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La mémoire des chaussettes

Publié le 28 juillet 2012 par Corboland78

Les chaussettes ne sont pas éternelles. Il faut dire qu’elles n’ont pas une vie facile non plus, coincée entre les doigts de pieds et l’intérieur de la chaussure, prises entre le marteau et l’enclume en quelque sorte, le frottement perpétuel finit par avoir le dernier mot et la chaussette rend l’âme, sans un cri.

Jadis on les reprisait mais la technique s’est perdue, hâtivement oubliée par les femmes modernes encouragées dans cette défaite de la mémoire par les marchands de bas, mi-bas et chaussettes y voyant matière à profit. Ne croyez pas que je regrette cette époque, mes ripatons préfèrent les socquettes neuves aux vieilles raccommodées.

Ayant dû me séparer récemment de quelques paires de ces accessoires vestimentaires usés par la marche, j’ai fait mes emplettes pour reconstituer mon stock. Comme vous n’êtes pas sans le savoir, la taille de nos pieds est codifiée, ça facilite l’achat des chaussures ; inutile d’essayer toutes les godasses stockées dans le magasin du marchand, il suffit de se cantonner à celles de votre taille, mine de rien c’est un gain de temps appréciable, quand on y pense.

Pour les chaussettes, c’est la même chose. Quoique. Quoique, car si pour les chaussures vous achèterez la taille exacte correspondant à vos pieds, pour les chaussettes c’est un peu le flou artistique. Prenons mon cas – pourquoi taper sur un innocent, alors que je peux faire l’affaire – je chausse du quarante-deux, donc j’achète des pompes de cette taille. Mais pour les chaussettes, le marchand vous les vend en taille 39/42 ! Je parle des chaussettes ordinaires en vente dans les magasins ordinaires pour les gens ordinaires comme moi.

Qu’un pied de taille 39 entre dans une chaussette de taille 42, pourquoi pas, mais l’inverse est donc possible ? Cette constatation fut une révélation pour moi, la première fois que j’en pris conscience. Mon pied (42) entrait effectivement dans la même chaussette pouvant accueillir un arpion de 39. Comment se peut-ce ?

Il est vrai qu’au premier enfilage, le membre peine à trouver la place nécessaire à son épanouissement, sans forcer il faut quand même y aller mollo pour atteindre le fond. De même pour en ressortir. Après quelques séances, l’un et l’autre trouvent leurs marques, la socquette est prête à accepter sans broncher la pénétration. Le panard a enfin trouvé chaussette à son pied. C’est un peu comme si les chaussettes avaient une mémoire, une fois qu’elles ont compris qui était leur maître, elles le reçoivent avec plaisir.   


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