Le discours est de plus en plus rôdé et connu, au point qu’il nous semble (un peu trop à mon goût, on l’aura deviné) familier. On arrive assez vite, sans grande surprise en vérité depuis que Sarkozy est passé par là, aux thèses les plus discutables de la colonisation islamique de l’Europe, du prétendu choc des cultures et de la nécessité de nous défendre contre une menace invisible et sournoise… Une menace si grande qu’elle envahit tout leur horizon et que seuls des inconscients comme nous, aveuglés idéologiquement, trop gauchistes ou réputés trop bien pensants peuvent ignorer. Il n’est pas rare alors de se voir taxé de collabo, selon un curieux inversement de rhétorique et de retournement du sens de l’histoire qui oublie bien vite que la chasse à l’étranger n’était pas du côté de la gauche d’aujourd’hui, mais des fachos d’hier, desquels ils participent.
Ciotti fait indubitablement partie de cette droite obsessionnelle là, tant il représente à lui seul la caricature de tout ce que la France compte d’esprits mesquins et bêtement nationalistes, à l’heure où la notion devrait être en voie de dépassement. Ainsi, depuis que le gouvernement hollandais a décidé de revenir sur les critères de nationalisation de Guéant, cette droite populiste à défaut d’être populaire ne cesse de nous inonder de ses relents xénophobes et autres délires de colonisation islamique. Sans aller jusqu’à cette extrémité coupable que seuls le FN et la droite popualire peuvent se permettre publiquement, on assiste à la livraison en saccade et à jets continus de la part de l’UMP en ce moment de leurs éléments de langage rabattus selon lesquels, entre autre, le gouvernement, réputé de gauche, flatterait sa clientèle électorale : les étrangers. Basse besogne qui ne relève pas vraiment le niveau du débat politique dans l’hexagone…
Nous contribuerions par cette politique suicidaire à « brader notre nationalité »… Celle-ci serait-elle devenue subitement si enviable que nous aurions à la défendre, à l’heure de la désindustrialisation, des charrettes de licenciements qui s’accélèrent, d’un chômage grandissant et d’une précarisation prononcée ? Sans parler, justement, de ce petit refrain si déplaisant qui en dégoûte plus d’un malgré la propension des autres à le ressasser, sur ces étrangers qui viennent manger le pain des français. Lorsque le boulanger sera arabe, pour convoquer un sketch connu, cela nous fera une belle jambe…
Le simple fait de réduire l’immigration à ceux que l’on nomme familièrement « les arabes » est déjà significatif d’une volonté de stigmatisation qui tord la réalité à son profit, là où elle se révèle bien plus disparate et merveilleusement colorée. Et je suis bien plus fier d’être français en me sentant l’élément parmi d’autres de cette réalité colorée là que de celle d’une identité française qui se réduirait aux bourgeois blancs catholiques et de droite. Et qui n’aime pas les arabes, on l’aura bien compris. Cette France là n’est pas la nôtre.