On lit ou on entend parfois, sur différents médias, sur différents sites, l'un ou l'autre militant socialiste fanfaronner suite à la victoire de son Parti et de son candidat. Et c'est, effectivement, une belle victoire : toute la France, maintenant, est officiellement socialiste, depuis son président jusqu'au plus profond de ses campagnes. Et pour le militant fanfaron, quel bonheur !
Car c'est effectivement un vrai bonheur de savoir que le Camp du Bien a retrouvé les manettes du pouvoir. L'écart entre les riches et les pauvres va diminuer, le chômage va disparaître, le bonheur va s'infiltrer à nouveau dans toutes les strates de la société desquelles il avait été chassé par les sbires néfastes de Sarkozy. On ne peut donc, à l'instar de ces frétillants militants, que se réjouir du retour aux affaires du socialisme pur et dur.
D'ailleurs, pour rassurer le frétillant militant qui reste persuadé d'avoir gagné quelque chose avec l'arrivée des socialistes officiels, on pourra rappeler que les quelques semaines au pouvoir de Hollande et Ayrault auront permis de modifier légèrement les textes concernant la retraite qui, en pratique, reste à 62 ans pour la grosse majorité des gens, mais que l'appui d'une presse toute acquise à la cause hollandiste permet de faire passer à 60 ans auprès d'une opinion publique menée par le bout du nez. Même chose avec le fabuleux coup de pouce du SMIC, qui permet d'inonder les bénéficiaires de plus de 20€ net par mois, cette abondance soudaine étant singulièrement calmée par l'effritement du pouvoir d'achat lié à l'inflation et l'avalanche de taxes nouvelles. À ces magnifiques victoires fort pastel, on peut bien sûr rajouter les promesses d'embauches multiples, généreuses et pas financées, qui donnent une bonne idée de la nature artificielle de l'euphorie dans laquelle baigne une partie de l'électorat. Et à côté de ces artifices, on peut enfin ajouter les mesures démagogiques, parfaitement concrètes quant à elles, comme le blocage des loyers, la lutte contre la prostitution, le mariage homosexuel ou encore un droit à l'euthanasie, au coût sociétal impossible à évaluer même si l'impact budgétaire est pour le moment mineur.
Maintenant, même au milieu de ce tourbillon de joie, cela n'empêche pas de regarder d'un peu plus près ce qui est mis en place actuellement. Bien sûr, le militant frétillant aura beau jeu de pointer que ces remarques ne sont que le fait d'individus aigris par une amère défaite. Le libéral, lui, ayant eu la présence d'esprit de ne voter pour aucun des bouffons qui se présentaient, ne se sent guère concerné par ces batailles d'égos.
Mais force est de constater qu'en l'espace de quelques semaines (deux mois et demi, tout au plus), on a déjà une assez bonne idée des curseurs sur lesquels l'actuel gouvernement veut agir ; on a bien compris que l'austérité n'était pas le genre de changements qu'il désirait et en conséquence, les nécessaires marges budgétaires pour faire face à une crise d'une violence déjà palpable seront dégagées en augmentant les rentrées fiscales. Autrement dit, à peine arrivé au pouvoir, le gouvernement a multiplié les ajustements fiscaux avec une augmentation et extensions de plusieurs taxes et redevances (sur les produits pétroliers, les dividendes, les achats en ligne, les transactions financières, etc.) ; on comprend que ce n'est que le début, et qu'en plus de la création de nouvelles ponctions innovantes, les impôts existants, à commencer par la CSG et la TVA, vont aussi prendre une belle augmentation. Et même si des rebondissements rigolos au Sénat permettent parfois de gagner un peu de temps avant la pluie de coups, on sent bien que les droits de succession finiront par être durcis ; décidément, vivre en France coûte très cher, et y mourir deviendra bientôt exorbitant.
De façon indirecte, il n'aura pas fallu longtemps pour que les difficultés financières entraînent, par effet de bord, une crispation de certains tarifs : le prix du gaz, rapidement suivi de celui de l'électricité, va subir un ajustement notoire et pas vers le bas. Certes, cette augmentation n'est pas le fait du gouvernement, mais ces augmentations auraient été bien sûr moins douloureuses si elles n'étaient accompagnées des autres augmentations déjà citées.
