par Arion
Le quarantième anniversaire de mai 68 va bientôt donner lieu à des caravanes d’analyses et de commémorations. Les vétérans de la grande carabistouille préparent la tournée-nostalgie de leur big bazar. Salut les copains !
Mais c’est au plan des mœurs que l’héritage de 68 est le plus âprement discuté. La plupart des slogans du joli mai concouraient à prêcher de « jouir sans contrainte », et pas seulement dans le « sea, sex and sun », mais dans les divers domaines du savoir, du vivre, du savoir-vivre. En fait, tout ce qui -de la grammaire à la politesse- invite à canaliser l’élan vital individuel, à l’endiguer, le structurer, le « sublimer » a été frappé d’infamie. Sans doute quelques hypocrisies furent heureusement balayées par la vague ; mais, pour l’essentiel, l’illusion lyrique des années soixante-dix et la fuite en avant des décennies suivantes touchent sous nos yeux à leur point d’aboutissement, peut-être de non-retour. Je ne vais pas m’appesantir sur tous les indices du déboussolement personnel et du déglinguage collectif. Sans taille ni tuteur, la plante humaine est pire que laide, pathétique. Des voix doctes osent ces temps-ci appeler d’urgence au rétablissement des repères, des limites ; à la réhabilitation du refus, du manque, de la frustration même : à la reconstruction du sur-moi. Seront-elles écoutées ? Le nouveau slogan à la mode sera-t-il, ironie du temps : « Il est interdit de ne pas interdire » ?
Good bye Dany. Bâcle-nous ton dernier petit tour, viens nous faire ton Ginger et Fred, une dernière fois, dans un Fellini plus amer que drôle. Puis quitte enfin la scène, toi et tes pareils. Il faut (et tant pis si Sarko paraît mal placé pour le dire…), il faut, oui, il faut enfin « liquider 68 ». On prétend qu’il est en train de s’évacuer tout seul, comme une longue colique. Souhaitons que ce soit avant le décès du malade.