J'ai réappris à conduire - 2

(Suite et fin)
J'ai donc laissé choupette aux bons soins de ma mère et j'ai tout fait pour me trouver une petite voiture. Tchi! J'ai souffert deh! Négociations sur négociations! Le pays est devenu dur deh! Je cherchais une allemande pour sa robustesse, j'ai gagné une japonaise!
Je viens donc d'avoir ma petite voiture. Je ne vais plus fatiguer "choupette" la vaillante. Cela dit, une remise à niveau est vitale, pour ma propre sécurité.Hors de question pour la go choco de repartir à l'auto-école ou de placarder l'affiche "Nouveau chauffeur, soyez indulgent", en police Arial ou Colibri, taille 44, sur la vitre de ma voiture!
Après quelques coups de fil passés, j'ai souscris à l'offre "pote avec option chauffeur de taxi pour co-pilotage" proposé par mon ami Fredo. J'ai confiance.

Cours N°1: Passement de vitesse avec jeux de jambes sur pédales.Je démarre en deuxième. Je confonds la première avec la troisième. De peur, je mets les deux pieds sur le frein. Gragragra... Je cale. Là c'est chaud! J'attache ma ceinture, bien serrée. J'éponge mon front. Je redémarre. Sur la route, c'est la jungle. Gbakas, woro-woro, taxis et bus-accordéons affluent. A ce moment là, je me demande comment je vais faire pour rentrer dans ce flot. Le souvenir du retraité chauffeur de woro qui peinait à monter la côte de mon quartier m'est revenu. Moi qui me moquais de lui. Je vois à présent son visage ricanant. Cauchemar!A peine je m'engouffre que je me fais harceler par le klaxon des voitures. Normal, je roulais à 20km à l'heure, à force de regarder dans tous les rétroviseurs, de penser au clignotant, de réfléchir à la vitesse qu'il fallait que je passe et de ne surtout pas oublier d'appuyer l'embrayage avant d'accélérer... pas trop quand même car il y a un woro qui me double sur la droite et un gbaka qui pile devant moi pour prendre des clients. Je stresse. Des passants déboulent devant moi. Je cale. Ca klaxonne de plus belle. Je redémarre, je cale... 5 fois! La honte! Les voitures me dépassent. Certains chauffeurs me lancent en rigolant:"Eeeeh! Nouveau chauffeur, c'est pas facile hein!" "Maman-jolie, faut enlever ton pied sur embrayage et appuis fort le frein!" Fredo en profite "Mais c'est ce que je te dis de faire depuis là!!" (Sympa le co-pilote!) Mes pieds patinent. Je ne sais plus où est le frein ni l'embrayage ni l'accélérateur. Je re-cale.Cours N°2: Démarrage en côte.Aucune transition. Aucune pitié. Là, j'ai envie de pleurer.J'aborde une méchante côte au fin fond du quartier de la riviera, sur le terrain d'une promotion immobilière en construction.Mon coeur se serre. Je freine. (Qui m'a dit?) Je dois redémarrer et actionner le jeu de jambe.... La voiture recule. Je panique. Je freine. Je transpire. Je n'arrive plus à respirer. Le soleil me tape. (Ah oui! J'ai oublié de vous dire, ya pas fréon dans ma voiture. C'est une occas', faut pas trop en demander non plus!)Moi la go choco, je braise sur place. Il ne manque plus que oignons, tomates, cube maggi pour ressembler à un poulet piqué. 

Là, je me demande comment j'ai fait pour passer le permis il y a quelques années! C'était si facile! L'inconscience? L'insouciance? Eh la vieillesse! C'est pas facile hein!
Comment m'en sortir? Simuler un malaise ou prier pour que l'essence finisse dans le réservoir pour espérer que tout s'arrête?Mon ami Fredo insiste, s'énerve, me réprimande... Moi, crispée sur le volant, les pieds engourdis tellement j'appuyais sur l'embrayage et le frein comme une malade. Après de multiples tentatives, il se résigne et me dit: "Hummm! Façon tu commences à changer de couleur là, on va arrêter pour aujourd'hui. Parce que là-là, ta peau a changé. Tu es devenu rouge-rouge, ya chaleur sur toi".J'étais délivrée.Le soir, je n'ai pas parlé, je n'ai pas mangé, je me suis couchée direct. Le lendemain matin, impossible de me lever, on dirait qu'on m'a battu. 
J'avais le palu.Bref! J'ai réappris à conduire.