L’AAMS, en Italie, et l’ARJEL, en France, produisent des statistiques mensuelles ou trimestrielles sur les comportements des joueurs de poker en ligne. On est loin de la culture du secret de Loto-Québec et du modèle suédois. Depuis quelques mois, en France, et plus particulièrement en Italie, on assiste à une décroissance des parties à l’argent (Cash Games) au profit des tournois. Étonnamment, le montant global que les joueurs laissent au jeu ne semble pas influencé par ce passage des parties à l’argent vers les tournois. Pourtant, les parties à l’argent sont communément perçues comme une source de profit plus intéressante pour les opérateurs.
L’Italie a légalisé uniquement les tournois de poker multitables en septembre 2008. Les parties à l’argent n’ont été autorisées que le 18 juillet 2011. La figure suivante indique les montants misés par les joueurs dans les deux types d’activité de poker. Ces montants ne représentent toutefois pas les pertes car avec 100 Euros, on gagne et on perd, de sorte que l’argent en gain peut être recyclé plusieurs fois avant d’être définitivement perdu.
La figure suivante illustre les montants réellement perdus en fonction de l’activité. Ce sont les profits des opérateurs (incluant l’État). Les profits totaux sont légèrement plus élevés en 2011-2012 qu’en 2010-2011. Par contre, l’arrivée des parties à l’argent a principalement causé un transfert de la dépense aux tournois vers les parties à l’argent sans générer une dépense additionnelle importante. Malgré une diminution régulière des montants misés aux parties à l’argent, les profits semblent suivre leur fluctuation saisonnière.
En France, les parties à l’argent ont été autorisées en même temps que les tournois multitables. On y observe aussi une légère diminution des parties à l’argent accompagnée par une augmentation des montants misés dans les tournois multitables.
Si on accepte l’estimé de l’ARJEL (voir page 40), présumons qu’un Euro est recyclé 23 fois dans les parties à l’argent et 8 fois dans les tournois. Ceci nous permet d’estimer la fluctuation de l’argent qui sort de la poche de l’ensemble des joueurs. Ceci est différent des profits des opérateurs. On y perçoit aussi une fluctuation saisonnière sur une ligne de base qui n’apparaît pas vraiment changer sauf pour une très légère hausse. Encore ici, l’argent retiré des parties à l’argent semble entièrement redirigé vers les tournois.
Ce début de désintérêt envers les parties à l’argent ne s’explique certainement pas par le désir de dépenser moins.
En tournoi, sauf pour les R&A (Rachat et Ajout), on sait au départ combien cela coûte. Pour un Euro (ou un dollar), on joue plus longtemps. En tournoi multitables, il y a moins de possibilité de collusion. Les professionnels et les vautours (dépendants des logiciels d’aide à la décision) ont moins la possibilité d’atteindre un joueur faible qu’ils ont ciblé. Bref, pour l’instant, on peut surtout construire des hypothèses.
Photo : Billets d'Euro (Andrew Netzler)