L'euro et la rigueur ? François Hollande travaillait sur le front de l'euro. De réunions en entretiens, il consultait. A Paris, son premier ministre avait livré les premières pistes de la « rigueur juste ». Puis il partit en vacances.
En train.
C'était son
premier été de président..
Il y a 5 ans, Nicolas Sarkozy avait choisi comme lieu de
villégiature une villa de milliardaire à Wolfeboro. De vacances en weekends prolongés, nous nous étions habitués à ses séjours bling-bling financés dans la plus grande opacité. Cette année, il avait emprunté un riad à Marrakech, un chalet canadien du milliardaire et ami Paul Desmarais, avant un court séjour dans le palais du Cap Nègre de son épouse, puis à nouveau à Marrakech où il aurait acheté le Palais d'Antares, une somptueuse villa, pour 5 millions d'euros. Selon le site emarrakech, le roi Mohamed VI lui aurait proposé de devenir conseiller royal. C'était l'objet de l'entrevue qu'il a eu mardi après-midi avec le premier ministre marocain.
A Nogent-sur-Marne, le maire UMP lui avait bien ériger la statue promise. Cet hommage tombait à plat, anachronique.
Liliane Bettencourt a vendu son île d'Arros,
celle-même dont elle dissimulait l'existence quand Florence Woerth,
l'épouse du ministre du Budget d'alors, travaillait pour son compte à
fructifier ses affaires.
Des comptes officiels de campagne, il ressort que François Hollande a dépensé environ 500.000 euros de plus que son rival Nicolas Sarkozy. Evidemment, les 150 déplacements provinciaux annuels réalisés hors sol, sans sujet et sans contrôle par Nicolas Sarkozy lors de ces 3 dernières années de mandat n'ont pas été décomptés.
Le décret d'encadrement des loyers est entré en vigueur. Une première satisfaction pour la ministre du logement Cécile Duflot. La taxe sur les transactions financières aussi, pour 109 grandes entreprises dont le siège social est en France. Mais sous la pression d'un lobby boursier qu'il faudra bien un jour traiter, son application a été repoussée au 1er décembre pour les entreprises françaises cotées à New-York.
Sans surprise non plus, GDF-Suez
a prévenu que ses clients particuliers seraient prélevés de 40 euros en
moyenne. Il fallait bien ajuster les tarifs du gaz, 290 millions
d'euros de rattrapage. Nicolas Sarkozy avait tenté de nous faire croire
qu'il n'y avait aucune raison d'une telle augmentation en décembre
dernier.
La première loi budgétaire de l'ère Hollande a été votée. 7,2 milliards d'euros d'imposition supplémentaire. La droite enrageait. La gauche avait enterré la subvention sarkozyenne aux heures supplémentaires, l'augmentation de la TVA en octobre prochain et un renforcement exceptionnel de l'iSF (pour plus de 2 milliards d'euros!), qu'elle entendait faire annuler devant le Conseil Constitutionnel. Jean-François Copé, dont l'ami Ziad Takkiedine venait d'écoper d'une nouvelle mise en examen pour fraude fiscale, dénonça: le compte n'y était pas ! Bien sûr que le compte n'y était pas ! Il restait encore une grosse trentaine de milliards d'euros à trouver pour solder la gestion passée ! La droite tentait d'organiser sa riposte. François Baroin confiait sa haine des blogs.Thierry Mariani dénonçait l'épuration, après la mutation du procureur Philippe Courroye et de l'ambassadeur Boris Boillon.
Mercredi, c'était séminaire. Ayrault voulait calmer les esprits, réchauffer les humeurs, après de dures discussions avec Bercy. Le lendemain, chacun avait sa feuille de route budgétaire. La justice, la police, la gendarmerie, mais surtout l'éducation recevraient quelque 11.000 postes supplémentaires pour l'an prochain. Pour les autres, c'était ceinture ! Et principalement pour la Défense (-7.200 postes l'an prochain). Côté crédits, le budget de l'Etat serait gelé pour l'an prochain. A droite, c'était la consternation. On avait fait campagne sur un mythe d'une gauche irresponsable qui embaucherait à tour de bras des fonctionnaires... Tout juste Xavier Bertrand dénonça-t-il la baisse des commandes militaires qui risquait, selon lui, d'aggraver le chômage.
Que comprendre ? Hollande en faisait-il trop... ou pas assez ?
Le gouvernement communiquait sobrement mais très régulièrement. La synthèse des 65 premières mesures des deux premiers mois était prometteuse mais certains avaient quelques regrets. Jérôme Cahuzac, le ministre du budget, hésitait sur les modalités précises de la future imposition à 75% des revenus excédant le million d'euros. Quel message voulait-il faire passer en expliquant, jeudi sur France Inter, qu'il faudrait faire la distinction entre les revenus « certains », qui sont « garantis », et les autres ?
Son collègue Manuel Valls (Intérieur) fut pris dans une mauvaise polémique. Un demi-paragraphe lors d'une session au Sénat, en réponse à une question sur le démantèlement de camps illégaux de gens du voyage, et voici ses propos comparés au funeste discours de Grenoble de Nicolas Sarkozy le 30 juillet 2010. Valls avait sans doute beaucoup de défauts, mais pas certainement celui d'endosser le fratras sécuritaire et xénophobe de l'ancien Monarque! Il fallait simplement comparer les déclarations pour le réaliser, sans doute ni question. A Grenoble, Sarkozy nous avait tout sorti, la déchéance de nationalité, l'amalgame immigration=insécurité, et, en coulisse, une circulaire discriminant si particulièrement les Roms qu'elle fut annulée et remplacée quelques semaines plus tard.
Au passage, Valls déclassifia cette semaine 24 documents requis par les juges anti-terroristes dans l'affaire Merah. La DCRI, quand elle était dirigée par Bernard Squarcini, l'âme damnée de l'ancien Monarque, les avait classés secret/défense.
Si certains voulaient s'indigner, ils auraient pu se saisir d'un excellent rapport bi-partisan du Sénat sur les absurdités de la tarification à l'acte qui sévit dans le milieu hospitalier. Le dispositif alloue des financements aux établissements en fonction de leurs facturations. Les sénateurs ne réclamaient certes pas sa suppression. Mais ils recommandaient qu'on n'étende pas le système comme prévu en 2013 à l'ensemble du secteur. Et leur réquisitoire sur les faiblesses et absurdités du système était sans pitié.
Si certains voulaient s'indigner, la situation syrienne était ignoble. Kofi Anam démissionna de sa mission onusienne. Des exécutions sommaires de loyalistes ou de rebelles circulaient sur le Web. On rapporta que Nicolas Sarkozy s'indignait de l'inaction française. Le Canard Enchaîné publia cruellement un récent cliché, d'il y a quelques mois, figurant le boucher El Assad dînant à l'Elysée avec Nicolas Sarkozy et leurs épouses respectives. BHL aussi était déçu qu'Hollande n'envoie pas nos soldats.
François Hollande était finalement parti en vacances, jeudi matin avec sa compagne. Les deux ont pris le train pour rejoindre le Fort de Brégançon, sous l'oeil des caméras, ce qui a agacé le Figaro. Nicolas Sarkozy préférait le jet présidentiel discrètement affrété de l'aéroport de Villacoublay pour rejoindre le Cap Nègre de sa millionnaire épouse. Un jeune sbire de Brice Hortefeux réclama par voie de presse qu'Hollande rembourse la location des lieux. François Fillon, lui, n'a pas attendu d'être président de la République pour se faire inviter par un millionnaire étranger, en l'occurrence le président de Ferrari. Il fallut attendre qu'il se fracture la cheville gauche en scooter près de Capri cette semaine pour apprendre la chose. Le dit millionnaire lui avait aussi prêté son yacht personnel qu'il loue habituellement 48.000 euros la semaine.
A l'UMP, Christian Estrosi, député-maire de Nice, « sentait la vague ». Déjà 3.000 parrainages pour sa candidature à la présidence de l'UMP. Outre Copé et Fillon, le nombre de seconds ou troisièmes couteaux en lice pour cette éminente position ne lasse de surprendre. Estrosi, sarkozyste fidèle, avait fait toutefois entendre sa sincérité contre son ancien mentor quand ce dernier fustigeait l'immigré pendant la dernière campagne présidentielle. Nathalie Koscisuko-Morizet, a suivi le chemin inverse. Elle n'était pas si sarkozyste d'origine et très publiquement hostile au Front National, mais elle endossa l'ignoble campagne en tant que porte-parole du candidat déchu. La voici qui déclarait vendredi aux Echos qu'elle se sentait fidèle au sarkozysme.
Allez comprendre...