Il épluchait mes tweets et ce blog comme pour se tenir au courant de ma vie avant que l'on se voie. Et nous discutions. Ou plutôt il avait repéré ma faille narcissique et s'y était engouffré. Il me faisait parler de ce que je connaissais le mieux (le croyais-je), moi. C'est ainsi que j'ai su très peu de choses sur sa vie. A peine son prénom. Pas son nom. Au point que j'en venais à douter du prénom qu'il m'avait donné. Ma mémoire de moineau. Mon ego trapu. Ce manque d'attention à l'autre qui me caractérise aussi.
Dieu sait qu'il m'a fait grimper aux rideaux. Chaque fois. Différemment. Sans tabou. Et puis, forcément, on s'attache. Forcément, j'ai voulu davantage. Les choses étaient claires, pourtant. Il ne voulait pas de relation sentimentale. Du sexe, oui. Mais il m'a couvert de tendresse. Souvent. C'était sa façon de déroger à ses règles, de me donner l'amour que j'espérais. Demandais, presque. Et qu'officiellement il ne pouvait, ne voulait m'offrir.
Il suffisait que je tweete "saucisson" pour qu'il réponde par sms et débarque chez moi. C'était drôle. Excitant. Il prenait mes tweets au pied de la lettre. Me reprochait souvent d'enfoncer des portes ouvertes. Ou s'enthousiasmait de la poésie de quelques uns.
Jamais je n'ai été chez lui. Toujours chez moi. Exceptionnellement un verre dans le quartier, une douceur, un dîner, une fois. Une fois en un an et demi. Au terme duquel, nous nous sommes quittés, de bonne humeur. Ni lui ni moi n'avions envie ce soir-là. Et me déposant en bas de chez moi, il m'a dit quelque chose comme : j'ai aimé ce moment à caractère non pornographique.
J'ai voulu autre chose que ce qu'il était en mesure de me donner. Je n'ai pas su me satisfaire du peu (mais de tout ce) qu'il me donnait. Je l'ai envoyé promener. Maladroitement. Bêtement. J'ai aimé nos baisers volés dans la rue. Je l'ai aimé.