Harcèlement criminel envers une personne associée au système judiciaire

Publié le 30 juillet 2012 par Veritejustice @verite_justice

 Le harcèlement criminel envers une personne associée au système judiciaire

Bien que les personnes associée au système judiciaire peuvent être confrontées à des situations qui leur semble intimidantes, il faut faire la preuve de l’intention criminel de l’accusé.

Dans cette affaire le défenseur est accusé d’avoir, dans l’intention de provoquer la peur chez une personne associée au système judiciaire en vue de lui nuire dans l’exercice de ses attributions, fait usage de violence envers une personne associée au système judiciaire, commettant ainsi l’acte criminel prévu à l’article 423.1  ainsi que d’avoir proféré des menaces de causer la mort ou des lésions corporelles à un policier commettant ainsi l’acte criminel prévu à l’article 264.1(1)a)(2)a) du Code criminel.

[32] Les reproches que la poursuite fait à l’accusé sont de s’être avancé sauvagement, de façon intimidante et menaçante, d’avoir dit à l’agent Gallo qu’il haïssait la police, surtout lui, d’avoir en quelque sorte invité l’agent Gallo à le confronter en prononçant les paroles suivantes: «tu viendras quand tu travailleras pas, on va régler ça» et d’avoir mimé le geste d’armer une arme à feu en pointant son «arme» vers l’agent Gallo, tout en prononçant les paroles suivantes: «j’ai pas besoin de police, je suis armé moi».

[33] Par ailleurs, dans son témoignage, l’agent Gallo a expliqué que le 3 février 2010, la situation était particulièrement tendue à Montréal-Nord, car l’un des policiers impliqués dans l’affaire Villanueva devait témoigner ce jour-là à l’enquête du coroner. Il dit s’être senti intimidé et menacé et qu’on voulait l’empêcher de faire son travail.

[34] La position de la défense est la suivante, particulièrement quant au geste de l’accusé qui mime l’arme à feu en prononçant les paroles que l’on connaît : elle soutient que lorsque l’agent Gallo a demandé à l’accusé quel était son problème, et qu’il a dit à l’accusé que si jamais il avait besoin de la police, elle serait là pour lui aussi, il l’avait invité à s’approcher et discuter.

[35] Pour la défense, c’est en réponse à cette «offre» de Gallo que l’accusé aurait mimé l’arme à feu et prononcé les paroles signifiant ainsi que si jamais, dans l’avenir, il avait des problèmes, il n’aurait pas besoin de la police, car il est armé. Selon le procureur de la défense, cette théorie est au moins tout aussi plausible que celle avancée par la poursuite. Dans le contexte, les paroles et les gestes de l’accusé ne constitueraient donc pas des menaces de causer la mort ou des lésions corporelles. Je souligne que l’accusé n’a pas présenté de défense.

[36] Dans R c. Clemente, 1994 2 RCS 758, l’honorable juge Cory explique ainsi le fardeau de la poursuite :

Sous le régime de la présente disposition, l’actus reus de l’infraction est le fait de proférer des menaces de mort ou de blessures graves. La mens rea est l’intention de faire en sorte que les paroles prononcées ou les mots écrits soient perçus comme une menace de causer la mort ou des blessures graves, c’est-à-dire comme visant à intimider ou à être pris au sérieux.

Pour décider si une personne raisonnable aurait considéré les paroles prononcées comme une menace, le tribunal doit les examiner objectivement, en tenant compte des circonstances dans lesquelles elles s’inscrivent, de la manière dont elles ont été prononcées et de la personne à qui elles étaient destinées.

De toute évidence, des paroles prononcées à la blague ou de manière telle qu’elles ne pouvaient être prises au sérieux ne pourraient mener une personne raisonnable à conclure qu’elles constituaient une menace.

Un peu plus loin

[42] Mais dans les circonstances, tenant compte du contexte, étant donné que les paroles prononcées par l’accusé peuvent avoir plusieurs significations, dont une qui n’est pas visée par l’article 264.1, l’accusé doit bénéficier du doute raisonnable. L’accusé est donc acquitté du chef 2.

[43] En terminant, compte tenu de l’ensemble des circonstances, même si le Tribunal avait analysé les deux incidents globalement, la même conclusion se serait imposée: il ne s’agit pas de menaces de mort ou de causer des lésions corporelles au sens de l’article 264.1 du C.cr.

L’intégral du jugement est disponible ici: Jugement