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159° Chine, Jeux Olympiques, Tibet et homophobie.

Publié le 24 mars 2008 par Jacques De Brethmas

On ne sait plus ou donner de la tête ni de la plume.

Entre le « bon accueil » à réserver à l'accélération des réformes, la préparation de mai 2008 et le problème posé par les Oeufs Jolympiques, comme disait Coluche, par où commencer?

Par dénoncer l'inculture et l'incompétence des journalistes qui ne cessent de parler de « boycottage », au prétexte que la langue française ne possède pas, c'est vrai, de traduction pratique de « boycott », qui est à l'origine un nom propre. Pourquoi pas « boycottation » pendant qu'on y est? Luttons contre l'inculturisme et l'analphabétage.

Ceci dit, un boycott complet serait une punition injustement infligée à des sportifs pour lesquels un tel événement est souvent le point culminant d'une carrière, l'aboutissement d'une vie d'efforts et d'entraînement. Or nous ne voulons que du bien à nos sportifs, même si une médaille olympique en a déjà conduit certains à devenir ministre d'un gouvernement de droite.


La faute en incombe au Comité Olympique qui a, en 2001, alors que le problème du respect des droits de l'homme en Chine était bien sûr déjà posé, choisi ce pays en dépit de réserves pourtant clairement exprimées à l'époque.

Boulette confirmée le 17 décembre 2007 par le même Comité Olympique à Lausanne, qui a refusé de reconnaître le Comité Olympique Tibétain et ainsi obligé les sportifs tibétains à concourir sous les couleurs chinoises, ce qu'ils ne feront sans doute pas.


Par contre, difficile d'y aller avec l'air de rien. Le règlement olympique prévoit que les sportifs qui ne participent pas à la cérémonie d'ouverture ne peuvent pas participer aux compétitions, mais ne précise pas la qualité du représentant officiel de la délégation.. Réglementairement, on peut donc envoyer son chauffeur ou son cuisinier.

La seule expression possible du désaccord français sur le comportement du pouvoir chinois est donc entre les mains de notre gouvernement. Alors, Ira? Ira pas?

Tout plaide pour qu'il n'y aille pas, si on reste dans le domaine humaniste. D'abord sa façon de gouverner à vue: un chien mord: on vote une loi anti-chien.

Là, un sondage révèle que 53% des Français souhaite que la France n'ait pas de représentation diplomatique à la cérémonie d'ouverture. Or, 53%, c'est justement le pourcentage au nom duquel le gouvernement déclare « inexorable » la poursuite des réformes malgré sa claque aux municipales et aux cantonales, puisque c'est celui avec lequel Sarko a été élu l'an dernier.

Quand il s'agit de « réformer », 53% constitue, pour nos dirigeants, un contrat moral auquel il ne saurait se soustraire. Se soustraira-t-il à la volonté de 53% des Français qui veulent que les sportifs aillent tous seuls à Pékin?

Mais ce n'est pas si simple.... Enfin, le problème n'est pas seulement « humaniste »...


La vraie question est maintenant de savoir combien d'Airbus sont capables de contrarier la volonté populaire? Rien qu'en 2007, Airbus a vendu à la China Southern Airlines, cinq A 380 (le mastodonte), cinquante A 320 (moyen courrier) et à la China Eastern Airlines, la compagnie « concurrente » (si, si) trente autres A 380. Sans parler d'options sur plus d'une centaine d'autres machines volantes de toutes sortes.

Pendant ce temps, Eurocopter plaçait dix EC 155 toutes options (8 millions d'euros pièce), Areva négociait deux réacteurs EPR 3° génération à 4 milliards d'euros le morceau, Alcatel un système complet de téléphone mobile clés en mains, Alsthom l'automatisation du métro de Shanghaï et Sanofi-Aventis une usine pharmaceutique spécialisée dans l'élaboration de vaccins. Et les Chinois nous paient en euros, pas en dollars...

Il va donc être difficile à notre pauvre président de se fâcher avec la Chine olympique. C'est toujours difficile de faire la tête à des gens pétés d'oseille.

Mais enfin, c'est bien lui et nul autre qui, en sollicitant les 53% de suffrages qu'on lui a imprudemment accordés, est allé se placer dans cette situation. On ne va pas le plaindre, attendu d'abord qu'il se moque éperdument de ce qu'on pense de lui, et qu'ensuite ce ne sont pas toujours des situations aussi cornéliennes que celle-là qui lui ont valu son impopularité.

Pour être complet sur le sujet: Qu'en est-il de l'homophobie en Chine?

La situation des homosexuels en Chine était florissante jusqu'à la longue marche de Mao. Elle est devenue épouvantable pendant l'expansion communiste, et surtout au moment de la révolution culturelle de 1965 à 1975, où le sort le plus enviable qui leur était réservé était le camp de rééducation. Des milliers, peut-être des millions d'entre eux furent exécutés sommairement d'une balle dans la tête car « atteints d'un vice occidental » et « incapables d'assurer l'expansion du peuple chinois ».

Petit à petit, les choses ont été en s'améliorant, du moins dans les grandes villes. Il est vrai qu'eu égard aux dimensions du pays, les homosexuels chinois sont au nombre de cent vingt à cent quarante millions! Comme ça faisait beaucoup de saletés d'exterminer tant de monde et beaucoup de travail pour les rééduquer, le gouvernement chinois, devenu pragmatique et soucieux d'un brin de respectabilité, a finalement choisi d'essayer de « faire avec ».

Les lois anti-gay ont été abolies en 1997, et comme le pays n'est pas affligé d'une religion monothéiste et que l'ambiance générale consiste à cultiver une plus grande liberté, les progrès se font plus rapidement que chez nous. Souvenons nous que l'homosexualité bénéficiait d'une image favorable en Chine jusqu'à l'arrivée des communistes.


L'irruption du Sida, d'abord niée par les autorités, est maintenant prise en compte, et les homosexuels, qui ne constituent qu'une infime part des cas, n'en sont pas considérés comme responsables.

Si le sort des gays ruraux est encore incertain, la vie gay commence à se montrer dans les grandes villes. Certes, il n'y a pas de Gay Pride, mais les lieux gay se multiplient sans attirer les foudres du pouvoir. Dès lors qu'un gay possède un travail et un salaire, on ferme les yeux sur sa vie privée. Malheureusement, un catholicisme émergeant commence à essayer de déranger cette belle libération...


En 2006, une proposition de loi créant un mariage gay a même été déposée au Comité Central du parti, mais il n'a pas été voté.

Il existe des sites gay ou gay-friendly chinois qui ne sont pas censurés, comme:

http://www.daqi.com/

site généraliste à forte connotation gay friendly, et les feuilletons de la télévision mettent couramment en scène des homosexuels et des couples gays d'aspect « normal ».Ils ne sont pas censurés comme la cérémonie d'Olympie.

http://news.soft32.com/chinas-first-gay-chat-show-goes-live-on-the-internet_3900.html


Ceci dit, cette situation, presque satisfaisante si on la compare à certains pays musulmans ne doit pas nous faire oublier les atteintes quotidiennes à la liberté d'expression, notamment. Un brave homme qui tenait un blog réclamant des libertés politiques vient d'être condamné à cinq ans de prison pour le seul fait d'avoir écrit ce qu'il pensait... L'application de la peine de mort bat tous les records pour de simples problèmes de délinquance quotidienne.


Ne nous méprenons donc pas. Les droits de l'homme ne consistent pas seulement à pouvoir choisir sa vie privée et même sa religion. Ce sont des conditions nécessaires, mais pas suffisantes. La liberté d'opinion, de pensée, d'expression sont les fondamentaux des droits de l'homme, et c'est là que le bât blesse: En exhibant un certain progrès social et individuel, les autorités chinoises veulent nous cacher le principal. Le problème tibétain est là pour le rappeler. La Chine n'offre aucune liberté politique.


D'habitude, les droits des femmes et des homosexuels constituent un excellent baromètre du niveau des libertés d'un pays. En Chine, ces mesures sont faussées. Ne nous laissons pas abuser.

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