D'autre part, la victoire des socialistes peut encore illusionner quelques irréductibles militants, on a quand même bien du mal à voir dans le président Hollande plus qu'un simple factotum poussé là par des contingences fortuites et l'entropie d'un système à bout de course. Je ne ferai guère de commentaires sur son tailleur, qui persiste méchamment à lui refiler des vestes de vigiles de Prisunic trop grandes pour lui, et me contenterai de rappeler que le pauvre Majordome Officiel de la République se fait trimbaler sans panache d'un sommet à une cérémonie officielle, avec ces hésitations pataudes qui donnent un petit cachet Mr. Bean à chacune de ses apparitions ; en l'espace de quelques semaines, la France est passée d'agaçante donneuse de leçons avec son président aux allures de chihuahua cocaïnomane à un pays de seconde zone dont l'avis n'est ni entendu, ni même écouté et dont les autres dirigeants se moquent en douce.
Au plan intérieur, entre une nième repentance et des gesticulations hystériques et parfaitement stériles voire néfastes, on peut bien sûr se frotter les mains en criant chouette aussi fort que l'on peut, on a là encore bien du mal à y trouver son compte. D'autant que Sa Frétillance Montebourg va pouvoir continuer à se montrer à la télé et à se monter le bourrichon tout seul puisqu'après PSA, on note déjà quelques autres sociétés dans l'embarras :
- Alcatel se dirigerait vers quelques milliers de suppressions de poste.
- Sanofi s'apprête à restructurer ses activités avec un impact sur l'emploi (de plusieurs milliers de personnes, probablement).
- Air France devrait éliminer plus de 5000 postes...
- SFR, Bouygues, Orange utiliseront quant à eux le prétexte Free pour réduire la voilure de plusieurs milliers de postes aussi.
On peut ajouter Hewlett-Packard (520 postes) ou Conforama (288) et encore d'autres, plus ou moins grands (par exemple, les difficultés de Doux entraînent à leur tour des faillites et des problèmes chez ses sous-traitants, à l'instar des fournisseurs de PSA qui vont aussi droit vers la tourmente), mais on final, on comprend bien que toute l'activité industrielle française est en train de se contracter à une vitesse jamais observée auparavant. En 2009, on avait déjà noté une contraction importante avec la première vague de la crise. Cette seconde semble bien plus forte et bien plus profonde.
Bien évidemment, ces fermetures et restructurations ne sont pas le résultat direct des bricolages entrepris depuis seulement deux mois par Hollande. Il est clair que ces licenciements sont dans les cartons depuis un moment. L'augmentation continue du nombre de demandeurs d'emplois montre bien que la tendance s'est installée depuis un moment.
Mais justement : les difficultés du pays sont clairement liées aux politiques des dernières années, qui ont toutes été orientées de la même façon, à savoir accroissement du coût du travail, redistribution forcenée voire hystérique et rage taxatoire sans frein, injection massive de pognon "gratuit" dans des domaines où on peine vraiment à voir le retour sur investissement. Et absolument tout ce que font Hollande et le gouvernement Ayrault, c'est continuer ou accélérer cette tendance, sans se gêner et d'autant plus que tous les médias et tout l'appareil politique applaudissent des deux mains.
Et pendant que le militant socialiste frétillant de joie à l'idée de sa victoire oublie fort commodément le restaurant le Laurent, les jets privés Tulle - Paris et les affaires de couples fort inopportunément twittées et retwittées, l’État continue donc sur exactement la même voie que lors du précédent quinquennat. La belle victoire que voilà ! Le joyeux militant, comme tout le reste du peuple français, votants ou abstentionnistes, socialistes, sympathisants ou opposants, tous vont devoir maintenant supporter la tempête qui s'annonce déjà majeure.
Et lorsque l'ouragan s'abattra, quel militant pourra encore frémir de plaisir alors que la situation va passer d'exécrable à catastrophique ?