Oignons, laitue, carottes, gombo, aubergine, choux, betteraves, haricots, tomates, concombres… autant de légumes que l’on ne s’attendrait pas forcément à voir pousser dans ce petit village du Sud du Mali, et qui pourtant poussent comme des petits pains : « pour notre seul jardin maraîcher, nous avons notamment récolté cette année plus de quatre tonnes d’oignons » explique fièrement Sayan Dansira, la Présidente du jardin de la Santé du village de Kokofata.
Cela fait 5 ans qu’Action contre la Faim (ACF) développe dans le sud du Mali ces jardins de la santé : ils sont plus d’une quarantaine aujourd’hui disséminés dans les zones rurales isolées et vulnérables. « Le premier objectif est d’améliorer le régime alimentaire des familles utilisatrices du jardin » explique AbaKar Cissé, animateur pour Stop Sahel et ACF dans la zone. « Mais beaucoup d’autres avantages et objectifs découlent également de ces jardins : ces cultures de légumes se font pendant la période de soudure de décembre à juin : cela permet donc aux familles d’avoir des aliments disponibles lorsque les greniers sont vides et que les prix sont au plus haut. De plus, les familles vendent sur les marchés leur surplus de production, ce qui améliore leurs revenus et améliore également la disponibilité des légumes sur les marchés des villages environnants : c’est donc toute la population de la zone qui en profite indirectement. » 84% des familles non bénéficiaires des jardins ont ainsi témoigné que la disponibilité des légumes frais était aujourd’hui plus grande qu’avant la mise en place du projet. C’est ce qu’illustre notamment le maire de la commune de Gadougou : « avant la mise en place des jardins collectif par ACF au niveau de ma commune je me rendais chaque fin de semaine à Kita pour m’approvisionner en légumes, mais depuis que les jardins ont démarré, j’achète les légumes au niveau local pour la consommation de ma famille et pour envoyer à des parents à Kita car c’est beaucoup moins cher »
Dans le jardin de la santé de Kokofata, elles sont 54 femmes à se partager 0.75 hectare de jardins. Elles se mettent d’accord en début de saison sur les semences qu’elles veulent cultiver afin de pouvoir les acheter en gros à un meilleur prix. Au début du projet, il y a cinq ans, ACF a dispensé beaucoup de formations maraîchères, a fourni parfois les semences – notamment celles de légumes inconnus dans la zone mais à forte valeur nutritionnelle, pour que les familles les testent ainsi que des démonstrations culinaires visant à promouvoir de nouvelles recettes de cuisine basées sur des plats traditionnels auxquels étaient ajoutés ces nouveaux ingrédients aux vertus nutritionnelles importantes. Des points d’eau ont également été construits dans les jardins afin de s’assurer d’une bonne irrigation. Après cinq ans de projet, les utilisatrices du jardin sont aujourd’hui autonomes : « en tant qu’animateur, je fais du suivi et les conseille sur la gestion de l’association du jardin. Mais depuis 5 ans, les femmes ont parfaitement en tête le calendrier agricole, les techniques, les cultures d’hivernage ou les contre-cultures. Je sais que si je pars demain, elles peuvent travailler seules et le jardin continuera » poursuit Abakar.
Les femmes utilisatrices voit en effet tout à fait l’intérêt de ce jardin qui est devenu une véritable source de revenu : «...cette année j’ai vendu au marché de Kita 4 baignoires de tomates fraiches à 7000 francs l’unité, j’ai échangé une baignoire de tomates contre un sac de sorgho. Pour ma production d’oignon, je l’avais échangé contre une chèvre. Je compte rassembler tout mon argent pour acheter une vache bientôt…» explique témoigne Dansira. D’après une étude d’ACF, le revenu du maraîchage d’une femme travaillant dans le jardin de la santé est 2,4 fois plus élevé que celui une femme ne travaillant pas au jardin de la santé. L’utilisation de cet argent offre aux femmes un poids social important. On remarque également que 15% du revenu généré par les jardins de la santé est utilisé dans le cadre des soins de santé ce qui est de nature à améliorer la situation sanitaire des familles.
Au-delà de l’utilisation de cet argent pour des soins de santé, cette activité permet également d’améliorer la diversité alimentaire des familles et lutter ainsi contre les carences alimentaires et la sous-nutrition grâce à la production d’aliments riches en micronutriments et en vitamines. La proportion d’enfants de moins de 5 ans ayant consommé des aliments riches en vitamine A dans la zone d’intervention a en effet montré une augmentation significative de 40% en moins de deux ans et la mise en place des jardins de la santé a permis de doubler le nombre de ménage parvenant à diversifier leur alimentation. C’est ce qu’explique Badiala Damba du village de Gakouroukoto : « «…avec le jardin il y a eu beaucoup de changements dans le village. D’abord au niveau de la santé...parce que le jardin fournit des légumes vitaminés qui luttent contre les maladies à savoir la laitue, la tomate, le chou, l’oignon etc... ». Bref, des jardins bons pour la santé et le porte-monnaie, qui permettent réellement à moyen terme d’améliorer la sécurité alimentaire des familles les plus vulnérables !
Tags: