L’envisager n’est pas le souhaiter, car le leader a prouvé jusqu’à présent qu’il est bien l’homme de la situation. Mais force est de reconnaître que depuis Liège les coups d’éclat concernant la conquête du maillot jaune ont été rares : démonstration des Sky et de Froome à la Planche des Belles-Filles, affirmation de Wiggins contre la montre, attaques de Nibali et Van den Broeck vers La Toussuire où Evans a connu un méchant coup de mou ! A part cela, rien ou presque : des chutes, des crevaisons à cause de clous sur la chaussée, la regrettable affaire Di Gregorio et des événements en marge du classement général (maillot vert, maillot à pois, dossard du plus combatif !) qui ont mis en évidence les qualités d’attaquants de Thomas Voeckler et Pierrick Fedrigo, mais aussi celles de Thibaut Pinot (22 ans) et Pierre Rolland (25). Une belle réussite pour le cyclisme français qui se reconstruit progressivement avec une nouvelle génération à laquelle appartiennent encore les prometteurs Tony Gallopin (24 ans), Arthur Vichot (23), Nacer Bouhanni (21 ans), le nouveau champion de France, Arnaud Démare (20), Adrien Petit (21) et quelques autres. Mais pour gagner le Tour…
L’ascension vers La Toussuire a montré toutefois que Wiggins n’est pas à l’abri d’un jour « sans » et que Froome a les qualités pour creuser des écarts en montagne. Mais pour l’heure, le Kenyan blanc est commis au rôle d’équipier de luxe, comme le furent LeMond pour Hinault en 1985, Indurain pour Delgado en 1988 et Ullrich pour Riis en 1996. Un rôle auquel il semble s’accommoder, selon la parole donnée au départ, malgré la frustration et le sacrifice personnel que cela représente.
Soumis à quelques accélérations bien appuyées, Wiggins connaîtrait-il un fléchissement important que Froome serait là pour assumer. En revanche, si le maillot jaune est en passe de gagner son pari, on ne voit pas Froome attaquer pour son propre compte et provoquer un crime de lèse-majesté. Ce serait prendre nos désirs pour des réalités et trop beau pour le spectacle !
Rendez-vous à Peyragudes.
Bertrand Duboux