La place des défenseurs de la démocratie et de la laïcité doit être auprès des Touaregs et des Kabyles qui luttent, les premiers au Mali, les seconds en Algérie, contre la charia et l’intégrisme. Mais qui les entend, les appuie, les aide ? Les Touaregs du Mouvement de libération de l’Azawad (territoire du Nord-Mali) viennent, dans l’indifférence, d’être vaincus par les islamistes d’Ansar el-Dine, appuyés par l’Algérie. Ceux-là ont entrepris de détruire plusieurs mausolées de Tombouctou. L’obscurantisme s’installe dans la cité malienne des "333 saints". Les fondamentalistes menacent d’y effacer, au nom de la pureté de l’islam, les traces de ce qui fut un centre intellectuel dans l’histoire africaine. Comme le rappelait, mardi, Libération, les démolisseurs s’appuient notamment sur cette sourate : "Ô vous qui croyez ! Le vin, les jeux de hasard, les pierres dressées et les flèches divinatoires sont une abomination et une œuvre du démon. Evitez-les. Peut-être serez-vous plus heureux". Mahomet aurait aussi donné l’exemple en renversant les idoles entourant la Kaaba, la pierre noire de La Mecque. Plus généralement, le recours à la table rase avait été décrit par le prix Nobel de littérature, V.S. Naipaul, pour qui "l’islam tue l’histoire". Il écrit : "En 637, cinq ans après la mort du Prophète, les Arabes entamèrent l’invasion de la Perse, et tout le passé grandiose du pays, du temps d’avant l’islam, fut déclaré temps de ténèbres".
Ces nazislamistes sont les ennemis déclarés de l’Occident. L’hebdomadaire Der Spiegel a ainsi révélé récemment que des néonazis allemands avaient prêté main forte aux terroristes palestiniens de Septembre noir pour leur attentat anti-israélien aux Jeux olympiques d’été de Munich, en 1972. Or, face à cette idéologie totalitaire en pleine expansion, au point d’avoir déjà pris pied au cœur de l’Europe et en France singulièrement, le monde libre se comporte avec lâcheté. Y compris face aux Frères musulmans, qui viennent d’emporter l’élection présidentielle en Egypte, et qui sont volontiers présentés comme des interlocuteurs modérés. Dans son dernier bloc-notes du Point, Bernard-Henri Lévy rappelle que cette organisation est née, à la fin des années 20 "comme une secte totalitaire, d’inspiration nazie et dont le fondateur, Hasan Al-Banna, ne perdait aucune occasion d’inscrire Adolf Hitler (…) dans la lignée des "réformateurs" (…)". Un défenseur de la démocratie ne peut aller vers ces infréquentables qui ne rêvent que de rallumer la guerre des civilisations. Son soutien doit aller, en revanche, aux jeunes démocrates iraniens, égyptiens, tunisiens, etc., qui ont vu leurs révolutions confisquées. Il doit aller, dans l’urgence, auprès des Touaregs du MNLA.
Pour eux, un rassemblement de solidarité aura lieu samedi, à 15 h, sur l’esplanade du Trocadéro, à Paris.
Quelle est la situation ?
Il y a eu des attaques très violentes d'islamistes sur les villes de l'Azawad. Ces groupuscules se servent des populations des villes comme bouclier humain. Derrière, il y a des pays avec d'énormes moyens. Ils ont une politique d'aides financières pour recruter, dans les populations sédentaires non touaregs. Notre peuple souffre. Notre identité, notre patrimoine sont détruits.
Quels sont vos moyens ?
Nous n'avons pas de soutiens extérieurs, mais plus d'effectifs que les islamistes et l'atout du terrain en dehors des villes. Nous avons aussi des officiers formés, rentrés de Libye. Nous préparons la contre-offensive.
Quels sont vos rapports avec les islamistes ?
Il y a le groupe islamique touareg Ansar Dine, apparu récemment, AQMI (Al-Qaida au Maghreb islamique) qui a des relations ambiguës avec l'ancien pouvoir du Mali et le MUJAO (Mouvement pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'Ouest). Nous avons tenté de convaincre Ansar Dine, seul mouvement touareg, de s'éloigner des mouvements terroristes. Il y a eu des débats au sein du MLNA. Les cadres, qui étaient au fait des questions internationales ont dit qu'il était suicidaire de collaborer avec les islamistes. Il y a eu aussi une révolte de femmes contre la charia. La rupture était obligatoire.
Qu'attendez-vous de la communauté internationale ?
Le déploiement d'une force africaine à Bamako est nécessaire pour doter le Mali d'institutions démocratiques, car nous ne pouvons discuter avec un pouvoir illégitime. Pour le Nord, il serait hasardeux de penser que 3.000 soldats africains vont aboutir à un résultat. S'ils viennent combattre les islamistes, la bonne stratégie est de composer avec nous. La communauté internationale doit comprendre que le MNLA est plus un atout qu'un handicap contre le terrorisme. Nous ne lui demandons pas la reconnaissance d'un état, mais une reconnaissance comme partenaire sérieux. Le MNLA soutient les mêmes valeurs démocratiques et laïques que la France.
(*) Le MNLA est né en 2011 mais tire ses racines de l'indépendance du Mali, en 1960, lorsque des chefs de tribus touaregs se sont opposés à leur rattachement au nouvel État. Il regroupe plusieurs mouvements rebelles et des Touaregs revenus de Libye. Il prône notamment la séparation de la religion et de l'État.
12 juillet 2012