Rompons le fil de la violence pour que plus rien ne brûle !
Incendies est l’adaptation cinématographique bouleversante de la pièce du dramaturge Wajdi Mouawad par le réalisateur canadien Denis Villeneuve.
Dès la scène d’ouverture, le ton est donné : des enfants orphelins sont tondus et préparés au combat sur fond sonore de « You And Whose Army » de Radiohead. Victimes ou futures bourreaux d’une guerre qui n’épargne personne ? Peu importe… car le mal semble fait !
Le véritable départ du film s’effectue cependant au Canada, où l’on découvre les jumeaux Marwan (Jeanne et Simon) qui, à la lecture du testament de leur mère, se voient remettre deux enveloppes : l’une destinée à un père qu’ils croyaient mort et l‘autre à un frère dont ils ignoraient l’existence. Afin de respecter les dernières volontés de leur mère, un voyage au Moyen-Orient s’impose, afin d’exhumer le passé douloureux de Nawal Marwan.
En jouant avec la chronologie et en découpant son récit en chapitres, Denis Villeneuve lève progressivement le voile sur les secrets de cette mère décédée après plusieurs semaines de mutisme. Jusqu’au twist final, le spectateur découvre les révélations fracassantes en même temps que les jumeaux et finit abasourdi par les nombreux uppercuts assenés par ce film coup de poing.
Cette approche elliptique intelligente, mêlant passé et présent, permet de suivre la quête des enfants dans la fournaise d’un pays du Proche-Orient défiguré par la guerre, tout en découvrant le destin tragique de leur mère. Cette quête familiale qui dévoile l’histoire d’une femme écrasée par le fanatisme religieux de son pays, permet également d’aborder la condition féminine à travers l’interprétation forte et bouleversante de Lubna Azabal. Si l’auteur ne donne pas de nom au conflit, il lui donne cependant un visage, celui d’une femme forte qui, tout comme les enfants, n’échappe pas à la cruauté de la guerre.
En situant l’action dans un pays imaginaire, le réalisateur canadien parvient à toucher à l’horreur intrinsèque du conflit tout en évitant tout parti-pris politique. L’universalité qui résulte de cette approche, permettra aux libanais, palestiniens, israéliens, syriens, chiites, chrétiens et musulmans de s’identifier au conflit, sans pour autant pouvoir émettre de réserves concernant sa réalité historique. Le résultat est un réquisitoire contre la guerre, qui invite à rompre le fil de la violence, pour que la violence n’engendre plus jamais la violence.