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[AVANT-PREMIERE] C’est d’une attaque au marteau dont il fut la victime durant son adolescence que le cinéaste irlandais Ciarán Foy s’est inspiré pour bâtir son Citadel, petit film de genre roublard et efficace. Roublard, parce qu’il ne dévoile jamais complètement ses intentions (réalité? Fiction?). Efficace, parce qu’il vous scotche durablement à votre siège, dopé par une tension maximale maintenue du début à la fin. Tout débute dans un couloir d’immeuble, alors que Tommy et son épouse enceinte rendent les clés de leur appartement. Le jeune homme, impuissant, assiste alors à la terrible agression de sa femme derrière la vitre d’un ascenseur bloqué. Trois jeunes cagoulés lui enfoncent une seringue dans le ventre et l’abandonne, quasi morte, avant de s’enfuir. Pour Tommy, c’est le début d’un enfer d’agoraphobie paranoïaque. Traumatisé par la violence de l’assaut, et convaincu que le gang en veut à son enfant, il voit partout les agresseurs. Dans le bus, derrière sa porte, dans les tunnels d’une ville irlandaise en perdition. Cauchemar éveillé ? Délire de persécution ? Métaphores de ses propres démons ? Les trois à la fois, nous dit Citadel.
Les créatures adolescentes, véritables monstres-tueurs armés et voraces, s’imposent alors en symboles métaphoriques. Ce sont, d’un côté, les laissés pour compte d’une société ; de l’autre, la matérialisation des peurs effroyables du héros. Un pied dans le film de genre (furieux zombies, survival crépusculaire), l’autre dans le thriller psychologique (comment vivre après une attaque ? Comment affronter ses peurs?), Ciarán Foy tire le meilleur de son acteur principal (Aneurin Barnard) et du concept (le cloisonnement, la perception). Son film érige une sorte de double huis clos symbolique, qui se déroule à la fois dans le cerveau malade du jeune père et dans l’immeuble désaffecté où se cachent les démons. L’immeuble, cette citadelle du mal de laquelle le personnage ne peut s’extraire, s’impose simultanément comme le lieu démoniaque, et celui de l’exorcisation. Dans un clair-obscur intéressant, au beau rendu visuel malgré le petit budget, Foy signe une œuvre originale, éprouvante, filmée au plus près des désolations et tourments.
Festival FANTASIA 2012 Montréal Sortie France: prochainement