La loi ACTA rejetée en Europe
Sur le web Par Vicente Ulive-Schnell le 25 juin 2012 06:00:42 - First articleLe Parlement Européen a voté contre la loi de régulation de contenus sur la toile, ACTA, la semaine dernière. C'est un revers historique pour cette loi qui pouvait changer à jamais nos pratiques sur Internet. Négociée à huis clos par plusieurs pays, dont les États-Unis, l'Europe et le Japon, elle était critiquée par l'eurodéputé David Martin, qui a soumis un texte à la commission demandant le rejet d'ACTA.
Malheur des uns, bonheur des autres : ce rejet a donné raison aux organisations et associations qui protègent la liberté et la privauté sur la toile, qui s'étaient mobilisées pour s'opposer à cette législation.
Comme nous avons expliqué ici, la loi ACTA prévoyait de contrôler et renforcer la lutte contre les biens physiques en contrefaçon, mais pas seulement : elle voulait aussi renforcer la lutte contre l'échange de données protégées par le droit d'auteur sur la toile.
Dans ce sens, elle aurait donné le droit aux états et aux services publics de lutte contre l'échange illégal, de fouiller les échanges électroniques entre les citoyens sans leur demander la permission. Nos courriers électroniques, sites web et de stockage d'information, auraient été surveillés sans notre consentement.
C'est pourquoi cette loi, très épineuse, avait été décriée par beaucoup d'activistes pour la liberté d'expression et la privauté des citoyens. Personne n'est contre le fait de lutter contre les sacs à main de contrefaçon, mais donner à la police le droit d'aller sur notre site web, normalement protégé par un mot de passe, et regarder tous nos échanges, aurait transformé la toile en état policier.
C'était une initiative effrayante, surtout lorsque nous regardons le rôle que la toile a joué dans les révolutions du "printemps arabe", par exemple. Hosni Moubarak avait même coupé tout l'Internet du pays à un moment ; qu'est-ce que les gouvernements les plus répressifs en matière d'Internet auraient fait avec carte blanche pour fouiller les données de citoyens ?
De même, les lois de contrôle des échanges et de lutte contre la violation du droit d'auteur, comme la loi Hadopi en France, n'ont servi à rien. Une poignée de malheureux a été poursuivie en justice pour marquer le coup, mais après ces arrestations arbitraires et hasardeuses, les échanges illégaux ont continué à exister normalement dans l'hexagone. Pis, puisque cette loi ne poursuit que les échanges en P2P (peer to peer), toutes les autres méthodes d'échange d'information ont explosé. Le résultat de la loi Hadopi en France est une loi inutile, qui ne protège personne de quoi que ce soit, et qui poursuit seulement les usagers le moins doués en matière d'Internet, qui continuent à se servir des systèmes P2P.
Ainsi, le rejet de cette loi est une bonne nouvelle pour tous. La lutte contre le "piratage" en Internet ne pourra aboutir qu'avec une discussion sincère et franche autour du droit d'auteur au vingt-et-unième siècle, d'abord. Si nos pratiques ont changé, les contenus, les droits et devoirs des utilisateurs et des maisons de disque doivent le faire aussi. Continuer à agir seulement d'un point de vue répressif ne va rien résoudre ; au contraire, cela donnera plus de pouvoir aux gouvernements anti-démocratiques de par le monde.