Une nouvelle fois cet été, la formule du cocktail martien devrait être mondialement appréciée : une belle part de suspense avec une pointe de risque ; une grosse dose d’émotion et d’aventure sur un zeste d’exploration de l’inconnu. Et, cerise au bout de la pique, un enchaînement d’événements implacables qui amèneront la mission Mars Science Laboratory à s’écraser ou à se poser en douceur sur Mars, le 6 août au matin. Le tout servi par des machines à communiquer — le JPL et la Nasa — rodées à la diffusion massive et sans réserve d’images, de sons et de données accessibles à tous sur Internet.
Il faut dire que le débarquement de la sonde Curiosity sur la planète rouge est une formidable étape, nouvelle et supplémentaire, dans l’effort conduit par les États-Unis depuis des décennies pour l’exploration de ce monde. Cette “Twingo à moteur atomique”, après de délicates manœuvres de descente au sol, doit poursuivre la quête entamée en 1976 par les deux sondes Viking. Ces deux pionnières cherchaient la vie ; le robot d’aujourd’hui se concentrera sur les conditions passées d’habitabilité. Mais cette fois, la mission est mobile et peut se déplacer sur de grandes distances. Elle est lourdement équipée d’instruments scientifiques sophistiqués dont certains sont réalisés et pilotés par des chercheurs français. Le site d’atterrissage n’a pas été choisi au hasard. C’est dans les argiles du cratère Gale, au pied des pentes abruptes du mont Sharp, qu’existeraient les meilleures chances de trouver des indices de vie passée…
Bref, Curiosity est la mission idéale qui, si on y prend garde, peut laisser penser qu’en matière d’exploration robot de la planète rouge, tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes. Ce qui n’est pas vrai ! Elle est la dernière grande mission martienne financée par les États-Unis, qui s’interrogent ouvertement sur les raisons et les moyens de leur soutien futur à ce type de programme scientifique. En se désengageant de leur participation au projet européen de sonde ExoMars (qu’il met en difficulté) et en réduisant drastiquement les crédits des missions vers la planète rouge, l’Amérique indique clairement — au grand dam des planétologues et des fans de l’exploration du Système solaire — que ses priorités ont changé. Curiosity aura fort à faire pour inverser la donne ; raison de plus pour apprécier l’exploit.
Alain Cirou
Directeur de la rédaction
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