La grandeur de l’évènement sportif que constituent les Jeux Olympiques ne l’ont jamais mis à l’abri des polémiques et débats politiques. Les Jeux Olympiques restent aussi une compétition disputée et prestigieuse, qui est l’occasion de se montrer au grand jour pour certains sportifs. Les désillusions n’en sont que plus grandes. Alors que la fin des épreuves approche, faisons un point sur les polémiques (relativement nombreuses) qui ont émaillé ces jeux.
Le voile est-il compatible avec les Jeux Olympiques ?
La première polémique ayant touché ces jeux est celle concernant le voile islamique qu’ont voulu porté les deux femmes de la délégation Saoudienne pendant leurs épreuves (en judo et en athlétisme). Wodjan Ali Seraj Abdulrahim Shahrkhani a pu finalement, malgré les hésitations, participer à la compétition de judo (+ de 78 kg) avec son voile, à la demande de son père, qui menaçait de la retirer des Jeux Olympiques.
Un dilemme se présentait alors aux organisateurs. En effet, les deux Saoudiennes ne sont pas des compétitrices comme les autres puisqu’elles ont été invitées par le CIO à ces Jeux Olympiques, afin de développer le sport féminin dans leur pays. Une initiative donc authentiquement progressiste dans l’esprit olympique que l’on connaît. Difficile pour le CIO, après avoir fait venir ces femmes à Londres, de leur interdire l’accès aux épreuves. Et pourtant, la raison de le faire pourrait tout autant être valable au nom même d’un autre principe olympique…celui de la laïcité : « Aucune distinction n'est admise à l'égard d'un pays ou d'une personne pour des motifs de couleur, de religion ou de politique. » (Charte de 1952 I,1) ; « Aucune sorte de démonstration ou de propagande politique, religieuse ou raciale n’est autorisée dans un lieu, site ou autre emplacement olympique. » (Charte de 2011, 50,3) . Mais l’olympisme laisse aussi une place importante à la diversité culturelle. Bref, dans cette affaire, un sac de nœuds de principes contradictoires semblait rendre l’affaire complexe.
Pour le CIO, la décision était toute réfléchie : une bonne cause vaut bien une concession, d’autant plus que le voile fut déjà porté auparavant aux JO, aux épreuves de tirs notamment. De même, pour la Saoudienne courant le 800m, Sarah Attar, pas de problème car des femmes ont déjà couru dans une sorte de combinaison couvrant les cheveux, comme l’Australienne Cathy Freeman. Les hésitations venaient en fait plus de la Fédération Internationale de Judo. Les règles de judo sont en effet simples mais strictes sur la tenue des judokas, à savoir un haut et un bas de kimono, ainsi qu’une ceinture. Finalement, un compromis a été trouvé pour ne pas poser de problèmes de sécurité : elle porta une sorte de bonnet de bain pour couvrir ses cheveux, et non pas un voile islamique, ce qui aurait pu en effet la gêner.
Cette question n’est pas d’une importance majeure, et finalement, la décision n’est pas étonnante, à savoir que la judokate portait le voile pendant son épreuve pour être le symbole déclencheur de la pratique sportive féminine dans son pays. Mais n’est-ce pas contradictoire avec la volonté même d’améliorer la condition féminine dans ces pays, sachant que c’est le père qui a fait pression pour que celle-ci porte le voile et sachant aussi que pendant la cérémonie d’ouverture, les deux saoudiennes défilaient à bonne distance de leurs compatriotes de sexe masculin ?
-La judokate saoudienne, ici en blanc, a finalement pu combattre-
Le règlement est-il le même pour tous ?
Deuxième polémique, celle autour de stratagèmes voir de triches plus ou moins volontaires et pas toujours sanctionnées équitablement. C’est notamment autour de la non combativité (anti-olympique) que cette polémique s’est construite. Il faut bien prendre en compte la complexité de cette question car beaucoup de sports bien différents sont présents dans ces jeux. On peut d’abord évoquer le cas de l’athlète Taoufik Makhloufi, algérien spécialiste du 1 500m. Très en forme pour le 1 500m, il se qualifia dans un premier temps aisément pour la finale. Mais celle-ci se déroulait après une qualification au 800m, à laquelle il devait participer malgré lui, sa fédération ne l’ayant pas désinscrit. Il fit l’erreur de s’arrêter pendant sa série puis de reprendre. Renvoyé des JO pour non combativité, il fut réintégré après avoir justifié médicalement son comportement, pour ensuite conquérir brillamment le titre Olympique sur 1 500m le lendemain. On peut dire que cet athlète a eu chaud. Mais ce ne fut pas le cas de deux joueuses chinoises en Badminton, qui furent exclues pour avoir perdu volontairement leur dernier match de poule afin de choisir leur adversaire du tour suivant. Un tel comportement (peut-être moins flagrant) ne fut pas sanctionné pour les basketteurs espagnols, qui ont perdu (volontairement selon certains) leurs match contre le Brésil, pour ne pas tomber en quart de finale contre les Etats-Unis, mais contre la France. Un adversaire plus à leur portée comme l’a montré la suite : l’Espagne a en effet battu le 5 tricolore. Pire encore, le CIO n’a rien eu à redire des « stratagèmes britanniques » en aviron et en cyclisme sur piste. Les premiers auraient eu une panne heureuse pour recommencer, tandis que le démarreur de l’équipe de vitesse britannique a clairement dit qu’il était tombé volontairement pour pouvoir tenter un meilleur départ pendant les qualifications. Or ces deux tactiques furent couronnées d’argent et d’or et sont clairement en contradiction avec le fair-play.
