J’ai découvert un livre au style particulier car le narrateur n’a qu’une dizaine d’années et un parler enfantin, franc et sans détour.
De la ponctuation manquante, des phrases longues comme elles peuvent venir de la bouche d’un enfant, une analyse des situations touchantes et pleine de réflexion malgré tout.
Momo, « enfant de pute » comme il se décrit, vit chez Madame Rosa, une vieille femme juive accueillant des « enfants de putes » abandonnés par leurs mères, et se lie d’amitié et d’amour pour cette femme « grosse et laide » qui l’élève comme sa mère. Une femme hantée par ses souvenirs de déportation, terrorisée à l’idée de voir l’un de ses « enfants » emmené par l’Assistance public et qui va voir sa vie changer par des ennuis de santé. Une sénilité entrecoupée de moments de lucidité va peu à peu l’empêcher de sortir de chez elle et une solidarité de voisinage va petit à petit s’opérer autour de cette femme au passé unique. Momo tente de comprendre les injustices de la vieillesse et s’occupe de Madame Rosa tel un fils. Sensibilité unique qui se dégage de ce livre de par la vision jeune du narrateur qui découvre la vie, ses insouciances, ses peines et son amour immodéré pour une femme qu’il veut accompagner jusqu’au bout.
Cet enfant sans passé, sans famille, va évoluer dans un monde « de putes » et de « proxynètes », un monde où toutes les religions se côtoient, où les fins de mois sont difficiles et où l’amour prend une place infinie dans le cœur de cet enfant et de cette femme.
Une lecture émouvante qui m’a étonnée de pages en pages et qui mérite d’être connue.
Bonne lecture !
Mon meilleur passage :
« La première chose que je peux vous dire c’est qu’on habitait au sixième à pied et que pour Madame Rosa, avec tous ses kilos qu’elle portait sur elle et seulement deux jambes, c’était une vraie source de vie quotidienne, avec tous les soucis et les peines. Elle nous le rappelait chaque fois qu’elle ne se plaignait pas d’autre part, car elle était également juive. Sa santé n’était pas bonne non plus et je peux vous dire aussi dès le début que c’était une femme qui aurait mérité un ascenseur.
Je devais avoir trois ans quand j’ai vu Madame Rosa pour la première fois. Avant, on n’a pas de mémoire et on vit dans l’ignorance. J’ai cessé d’ignorer à l’âge de trois ou quatre ans et parfois ça me manque. »