We are the providers

Publié le 11 juin 2009 par Gregory71

Les réseaux sociaux nous demandent de mettre à jour nos statuts selon un rythme de plus en plus rapide. Nous devons être actifs, alimenter le socius, pour pouvoir à notre tour observer la déferlante, c’est-à-dire l’empilement incessant des réponses à ce mot d’ordre. Il faut que cela coule, qu’une phrase en chasse une autre comme dans le déséquilibre de la marche. Générosité? Narcissisme? Grégarité? On peut analyser cette exigence d’un point de vue technologique, mais on aurait tort de se limiter à ce point de vue qui resterait instrumental et qui sous-estimerait l’impact existentiel.

Lorsque Facebook, avec son angélisme politique (on ne peut qu’aimer sur Facebook), nous demande d’alimenter la vie du site en inscrivant des fragments de nos vies supposées dessus, cette alimentation bouleverse nos existences. Les artistes de la performance des années 70, et en tout premier lieu Dan Graham avec « Past Future Split Attention » (1972), ont largement problématisé les structures langagières performatives, « Quand dire c’est faire ». En est-il autrement sur Facebook quand croyant inscrire ce qui se passe dans nos vies, nous vivons sur Facebook et nous observons dans une boucle inchoative cette autoactivité?

Alimenter un réseau social est une question politique. Elle concerne la manière dont les discours s’élaborent, dont chacun se présente aux autres, dont chacun peut observer les autres. Elle configure la relation du public et du privé pour coder et décoder le socius, de quelles façons ça coule ou ça s’arrête de couler. Tout un peuple vit sur Facebook, observe son prochain connu ou moins connu. Le langage y est intégralement impliqué. Modifier et montrer les limites critiques des conditions de ce transfert (ma vie, mon clavier, mon réseau social) est l’objet de « I would have liked to be one of you / J’aurais aimé être un d’entre vous » (2009) et d’autres travaux du même ordre « Feed Me » (2009) et « Becoming » (2009). Chacun pose le circuit d’alimentation des réseaux sociaux et essayent de l’automatiser en partant du principe que le réseau se nourrit de lui-même (élaborer une catégorie de netart nommée eat myself).