Les roues en or des britanniques.
Cette polémique est bien plus franco-française, les britanniques nous ayant surclassés aux épreuves de cyclisme sur piste, glanant 7 des 10 titres sur ce sport. Une moisson impressionnante de médaille qui contraste fortement avec les performances des britanniques au cours des derniers championnats du monde, pendant lesquels Grégory Baugé avait remporté la course de vitesse individuelle. Si les pistards français ne remettent pas en cause la propreté britannique concernant le dopage, ils semblent plus sceptiques concernant leur matériel, et notamment leurs roues dont on ne peut voir l’intérieur, et qui sont soigneusement rangées dans des housses après les courses, selon les dires d’Isabelle Gautheron, directrice technique nationale. En effet, les règles concernant le matériel sont strictes pour cette discipline : le matériel doit être accessible par le commerce pour être légalement utilisé en course. Les anglais assurent que c’est bien le cas, et que leurs vélos ne sont pas des prototypes, et que leurs roues sont bien authentiques. Ce qui est aussi très suspects selon les français, c’est que de telles performances ne sont démontrées par les britanniques que lors des Jeux Olympiques : les cyclistes britanniques étaient déjà en forme olympique à Pékin après des résultats moins bons avant. Mais laissons toutefois notre jalousie de côté. Le cyclisme britannique est peut-être simplement dans une bonne passe. Il faut dire que le cyclisme sur piste est bien plus reconnu en Grande Bretagne, mieux financé, notamment grâce à la loterie nationale qui n’existe pas pour les courses françaises. De même, le dernier Tour de France d’il n’y a même pas un mois montre que les britanniques mettent beaucoup de moyens pour équiper et préparer au mieux leurs cyclistes, la victoire de Bradley Wiggins en est la preuve. La clef est peut-être de développer ce sport un peu plus chez nous, ce qui est malheureusement plus facile à dire qu’à faire. Pour cette question, l’avenir nous en dira plus.
De nombreuses injustices à la boxe.
Il faut dire qu’à chaque Jeux Olympiques en boxe, c’est le bal des contestations et des injustices. Mais cette année, un nouveau record olympique de réclamations fut établi : une vingtaine ! Cela pourrait bien dégoûter les boxeurs amateurs et les pousser à passer à la catégorie professionnelle quitte à ne plus pouvoir participer aux Jeux.
En cause, la scoring-machine, une méthode de compte des touches. Le principe aux JO est le suivant : 5 juges observent le combat. Pour qu’une touche soit accordée, il faut que trois juges touchent quasi-simultanément le compteur. Ce système, introduit aux jeux de Barcelone en 1992 laisse une place importance aux erreurs et donc aux injustices. Il est d’ailleurs contesté lors des compétitions nationales voir régionales françaises et fait toujours débat au sein de la fédération, certains souhaitant revenir à un jugement sur l’ensemble de la prestation des boxeurs. On sent comme un ras-le-bol dans ce sport qui doit pouvoir se réformer pour ne pas faire fuir ses pratiquants, qui sont ceux qui garantissent le spectacle aux JO.
Voilà pour les principales polémiques de ces Jeux Olympiques. Elles touchent plus ou moins directement le sport et sa pratique, mais aussi les symboles et principes de l’Olympisme a vocation universelle. Au-delà de ces échauffourées, remercions les sportifs qui nous ont fait vibrer, qui ont fait de leur mieux pour le meilleur résultat ou pour la plus grande des déceptions. Et si le résultat ne fut pas au rendez vous pour l’escrime, le cyclisme sur piste, la voile ou encore l’équitation, nous devons féliciter la natation ou encore le judo pour leurs performances exceptionnelles !
Vincent Decombe
Sources :
Le Point
FranceTV
Rue 89
Eurosport
La Manche Libre
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