Pierre Chappard, Coordinateur du Réseau Français de réduction des risques et Laurence Cohen, Sénatrice, font partie des initiateurs de cet appel à une nouvelle politique des addictions, non pas fondée sur la répression, mais sur le respect de la dignité humaine, la liberté, la démocratie, l'égalité, la solidarité, la primauté du droit et des droits de l'homme. Réguler les usages des drogues et des comportements pour en réduireles dommages sur le bien-être de l'individu comme de la société et garantir un niveau élevé de sécurité pour le grand public, c'est l'objectif de cet appel à une nouvelle réflexion, à mener dans la concertation.
La loi qui fonde l'intervention publique dans le domaine des drogues en France a plus de 40 ans. Dans le monde, la guerre à la drogue a échoué, c'est le temps de la prévention. On rappellera le rapport de la Global Commission on Drug Policy qui appelait au passage d'une politique motivée par l'idéologie à une stratégie basée sur des données (preuves) scientifiques et dénonçait les conséquences dévastatrices pour les individus et les sociétés partout dans le monde des politiques fondées sur la répression.
Les consommations de produits psychoactifs se sont diversifiées et entraînent pour un large public des dommages importants. On note un rajeunissement de l'expérimentation mais aussi un usage plus répandu du cannabis chez les seniors. La consommation de la cocaïne progresse, en France le nombre d'usagers aurait triplé en 10 ans. Les frontières entre le licite et l'illicite sont de plus en plus floues, comme l'illustre la diversité nouvelles drogues, comme la MXE, les « bath salts » ou encore la pipérazine, la cathinone et les spices.
En France, une situation préoccupante : Aujourd'hui, si l'épidémie de sida est contenue grâce aux mesures de réduction des risques, les taux de contamination des hépatites et particulièrement l'hépatite C des usagers de drogue restent d'autant plus inquiétants. En France le VHC atteint ainsi 3 usagers sur 4. En milieu carcéral, la situation est particulièrement préoccupante. Au regard des 2 enquêtes Prevacar et Pri2de, les taux de prévalence du VIH et du VHC sont jusqu'à 8 fois supérieurs en prison. La mortalité liée aux usages de drogues illicites a repris sa tendance à la hausse.
Les initiateurs de la Charte dénoncent une politique actuelle française régressive et dans le même temps trop permissive sur le tabac et l'alcool, une absence de stratégie de prévention globale, un acharnement contre le cannabis faisant oublier des dérives plus graves et l'absence d'innovation dans nos mesures de prévention et de lien avec les initiatives terrain, elles fondées sur des réalités et médicales et sociales. La nouvelle réflexion politique devrait s'articuler autour de 4 objectifs, réduire l'offre, prévenir les usages nocifs en particulier en évitant l'expérimentation et en renforçant l'éducation et
l'information, réduire les dommages liés aux usages de drogues et améliorer l'accès et la qualité des soins, en particulier pour les usagers éloignés des dispositifs de soins, souvent précarisés. Cela passe par une intégration sociale et non une stigmatisation des personnes traitées. Les initiateurs appellent donc à une vraie consultation, avec la participation du milieu associatif, des instances représentatives des professionnels et des usagers de drogues à la préparation et la mise en œuvre d'une nouvelle stratégie nationale. D'autres initiatives de ce type, fleurissent dans le monde, dessinant une nouvelle direction de réflexion, telle l'initiative « Break the taboo ».Source : Pour une autre politique des addictions La Charte
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