En ce dimanche oisif, je contemple l’araignée qui a tissé sa toile entre une tige de marguerite et les feuilles de fraisier à la fenêtre de mon appartement parisien. Une plongée dans mes pensées erratiques, grises et lumineuses à la fois. Sur la route cabossée qu’a empruntée ma vie. Qui sans ces bosses n’aurait pas le goût épicé d’une existence douloureusement excitante. Palpitante.
Souvent je songe à ce voyage intérieur qu’a été ma disparition. Furtive mais réelle. Ces jobs que j’enchaîne comme pour ne m’attacher à aucun. Ce clavier que je fuis pour ne pas écrire ce que j’ai à cœur d’écrire. Le jeans que je porte, un cadeau que m’a fait Jonathan au bout du monde. A Gansbaai, petite ville portuaire d’Afrique du Sud. Où personne ne me savait. Où j’ai logé, couché au creux de l’épaule de cet homme qui ne connaissait rien de ma vie, et m’a aidé, aimé un temps, à sa façon. Ce bout du monde où j’ai croisé la route de ce Français, Sébastien, qui ne parlait pas un mot d’anglais et que j’ai invité à notre table. Sébastien à qui j’ai présenté la meilleure amie de Jonathan. Ils ont vécu une amourette. J’ai joué Cupidon et le traducteur. Sébastien que je ne connaissais pas et qui m’a vu pleurer comme un enfant. Il m’a emmené voir les requins au large. C’était magnifique. Unique.
Au Cap, le plus beau garçon de la soirée, Fernando m'a étreint comme jamais je n'avais été étreint.
A Port-Nolloth, petite ville portuaire à la frontière de la Namibie, où, au terme d'une douzaine d'heures d'un voyage, conduit par un autre inconnu, Frederic. Il m'a accueilli dans la plus belle chambre de son hôtel. Vue sur l’océan, sur les carcasses de bateaux qui avaient échoué la veille, brisés par la tempête qui avait secoué la région. J’étais entre deux moments de ma vie. En rupture puis en construction pour une nouvelle page à écrire. Revenir en France, plus tard. Retrouver ceux qui m’étaient chers. Mon rêve que je croyais encore chimère, me réinstaller à Paris. Offrir le logis aux belles âmes qui m’ont choyé lors de mon voyage en Afrique du Sud. Lorsqu’elles poseraient leurs sacs à Paris, ville que ces hommes et ces femmes que j’ai rencontrés là-bas n’avaient jamais vue et rêvaient de voir. Là-bas, mais en moi, j’ai appris à demander de l’aide, éprouver de la gratitude pour les êtres.