Mardi soir, pendant que je téléchargeais mon épisode de True Blood, j’ai lancé M6. D&Co au programme. Je me suis installée devant, et plus le show avançait, plus je me suis posée des questions sur le bien fondé de cette émission.
Sur le principe, que l’on apprécie ou non Valérie Damidot, je trouve ça plutôt cool. On prend des gens modestes ou en situation financière délicate, qui ont eu les yeux plus gros que le ventre en s’achetant des maisons de plusieurs centaines de m2, mais souvent en ruine. Dépassés par les travaux et les frais que cela engendre, ils appellent D&Co à la rescousse, qui vient tout leur refaire au frais de la princesse (enfin des sponsors) pendant 1 semaine. Les marques payent pour être présentes, filent des tas de cadeaux, et en échange, une pub d’enfer auprès de la ménagère qui rêvera de redécorer sa maison sur le modèle de Valérie et de ses équipes. C’est de la pub et du marketing, rien de choquant.
Sauf que ces gens modestes, mardi soir un veilleur de nuit et une femme au foyer avec 6 enfants, se retrouvent dans un lieu qui ne leur correspond plus du tout. Des pianos de cuisine à plusieurs milliers d’euros, des éclairages dans tous les sens, des salles de bains balnéo et végétales, et la cerise sur le gâteau : le jacuzzi. Vous en connaissez beaucoup vous qui ont des jacuzzi ? Aux alentours de 5000 euros pour les petits modèles, voici un cadeau fameux. Avec une capacité de 1000 litres, plus le système électrique nécessaire, imaginez la facture à la fin du mois. Et c’est bien ça qui me pose problème.
Tous ces jolis cadeaux (ou pas, mais je ne veux pas rentrer dans le débat des goûts de l’équipe D&Co), qui vendent du rêve à la TV, n’est-ce pas juste un poil trop ? Une famille qui ne peut pas se payer un pot de peinture blanche à Casto pour repeindre ses murs (parce que faut voir l’état des barraques avant que l’équipe ne débarque), peuvent-ils vraiment se payer l’utilisation et l’entretien d’un jacuzzi ? Et c’est valable pour le jardin et les autres pièces de la maison.
La phrase d’une adolescente en découvrant son nouvel intérieur, m’a mis la puce à l’oreille :
“Je crois que je ne m’y ferais jamais“.
C’est exactement ça. La déco est semi-imposée (on fait semblant de te demander ton thème. Surtout ne pas dire “les animaux”, sinon vous aurez le droit à une fresque murale et des pattes de chien sur votre moquette marron), ce sont bien les sponsors qui décident des produits et collection qu’ils veulent mettre en avant. Mais aussi en fonction des artisans qui acceptent le job, les 7 jours 24h/24 (bon il paraît que c’est extrêmement bien payé, plus la publicité également autour). Vous n’avez rien choisi, ni l’agencement, ni la déco, et Valérie non plus.
Alors certes, ces “pauvres gens” partent de tellement loin, que tout leur semble faramineux, et ne peuvent qu’être ébahi devant le travail, plutôt bluffant je l’avoue, effectué pendant 7 jours. Dingue. Un show à l’américaine, sur fond de je fais du karaoké (épouvantable) et de batailles de peintures. Mais vous vous imaginez, rentrer chez vous, ne rien reconnaître, perdre tous vos repères et poser vos valises dans une maison témoin d’un catalogue Ikéa sans âme ? Et en plus ça va vous coûter bonbon en entretien (car je demande aussi à voir les finitions… 3 mois après pas sure que le résultat soit aussi époustoufflant).
Un dernier point, d’actualité en ce moment. La justice. Est-ce vraiment si juste d’offrir à ces gens, pour certains aux RSA, des maisons dont la valeur dépasse de loin toutes celles alentours ? Je me rappelle d’ amis qui avaient contacté D&Co… Réponse : vous n’êtes pas assez modeste (en terme de revenus). La classe moyenne, celle qui ne peut pas non plus s’offrir des spas et des pianos de cuisine dernier cris, est trop riche pour D&Co. Par contre au lieu de se contenter d’offrir un confort décent aux gens modestes (une maison saine et décorée sans chichis), on leur offre des paillettes et du champagne, avec probablement pas mal de vices cachés.
Est-ce vraiment nécessaire, où est la justice la dedans ? Mais la TV ce n’est pas juste, c’est du spectacle, comme la politique.
Victoire.