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Aqiil GOPEE (Île Maurice).

Par Ananda


WOLVES.

Allons nous promener dans les bois.

Vos éclats miroitent dans les ronces. Vos peaux se diluent au regard de la lune. La forêt vous emprisonne. Serre d’arbres et de noirceurs. Grattements et hululements. Vous n’êtes que des enfants. Anges dans le fleuve noir de la nuit. Vous êtes roses, bleus et violets. Constellés d’oursons et d’étoiles. Vos odeurs de pêche et de talc se marient aux effluves bruts des bois et de la terre. Vos pieds nus s’enfoncent dans la boue. Vos mains rondes se tiennent par les doigts et le bleu de vos yeux s’insinue sous le couvert des ténèbres. Vous ne savez pas qui vous êtes. Où vous allez. Vous êtes dans les bois. C’est tout ce qui compte.

Vous vous êtes réveillés, il était une nuit. Une nuit dans un monde. Vous vous êtes réveillés et vous avez entendu l’appel. Il venait de loin. C’était un voyageur égaré. Venu de la lune. Il a frappé à vos fenêtres et vos âmes sont descendues de vos lits. Vos corps ont suivi. Et vous avez tous quitté la chaleur de l’orphelinat.

La lune est une grossesse.

Vous marchez. Vers le Voyageur. Suivre l’appel. Il a besoin de vous. Vous avez besoin de lui. Vos boucles blondes sont des feuilles effleurées par le vent. Les branches s’accrochent à vos vêtements. Les bois sont épais. Vous êtes si petits. Vos joues sont des baies. Vos yeux sont des mers.

-

Tandis que le loup n’est pas là.

Enfants de nuit. Enfants de lune. La forêt vous reconnaît soudain. Elle s’ouvre à vous comme l’utérus d’une femme morte. Froide et maternelle. Et vous avancez. Pantins de chair et d’os. La terre écorche vos pieds. Se délecte de la senteur du sang et de l’innocence.

Vous débouchez sur une clairière.

Une robe blanche, sans visage. Cheveux couleur de lune. Elle vous tend une main invisible. C’est le Voyageur.

-

Le loup est là.

Vous tombez par terre. Vos corps se convulsent sous le regard du Voyageur. Les basques de sa robe s’envolent jusqu’aux étoiles. La pleine lune vous sourit.

Et vous, enfants innocents, enfants orphelins, enfants de terres, vous explosez. De vos bouches ouvertes surgissent des crocs luisants comme des épées, de vos peaux déchirées naît un pelage noir et touffu, brûlant comme la semence de soleil éjaculée sur le ventre de la lune, et de vos gorges déployées vagissent des hurlements de bêtes, profondes comme les cavités de l’espace.

Enfants des bois. Enfants des loups. Les lambeaux calcinés de vos chairs disparaîtront avant l’aube.


Aqiil Gopee.


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