L'air du temps

Publié le 29 juillet 2012 par Malesherbes

Vous l’ignoriez sans doute mais nos industriels sont les seuls au monde à fabriquer tous leurs produits à partir de seulement deux composants, de la main d’œuvre et l’air du temps. Mes souvenirs d’école s’éloignent de plus en plus mais il me semble qu’il fallait également des matières premières, des fluides, du transport, des immobilisations, du capital, des services centraux, que sais-je encore. Je dois certainement me tromper car nos entrepreneurs semblent n’avoir qu’une solution lorsqu’ils ne parviennent à préserver ni leur chiffre d’affaires, ni leur marge, celle de réduire les coûts salariaux, ces sommes énormes versées aux braves ouvriers français, tellement plus coûteux que de non moins braves Roumains ou Bengalis, de surcroît beaucoup plus malléables.

Le fait qu’une meilleure performance du service achats, la définition de gammes opératoires plus efficaces, un contrôle plus strict des frais généraux, l’adoption d’une stratégie de produits mieux adaptée au marché, pourraient permettre de gagner les quelques points qui séparent la profitabilité de la déroute ne semble même pas venir à l’esprit de dirigeants aussi éclairés. En effet, la mise en œuvre de telles politiques est longue à produire ses effets, tandis que la suppression de postes, qui plus est paraît-il indolore parce que « sans licenciements secs », permet de réaliser presque immédiatement des économies. À force de réduire ainsi les coûts salariaux, gageons qu’ils parviendront à rééditer la prouesse de cet ânier qui, réduisant chaque jour la ration de foin de son animal, eut la désagréable surprise de le voir succomber juste au moment où celui-ci allait démontrer sa capacité à travailler sans s’alimenter.

Je suis bien conscient de ce que, dans le monde actuel, gérer une entreprise est un exercice très difficile mais, pour ne considérer qu’un seul exemple,je m’interroge à propos de nos deux constructeurs automobiles nationaux : comment se fait-il que PSA soit au bord de la faillite tandis que Renault parvient à rester bénéficiaire ? On est bien obligé de supposer que des dirigeants de l’entreprise en péril, les actuels ou certains de ceux qui les ont précédés, n’ont pas pris les bonnes décisions. Je ne suis pas qualifié pour les juger mais je ferais remarquer, dans un autre ordre d’idées, que lorsqu’un patron quitte ses fonctions, il peut percevoir des sommes au titre d’une clause de non-concurrence. Si tel était le cas de Philippe Varin, pense-t-on vraiment que Mercédès serait disposée à s’attacher ses services et qu’il faudrait le dédommager pour refuser une offre aussi hypothétique ?