Rares sont les livres ayant l’aviation pour thème principal dont le format est compatible avec la plage. Mais quelques nouveautés n’en méritent pas moins de retenir l’attention au moment où débute ce qu’il est convenu d’appeler la trêve estivale.
** Perinotto, suite. - Voici, publié par Paquet, le deuxième «Art Book» de Lucio Perinotto. Un très bel ouvrage (la qualité de l’impression est irréprochable) qui présente un double intérêt : la énième confirmation du grand talent de ce peintre de l‘Air, en même temps que la grande diversité des œuvres présentées. Perinotto est associé, symboliquement, à l’image proche de l’hyperréalisme d’un Constellation survolant Manhattan, avec une maîtrise rare du bleu. Cette fois-ci, c’est une belle succession d’avions mythiques qui nous est soumise, en remontant le cours du temps, par exemple un Boeing 314 Clipper de Pan Am, un imposant Latécoère 631, un Dornier 24 ATT, que suivent Dewoitine D 338 et Focke-Wulf FW 200 Condor, Breguet Deux Ponts, Sud-Est SE 161 Languedoc et un magnifique Concorde. Ici et là se glisse une référence à la B.D., plus particulièrement à Black et Mortimer. Fort heureusement, le Constellation est bien là (Air France, TWA, Royal Air Maroc, Lufthansa) ainsi que la série des DC, dont un DC-3 survolant …Manhattan. Un sacré bouquin !
** Voltige. - Revoici Gilles Bordes-Pagès qui, cette fois-ci, a tourné ses objectifs vers l’équipe de voltige de l’armée de l’Air, nous offrant des images magnifiques, là aussi servies par une impression de très grande qualité (Nouvelles Editions de l’Université). C’est aussi, sans trop le dire, un bel hommage à un champion disparu tragiquement en 2010, Renaud Ecalle. L’Extra 330, 330 chevaux et capable d’encaisser 10 g, est très photogénique, sans que le lecteur ne risque de se lasser, aussi grâce à de belles rencontres lors de meetings aériens, y compris avec la Patrouille de France ou le Rafale dit des «30.000 heures».
On découvre aussi, grâce aux textes de Fabrice Camliti, commandant de l’EVAA, l’envers de décor, les entraînements, le monde des meetings et, en tournant les pages, on croit même percevoir le souffle des hélices.
** La BA 217. C’est de l’Histoire, avec majuscule et un brin de nostalgie, et un triple slogan, soutien, actions, essais : «Brétigny, base d’excellence», aux Editions Privat, sous la direction du colonel Olivier Fabre, avec des textes de Natacha Eijckmans. Brétigny-sur-Orge, dans l’Essonne, fut un haut-lieu de l’aviation française avant de rejoindre, récemment, le paradis des aérodromes militaires abattus en plein vol par de sévères contraintes budgétaires. De grands noms, doit-on le rappeler, ont animé Brétigny, né Brétigny-Plessis-Pâté à la fin des années trente.
Ses pistes accueillirent d’innombrables prototypes confiés au CEV, dont le premier directeur fut l’ingénieur en chef Maurice Cambois, à partir de 1945. En 1948, et pendant 10 ans, le Centre fut placé sous la responsabilité de Louis Bonte, dont chacun sait qu’il a marqué son temps. Une décennie où l’on vit au printemps 1955 Jacqueline Auriol préparer son record de vitesse (1.151 km/h) sur Mystère IVN. Et tous les grands noms des essais, parfois promis à la reconnaissance médiatique, mais souvent restés dans l’ombre parce que telle était la règle du jeu. On aurait aimé une plus grande présence de ces grands anciens dans ces pages. Mais c’est un livre bienvenu et utile.
** Témoignage. - Aux Nouvelles Editions Latines, Maurice Rochaix livre un témoignage sur son père Marcel, qui appartint au groupe de bombardement Bretagne. Lequel a largement contribué au rayonnement des Forces aériennes de la France libre avant d’être reconverti dans le transport. De tels récits sont indispensables au maintien de la mémoire collective et complètent utilement des ouvrages plus généraux.
** Saint-Ex. – Voici un fort ouvrage de plus de 500 pages dû à la persévérance de Bernard Marck, biographe attitré des grands aviateurs de l’entre deux guerres : «Antoine de Saint Exupéry, la soif d’exister». Saint Exupéry sans tiret, soit dit en passant, sujet de polémique réservé aux seuls spécialistes. C’est un premier tome, il y en aura donc un second, que nous attendrons patiemment avant de tenter un commentaire sur ce travail de longue haleine en même temps que très ambitieux.
Tout n’avait peut-être pas encore été dit sur le «pilote-écrivain». Reste le fait qu’il faut disposer d’une bonne dose de courage pour aborder un tel géant et lui consacrer un bon millier de pages. Et cela sans se risquer à choisir entre le pilote et l’écrivain.
Pierre Sparaco - AeroMorning