C'est au Journal officiel du 21 juillet 2012 qu'a été publié le décret n° 2012-894 du 20 juillet 2012 relatif à l'évolution de certains loyers (JORF n°0168 du 21 juillet 2012 page 11956).
Un décret d'application de l'article 18 de la loi du 6 juillet 1989
Il convient de noter que ce décret est pris en application de l'article 18 pris en application de l'article 18 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n°86-1290 du 23 décembre 1986.
Pour être tout à fait juste, un décret n° 2011-1017 du 26 août 2011 relatif à l'évolution de certains loyers dans l'agglomération de Paris avait déjà été pris pour l'application de l'article 18 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989. Toutefois, comme son titre l'indique, ce décret ne concernait que Paris et sa banlieue lorsque le décret publié ce jour concerne un plus grand nombre de collectivités.
L'article 18 de la loi du 6 juillet 1989 dispose :
"Dans la zone géographique où le niveau et l'évolution des loyers comparés à ceux constatés sur l'ensemble du territoire révèlent une situation anormale du marché locatif, un décret en Conseil d'Etat, pris après avis de la Commission nationale de concertation, peut fixer le montant maximum d'évolution des loyers des logements vacants définis au b de l'article 17 et des contrats renouvelés définis au c du même article.
Ce décret précise sa durée de validité qui ne peut excéder un an et peut prévoir des adaptations particulières, notamment en cas de travaux réalisés par les bailleurs ou de loyers manifestement sous-évalués".
Ainsi, la loi du 6 juillet 1989 fixe plusieurs conditions à l'encadrement des loyers
- cet encadrement ne peut concerner que des zones géographiques déterminées et non tous les territoires français
- une "situation anormale du marché locatif" doit être identifiée dans ces zones
- un montant maximun d'évolution des loyers peut ainsi être défini, ce qui ne permet donc pas un gel pur et simple des loyers
- les premières locations et les renouvellements de contrats de location sont visés.
A noter, il s'agit bien d'une mesure d'encadrement de l'évolution des loyers et non d'une mesure interdisant toute hausse des loyers, mesure, de plus, limitée dans le temps.
Une mesure limitée dans le temps
A la suite de cet article 18 de la loi du 6 juillet, le décret du 21 juillet 2012 fixe les conditions d'évolution des loyers des logements vacants ou des loyers renouvelés. Toutefois, conformément à la loi du 6 juillet 1989, cette mesure d'encadrement est d'un an maximun à compter de son entrée en vigueur.
L'article 8 du décret précise sur ce point :
"Le présent décret entre en vigueur le 1er août 2012. Le décret n° 2011-1017 du 26 août 2011 relatif à l'évolution de certains loyers dans l'agglomération de Paris, pris en application de l'article 18 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, est abrogé à compter de cette même date".
La mesure d'encadrement des loyers s'applique donc du 1er août 2012 au 1er août 2013.
Deux hypothèses principales sont visées : celle des logements vacants remis à la location et celle du renouvellement de bail
L'encadrement du loyer des nouveaux contrats de location des logements vacants.
L'hypothèse de la relocation du logement vacant est visée à l'article premier du décret du 20 juillet 2012 :
"Lorsqu'un logement vacant tel que défini au b de l'article 17 de la loi du 6 juillet 1989 susvisée fait l'objet d'une nouvelle location au cours des douze mois qui suivent l'entrée en vigueur du présent décret, le loyer ne peut excéder le dernier loyer appliqué au précédent locataire, révisé dans les limites prévues au d du même article 17".
