EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Suite à une proposition de loi constitutionnelle visant à la suppression du terme « race » de l'article 1er de notre Constitution, il apparaît important que celle-ci trouve une continuité et une cohérence dans une suppression du même terme dans la législation française. Cela permettrait de bannir totalement ce mot synonyme « d'inégalité des civilisations » de notre ordre juridique.
Le bannissement de ce terme relève de la responsabilité de tous les groupes parlementaires et cesserait de donner une certaine légitimité juridique aux idéologies racistes. En effet, si l'usage à ce terme dans notre législation a pour unique ambition et but de prohiber toute discrimination qui serait fondée sur une différenciation entre les êtres humains, il peut renvoyer à une certaine légitimation ou validation de l'existence de « races humaines ».
On ne peut que rappeler avec force que non seulement l'idée même d'une classification voire d'une hiérarchisation de l'espèce humaine sur la base de critères biologiques est scientifiquement inopérante mais aussi que son utilisation a toujours servi de support ou de pseudo-justification à l'extermination des peuples.
Même si nous avons conscience qu'une suppression du terme n'aura pas pour conséquence une suppression du discours raciste, cela ne peut en aucun cas justifier pour autant son maintien et usage dans notre législation. La question serait mal posée.
D'abord parce que si le mot « race »n'existe plus et de ce fait ne trouve plus de fondement juridique, le mot« racisme » demeurera parce que si les« races » n'ont pas d'existence scientifique, on ne peut que déplorer l'existence du racisme qui est lui bien réel. C'est pourquoi outre cette suppression symbolique, il est nécessaire de travailler par la suite dans le sens d'un maintien voire d'un renforcement d'une législation répressive en la matière.
Ensuite, il est important d'écarter l'idée selon laquelle la non consécration de ce terme par notre législation aurait pour conséquence la création d'un vide juridique. Il est préconisé de remplacer ce terme par celui« d'ethnie » fondé non sur des critères biologiques mais sur des distinctions ou des spécificités historiques et sociales. Notion positive renvoyant à des caractéristiques objectives et à l'idée d'une multiplicité qui est source d'enrichissement.
Proposée à plusieurs reprises depuis dix ans à l'Assemblée nationale et au Sénat, cette suppression n'a jamais été adoptée. Nous insistons une nouvelle fois sur l'importance de l'adoption de cette proposition de loi ainsi que de la proposition de loi constitutionnelle évoquée d'entrée qui permettrait de mettre un terme à une stigmatisation, une injustice et une discrimination, à l'utilisation d'un mot scientifiquement infondé et contraire à la philosophie et à l'idéal de notre démocratie et notre république, c'est pourquoi, nous vous invitons à adopter la présente proposition de loi.
PROPOSITION DE LOI
Article 1er
À l'exception des textes où il se réfère à la désignation d'espèces animales, le mot « race » est supprimé de la législation française.
Article 2
I. - Au premier alinéa de l'article 211-1 du code pénal, le mot :« , racial » est supprimé.
II. - Au premier alinéa de l'article 2-1 du code de procédure pénale, le mot :« , raciale » est supprimé.
III. - Au premier alinéa de l'article 48-1 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, le mot : « , raciale » est supprimé.
IV. - Au 8° de l'article 212-1 du code pénal, le mot : « , racial » est supprimé.
V. - Au premier alinéa de l'article 226-19 du code pénal, les mots :« raciales ou » sont supprimés.
Article 3
Au 10° de l'article 212-1 du code pénal, les deux occurrences du mot : « racial » sont remplacées par le mot : « ethnique » et le mot : « raciaux » est remplacé par le mot : « ethniques ».