programmes télévisés, technologie, musique). Et l'on prend en cours de route la vie des personnages sans disposer immédiatement de toutes les clés pour comprendre les situations. Ainsi, Yoon Jae déjeune quotidiennement chez Shin Won, mais la série ne s'étend pas sur le pourquoi de la situation. Pareillement, l'écriture fait toujours preuve de tact et de pudeur, à l'image des scènes, dans l'épisode 4, où elle nous apprend que Shin Won avait une soeur. C'est petit à petit que le tableau se complète, et sur ce point, le drama sait faire preuve d'une patience et d'une justesse qui méritent d'être salués.
Outre ce registre human drama, Reply 1997 reste un portrait d'adolescence, certes avec les particularités et modes de 1997, mais aussi avec tout ce qu'il y a d'universel à cet âge difficile de nos 18 ans par lequel chacun est passé. Pour le téléspectateur, l'identification fonctionne parce que le drama capture avec beaucoup de fraîcheur les amitiés fluctuantes d'alors, entre disputes et réconciliations, et ces moments de malaise où les gestes normaux d'hier paraissent soudain inconvenant vis-à-vis de l'autre. Car c'est un temps où les rapports garçons-filles changent, où des sentiments nouveaux, pas forcément compris, naissent. C'est le récit sonnant très authentique d'une entrée progressive, chacun à sa manière et en prenant le temps qui lui est nécessaire, dans un âge adulte, sans y être encore tout à fait. Et c'est donc aussi l'époque des premiers amours.
En 2012, Shin Won nous a annoncé que durant ce repas de retrouvailles deux personnes vont annoncer leur mariage, sans préciser l'identité des heureux élus. Vu de 1997, on devine qu'il reste encore à chacun une longue route à parcourir pour se trouver. Sans mettre en péril leur amitié, Reply 1997 esquisse par petites touches des triangles amoureux nourris de qui pro quo, de petites jalousies informulées, d'amitiés restaurées et de secrets hésitants échangés. Chacun semble destiné à n'avoir d'yeux que pour celui qui ne prend pas conscience ou ne souhaite pas cette attention. J'ai particulièrement aimé le fait que, dans ces premiers épisodes, la série brouille un peu plus les lignes grâce à un personnage qui se révèle être gay. Ainsi tandis que Yoon Jae aimerait tant que Shin Won remarque ses attentions, il s'irrite de la proximité grandissante qu'elle a avec Joon Hee... ce dernier étant en réalité secrètement amoureux de son meilleur ami... Yoon Jae (et ayant mis Shin Won dans la confidence). La réussite du drama, ici, c'est de savoir pour l'instant préserver une part d'innocence dans la manifestation de ces sentiments, mais aussi une sincérité touchante qui évite toute lourdeur.
Soigné sur le fond, Reply 1997 l'est également sur la forme. La réalisation est appliquée, et, surtout, la photographie conforte l'impression de nostalgie sur laquelle surfe ce drama (que vous ayez ou non connu les années 90, en Corée ou ailleurs). Côté bande-son, les choix sont tout aussi recherchés : le drama sélectionne des tubes d'alors, nous faisant remonter le temps à travers les chansons de H.O.T., les émissions musicales et autres extraits de cette époque. Se perçoit bien tout le travail fait pour la reconstitution d'une époque pas si lointaine, mais où surveiller son tamagochi, tout en chatant tant bien que mal sur un écran ordinateur à l'horrible fond bleu, était normal.
Enfin, si le casting est jeune et assez inexpérimenté, il s'en sort bien, sans doute parce que la justesse et la simplicité d'écriture permet à chacun de trouver facilement sa place. Jung Eun Ji se révèle pétillante et pleine de vitalité dans ce rôle central d'adolescente encore dans cette phase monomaniaque de fan de boysband laissant ses résultats scolaires en berne, mais qui devra bien grandir un jour. En complice d'enfance dont la relation est désormais plus tumultueuse, Seo In Gook (Love Rain) est correct. On retrouve également pour composer cette bande d'amis Shin So Yool (Jungle Fish 2), Hoya, Eun Ji Won et Lee Shi Un. Parmi les adultes en 1997, Song Jong Ho (The Princess' Man) interprète le frère de Yoon Jae, tands que Sung Dong Il (Fugitive : Plan B, Can't Lose) et Lee Il Hwa jouent les parents de Shin Won.
Bilan : Drama profondément humain, plein d'émotions, capable de faire passer, avec naturel, sans forcer, du rire aux larmes, Reply 1997 est un soupçon de nostalgie sur lequel s'ajoute un retour sur l'adolescence d'une justesse et d'une authenticité rares. Un portait à la spontanéité rafraîchissante. Bien écrits, correctement interprétés, soignés dans leur reconstitution de cette fin des années 90 tout en abordant des thématiques aux accents universels, ces débuts se révèlent être une belle surprise. Je suis sous le charme de cette série qui fait chaud au coeur, et j'espère donc voir le drama poursuivre sur cette voie très prometteuse ! tvN tient peut-être là une jolie perle. A surveiller.
NOTE : 7,5/10
Une bande-annonce de la série :
Parce qu'elle prend une telle place dans la vie des adolescentes d'alors, la k-pop en 1997 - H.O.T. :