RE(FLUX) n’est pas une mixtape. RE(FLUX) est un revue « passé, présent, futur » de disques que l’on ne peut se résoudre à passer sous silence. RE(FLUX) est une publication hebdomadaire changeant de mains et d’optique à chaque numéro. RE(FLUX) à vocation à être sommaire, partiel et subjectif. RE(FLUX) n’est pas une mixtape, mais peut s’écouter – en fin d’article – comme une mixtape.
RE(FLUX) 4
Haleek Maul – Oxyconteen (Merok Records, 2012)
Haleek Maul (lire) est un rappeur à peine âgé de 15 ans et originaire de la Barbade. Sur son île, il préfère la fraicheur de sa chambre d’ado au soleil qui la surplombe. C’est d’ailleurs volontairement cloisonné dans cette dernière que le jeune prodige se fait doucement un nom grâce à internet et aux réseaux sociaux. Remarqué par Clams Casino puis par le légendaire King Britt, il fait rapidement ami-ami avec le patron de Disaro qui le connecte avec la fine fleur des producteurs de Chicago (The-Drum, Supreme Cuts). Oxyconteen, son premier Ep sorti au mois de juin chez Merok Records, rassemble donc en 6 morceaux d’une rare maturité stylistique le résultat de ces rencontres virtuelles. Mais au-delà de la qualité intrinsèque de la mise en son, c’est essentiellement le regard extrêmement lucide porté par le gamin sur sa propre génération codéinée qui nous étonne.
SpaceGhostPurrp – Mysterious Phonk (4AD, 2012)
SpaceGhostPurrp (lire) fait parti du RVIDXR KLVN (Raider Clan), crew basé en Floride et qui à l’instar du collectif Odd future en Californie s’efforce avec nonchalance de débarrasser le hip-hop de son amoncellement de poussières voire de ses préoccupations d’antan et par dessus le marché, de rendre la musique moderne elle-même plus attrayante. Il n’est pas donc anormal de voir ces artistes signés par des labels à l’aura plus large. Sorti d’ailleurs chez 4AD, Mysterious Phonk permet même à la légendaire maison londonienne de retrouver de sa superbe en embrassant à nouveau l’esprit classieusement sombre de ses débuts. Cohérent, envoutant et consistant, Mysterious Phonk est au-delà de sa qualité musicale, l’album d’une génération. Celle là-même qui, libérée politiquement après l’élection d’Obama, peut enfin se regarder sans crainte dans une glace mais y voir désormais se refléter l’état de désœuvrement dans lequel à sombrer son âme.
Blue Sky Black Death & Nacho Picasso – Exalted (BSBD Music, 2012)
Le rappeur de Seattle et la paire de beatmakers que forment Kingston et Young God au sein de Blue Sky Black Death ne se quittent plus et c’est tant mieux. Quelques semaines après nous avoir aguiché avec l’excellent Lord of the Fly (lire), voilà qu’ils remettent le couvert et nous balancent une jolie mixtape qui évite l’écueil de l’écœurement grâce à des productions bigarrées et soignées et au flow toujours maîtrisé et aussi second degré de Nacho Picasso.
EL-P – Cancer of Cure ( Fat Possum, 2012)
Bigg Jus – Machines That Make Civilization Fun (Laitdbac/Mush, 2012)
Comment ne pas lier ces deux albums. D’abord parce qu’EL-P et Big Juss étaient la colonne vertébrale des légendaires Compagny Flow. Qu’après la dissolution du mythique groupe du Queens, les deux comparses ont poursuivi parallèlement leur carrière, chacun tentant d’emmener avec plus ou moins de réussite le rap indé au-delà de la seule reconnaissance du milieu. D’abord un temps en tant que patron de label, Def Jux pour l’un et Sub Verse pour l’autre, puis en s’essayant ici et là à sortir quelques disques sous leur propre nom mais sans jamais pouvoir véritablement retrouver les sommets artistiques qu’ils connurent ensemble sur l’incomparable Funcrusher Plus. A en croire certain, le rap est enfin sorti depuis peu de sa léthargique torpeur et redevient peu à peu digne d’intérêt. Il n’est donc pas étonnant de voir ressurgir nos meilleurs vétérans, comme pour mieux signifier au monde que sans eux cette nouvelle génération ne seraient pas là . Seulement et malgré de louables efforts, ces deux albums n’apportent rien de nouveau au genre mais ne déçoivent pas pour autant. Tous deux inégaux, ils nous épuisent par leur longueur et leurs trop nombreuses lourdeurs expérimentales. Néanmoins le propos est toujours intelligent et cinglant et la verve des deux New-yorkais toujours aussi magistrale.
Ryan Evans – Here (Self-Released, 2012)
Ryan Evans est un beatmaker blanc du New Jersey dont les productions sont dans leurs atmosphères comparables à celles de Clams Casino ou XXYYXX, instigateurs malgré eux d’un courant que certains aiment à qualifier de « Cloud beat ». seulement avec Her sont dernier ep en téléchargement libre via son bandcamp, le jeune producteur s’efforce de balayer les nuages menaçants qui faisaient planer le doute sur l’intérêt de ce courant à se suffire à lui-même.
Mixtape
1.SpaceGhostPurrp – The Black up
2.Haleek Maul – 88
3. Blue Sky Black Death & Nacho Picasso – 4th Of July Feat. Jeremy Cross
4.Ryan Evans – Babbling
5.Bigg Jus – Empire Is A Bitch
6.EL-P – Drones Over Bklyn