Retour sur expérience(s). La Wii de Nintendo continue de décliner allègrement son programme de la « vie réelle » : après le jeune couple accro au tennis, la bande d’adolescents, le couple de séniors, voici de nouvelles saynètes publicitaires : le grand père et son petit-fils - motif longtemps préempté par les bonbons au caramel d’exception - et la bande de quadras qui joue le destin d’une soirée sur une partie de bowling. Les spots proposent une mise en situation systématique et on ne peut plus prosaïque : un séjour, un canapé, une poignée de protagonistes. Pourtant l’évidence n’est que de façade, comme l’illustre un détail tout aussi récurrent : la caméra filme majoritairement non pas de dos mais de face. Les joueurs sont le vrai spectacle.
Mais quel spectacle au juste ? Celui du relationnel en action. La Wii a beau célébrer le sans fil, elle crée du lien. Elle est bien plus qu’un produit, elle est plus qu’une marque : elle est un média. Avec elle, on n’acquiert pas une console et des jeux, on n’achète plus un divertissement ludique : on achète du lien, à l’image de ce grand-père volant au secours de son descendant emprunté face au fairway virtuel. On délaisse la transaction pour la relation. Le jeu vidéo se réaffirme en tant qu’expérience partagée, il s’inscrit dans un contexte expérientiel et sublime ce dernier.
Alors que la concurrence, Xbox et PS3 en tête, rivalisent sur le terrain du réalisme, en se focalisant toujours plus finement sur le mimétisme avec le réel, le parti pris de Nintendo est de mettre en lumière moins l’offre que le contexte. L’objectif majeur n’est pas d’avoir l’illusion de faire du bowling, mais d’éprouver les sentiments que l’on éprouve lors d’une soirée de bowling entre amis. Pas d’être un professionnel - promesse de base des simulations virtuelles - mais au contraire d’assumer son statut de dilettante. Du coup, la Wii fait plus que se différencier : elle change de champ concurrentiel. Les marques qui savent et sauront se placer sur le terrain du lien vont prendre un avantage décisif. Car là se joueront certaines batailles dans les années à venir. Pour se dé-marquer et se faire re-marquer.