S'agissant de la fixation du loyer d'un nouveau contrat de location, plusieurs conditions sont définies par le décret du 20 juillet 2012. L'article 2 du décret fixe les conditions, conformément à la loi de 1989, d'encadrement du loyer des nouveaux contrats de location :
"Par dérogation aux dispositions de l'article 1er, le loyer du nouveau contrat de location peut être réévalué dans les conditions et les limites suivantes :
a) Lorsque le bailleur a réalisé, depuis la conclusion du dernier contrat, des travaux d'amélioration portant sur les parties privatives ou communes d'un montant au moins égal à la moitié de la dernière année de loyer, la hausse du loyer annuel ne peut excéder 15 % du coût réel des travaux toutes taxes comprises ;
b) Lorsque le dernier loyer appliqué au précédent locataire est manifestement sous-évalué, la hausse du nouveau loyer ne peut excéder la plus élevée des deux limites suivantes :
1° La moitié de la différence entre le montant moyen d'un loyer représentatif des loyers habituellement constatés dans le voisinage pour des logements comparables déterminé selon les modalités prévues à l'article 19 de la loi du 6 juillet 1989 susvisée et le dernier loyer appliqué au précédent locataire ;
2° Une majoration du loyer annuel égale à 15 % du coût réel des travaux toutes taxes comprises, dans le cas où le bailleur a réalisé depuis la fin du dernier contrat de location des travaux d'amélioration portant sur les parties privatives ou communes d'un montant au moins égal à la moitié de la dernière année de loyer.
Le coût des travaux d'amélioration portant sur les parties communes à prendre en compte pour l'application du a et du b est déterminé en fonction des millièmes correspondant au logement en cause".
L'encadrement du loyer en cas de renouvellement du bail
L'article 3 du décret a trait à l'encadrement du loyer en cas de renouvellement du bail dans l'année à venir, avec, pour point de référence, l'indice de référence des loyers :
"Lorsque le contrat de location est renouvelé au cours des douze mois qui suivent l'entrée en vigueur du présent décret, il ne peut y avoir de réévaluation du loyer autre que celle résultant de la révision, aux dates et conditions prévues au contrat, ou d'une clause relative à la révision introduite dans le contrat lors de son renouvellement dans les limites de la variation de l'indice de référence des loyers".
L'article 4 du même décret précise qu'une réévaluation du loyer au moment du renouvellement du bail peut être réalisée "lorsque le loyer est manifestement sous-évalué", condition définie comme suit :
" Par dérogation aux dispositions de l'article 3, lorsque le loyer est manifestement sous-évalué, le bailleur peut le réévaluer sans que la hausse de loyer excède la plus élevée des deux limites suivantes:
1° La moitié de la différence entre le loyer déterminé conformément aux dispositions du c de l'article 17 de la loi du 6 juillet 1989 susvisée et le loyer appliqué avant le renouvellement du contrat de location, révisé dans les limites prévues au d du même article 17 ;
2° Une majoration du loyer annuel égale à 15 % du coût réel des travaux toutes taxes comprises, dans le cas où le bailleur a réalisé depuis le dernier renouvellement du contrat de location des travaux d'amélioration portant sur les parties privatives ou communes d'un montant au moins égal à la dernière année de loyer. Le coût des travaux d'amélioration portant sur les parties communes à prendre en compte est déterminé en fonction des millièmes correspondant au logement en cause".
La commission départementale de conciliation
L'article 7 du décret rappelle le droit pour les preneurs et les bailleurs de saisir la commission départementale de conciliation, créée en 1989, en cas de litige relatif à la réévaluation du loyer. Une mesure utile qui permet de rechercher une issue amiable à un différend sans avoir à saisir un Juge.
" La commission départementale de conciliation prévue à l'article 20 de la loi du 6 juillet 1989 susvisée est compétente pour connaître des différends relatifs à l'application du présent décret. Elle peut être saisie et se prononce selon les modalités définies au même article 20."
Il est à craindre que l'existence de cette commission ne soit pas bien connue des locataires. C'est dommage car il s'agit sans doute d'un instrument utile, plus rapide et moins cher.
De manière générale et à la suite de ce décret notamment, il serait particulièrement utile de réfléchir au renforcement de l'information des locataires et des propriétaires sur leurs droits et devoirs et sur les moyens de les faire valoir. De la qualité et de la réception de cette information dépendra en partie l'effectivité de cette nouvelle mesure. Il est bien sûr trop tôt pour évaluer la portée de ce décret du 20 juillet 2012 : le bilan pourra être fait dans un an. Reste que la ministre en charge du logement a sans doute le mérite d'expérimenter une mesure déjà inscrite dans l'arsenal législatif avant d'attacher son nom à une nouvelle loi qui serait venue chasser la précédente avant même qu'elle ne soit appliquée.
Arnaud Gossement
avocat associé - Gossement avocats
www.gossement-avocats.com