Contre une poétique du bibelot
Quels sont les moyens d’action positive auxquels, non risiblement, la poésie actuelle peut prétendre? Ou encore,
comment, dans la série des langages socialement efficaces, une certaine technique de la parole, quelque chose qui
soit (auto)déclaré poésie (ou qui semble en gros reconnaissable comme telle) peut dignement occuper une place?
Ces questions ont déclenché l’écriture de ce livre. Elles se posent d’elles-mêmes à tous ceux qui participent aujourd’hui à l’élaboration d’une poésie pratique, cherchant l’impact politique. Elles se posent encore à ceux qui
trouvent profondément ennuyeuse ou assez désespérante l’idée d’une poésie-parole-désamorcée, et qui, dès lors, attendent quelques hypothèses crédibles concernant la manière dont la poésie peut agir sur la vie pratique. Formuler ces hypothèses, en somme, ne revient pas à autre chose qu’à circonscrire et décrire les moyens (ou procédés déployés dans le cadre des pratiques poétiques) au regard des fins pragmatiques ambitionnées: il s’agit donc de bâtir une poétique pour certaines oeuvres modernes, celles qui affichent une intention d’agir, voire programment un processus d’action.